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Préemption sur les fonds de commerce - Quand une réforme qui tarde à s'appliquer... devient un outil de négociation

Le droit de préemption sur les fonds de commerce devrait se révéler être un outil particulièrement pertinent pour les communes. Si le décret se fait attendre, sur le terrain, l'impact de la réforme est réel.

La loi du 2 août 2005 a ouvert aux communes qui le souhaitent un nouveau droit de préemption réservé aux fonds de commerce, aux fonds artisanaux et aux baux commerciaux. Le Code de l'urbanisme dans son article L.214-1 et suivants détaille cette nouvelle procédure. La municipalité définit, par une délibération motivée, un périmètre de sauvegarde dans lequel toute cession de fonds doit faire l'objet d'une déclaration préalable à la mairie. Passé deux mois, le silence de la  commune vaut renonciation. Ensuite, la municipalité a un an pour revendre ce fonds. Un décret, attendu depuis deux ans, devrait rappeler et préciser en quelques lignes certains points du texte comme l'obligation de publication des périmètres de sauvegarde de commerce. Il devrait notamment préciser ce qui se passera si, à l'expiration de ce délai d'un an, la commune n'a pas trouvé un repreneur commerçant ou artisan. Sur le terrain, ces incertitudes n'ont pas empêché de nombreuses communes à s'engager dans cette voie pour sauvegarder le commerce et l'artisanat de proximité et la diversité de son offre. Alors que le décret d'application est, depuis quelques jours, sur le bureau du Conseil d'Etat pour examen, le conseil municipal de Sainte-Maure-de-Touraine (Indre) adoptait, en décembre dernier, une délibération définissant le périmètre d'intervention du droit de préemption sur les fonds de commerce.

 

Un outil pour une stratégie globale

"Cette initiative entre dans une stratégie globale d'appui aux commerces de proximité situés, pour la plupart, dans le centre historique", explique Christian Barillet, maire de Sainte-Maure-de-Touraine, commune située à 35 km de Tours. La commune qui compte 3.969 habitants et une soixantaine de commerces de proximité a en effet  de la suite dans les idées : une zone commerciale réservée aux enseignes est en voie de création à l'entrée de la ville, la rénovation des espaces publics dans le centre historique, réalisée en trois tranches, est en cours d'aboutissement. Elle se décline dans le cadre d'une opération Fisac : rénovation de la place centrale avec une approche patrimoniale forte, rénovation de la liaison entre la place centrale et le centre commercial Carrefour. La troisième tranche prévue pour 2008 s'attachera à transformer la voirie de la traversée de la ville.

 

Complémentarité avec la préemption sur le bâti

"Nous sommes confrontés à un problème particulier : la surface des fonds de commerce est insuffisante. Comprise entre 20 et 50 m2, elle ne répond pas à la demande qui s'évalue dans une fourchette comprise entre 60 à 120 m2." Qu'à cela ne tienne, la mairie va promouvoir un regroupement des surfaces en utilisant son droit de préemption sur le bâti et son droit de préemption sur les fonds. Le fait que le décret ne soit pas encore publié n'est-il pas une limite ? "La préfecture nous a rappelé que la loi, elle, a été publiée !", répond Christian Barillet. La mairie vient d'acheter le bâti et le fonds de commerce d'un restaurant. "Nous étions face à un fonds en perdition. Il était impossible de le remettre en activité car l'infrastructure n'était pas aux normes et les travaux imposaient de gros investissements." La municipalité a acheté le fonds à bas prix, sans pour autant utiliser le droit de préemption sur le fonds. Elle ne sera donc nullement bloquée par le délai d'un an qui s'impose pour la revente. "Cet outil nous a permis de négocier dans de bonnes conditions avec le syndic qui savait que nous avions désormais le droit de préemption à notre disposition !", conclut, amusé, le maire de Sainte-Maure-de-Touraine.

 

Clémence Villedieu