Social - Qui fait quoi dans le RSA ?
La direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) des ministères sociaux publie une étude originale intitulée "Les modes d'organisation des conseils généraux avec la mise en place du revenu de solidarité active" (RSA). Menée à la fin de 2010 avec le concours de l'Assemblée des départements de France (ADF), elle montre que la mise en place de cette prestation en juillet 2009 a eu un impact sensible sur les partenariats et les modes d'organisation.
Tout d'abord, il apparaît que la stabilisation du dispositif a pris un certain temps. Mais la Drees considère qu'à la fin de 2010, soit dix-huit mois après l'instauration de la nouvelle prestation, "les principaux modes d'organisation associés aux innovations du RSA [étaient] en place".
Les organismes payeurs passent à l'instruction
L'un des principaux changements concerne la forte montée en puissance des organismes sociaux payeurs de la prestation, autrement dit, les CAF et les caisses de MSA (Mutualité sociale agricole). Ainsi, à la fin de 2010, 100 départements avaient confié à la CAF un rôle d'instruction du RSA, contre seulement 13 dans le cas du RMI en 2005. Pour leur part, les caisses de MSA instructrices sont passées de 37 à 98 sur la même période. En revanche, les CCAS et Cias instructeurs ont vu leur part reculer de 93 à 76 départements. La tendance est la même pour les associations, passées de 78 à 52 départements, et pour... les départements. En effet, 94 départements participaient à l'instruction directe des dossiers de RMI en 2005. A la fin de 2010, ils ne sont plus que 76 à le faire pour le RSA. La "pluri-instruction" reste toutefois la règle dominante : 29 départements fonctionnent ainsi avec quatre types d'organismes instructeurs (contre 24 avec le RMI en 2005) et 45 avec cinq types de services instructeurs (contre 6 en 2005).
L'orientation reste entre les mains du département
La dispersion est nettement moindre pour ce qui concerne l'orientation des bénéficiaires du RSA. L'étude relève en effet qu'"au final, le conseil général participe pratiquement toujours à la phase d'orientation, assumant l'entière responsabilité de la décision". Moins de la moitié des départements sollicitent l'expertise de Pôle emploi en matière de diagnostic et d'orientation, tandis qu'environ un tiers font appel aux CCAS et Cias. Très présentes dans l'instruction, les CAF le sont - logiquement - beaucoup moins dans l'orientation (un peu plus de 15% des départements). Les caisses de MSA sont un peu plus sollicitées à ce titre (un quart des départements), du fait de l'existence de filières spécifiques pour les salariés et exploitants agricoles.
La Drees observe aussi que près des deux tiers des départements ont spontanément pallié ce qui est vite apparu comme l'un des points faibles de la loi du 1er décembre 2008 : la dichotomie très tranchée, lors de l'orientation, entre le parcours d'insertion sociale et le parcours d'insertion professionnelle (ce dernier pour les bénéficiaires récents et jugés les plus proches de l'emploi).
Ainsi, 60% des départements ont créé de toutes pièces un parcours d'insertion "socioprofessionnel" ou "mixte". Son impact est loin d'être négligeable, puisqu'il représente environ 20% des parcours, contre 40% pour chacune des deux autres formes de parcours prévues à l'origine. Le parcours social est suivi par les services du conseil général dans 93% des départements. Les CCAS et Cias assurent ce suivi dans 66% des départements, et les CAF et MSA dans respectivement 33% et 44% des départements.
Référent unique, acteurs pluriels
La mise en place du RSA et l'officialisation du "référent unique" pour chaque bénéficiaire a aussi eu pour effet une nette montée en charge de Pôle emploi. Selon l'étude, "le conseil général et Pôle emploi assurent le rôle de référent unique, en fonction du type de parcours, dans la quasi-totalité des départements". Pour Pôle emploi, cette proportion n'était que d'environ un quart des départements du temps du RMI. Pour leur part, les CCAS et Cias assurent le rôle de référent des bénéficiaires du RSA dans les trois quarts des départements, comme en 2005 pour le RMI. A noter : les Plie (plans locaux pour l'insertion et l'emploi) sont référents uniques dans environ 40% des départements, tout comme les CAF, tandis que les caisses de MSA assument ce rôle dans 50% d'entre eux.
Ce partenariat entre institutions se retrouve également dans les équipes pluridisciplinaires chargées des réorientations des bénéficiaires et des sanctions en cas de manquement aux devoirs. Les CCAS et les associations sont notamment présents dans 60% d'entre elles, aux côtés des représentants des bénéficiaires (l'une des principales innovations de la loi de 2008). Par ailleurs, 80% des départements ont nommé leur "correspondants RSA", chargés d'apporter un appui aux référents uniques et d'assurer, le cas échéant, la responsabilité du suivi global du parcours des bénéficiaires.
Enfin, il apparaît que la mise en place du RSA a également des conséquences à plus long terme. Ainsi, 89% des départements ont été amenés à modifier l'organisation interne de leurs services, avec une redéfinition des postes de travail dans 88% des cas et la mise à disposition de nouveaux moyens matériels dans 82% des situations. Sur ce dernier point, la principale adaptation a bien sûr concerné les systèmes d'information autour de la gestion du RSA. La réforme a aussi eu pour effet d'enclencher "une refonte progressive des politiques d'insertion". Celle-ci se lit notamment dans l'élaboration de nouveaux PDI (plans départementaux d'insertion) et dans celle des pactes territoriaux d'insertion (PTI). Mais l'analyse du contenu de ces documents, effleurée dans l'étude de la Drees, mériterait une enquête à part entière.