Développement durable - Protection de l'environnement : les dépenses repartent à la hausse
Malgré une baisse de 1,5% des investissements, la dépense liée aux activités de protection de l'environnement a progressé de 3,5% en 2010 pour atteindre près de 46 milliards d'euros, selon le rapport 2012 de la commission des comptes et de l'économie de l'environnement que vient de publier le Commissariat général au développement durable. L'augmentation est significative, surtout dans un contexte de récession. En moyenne annuelle depuis 2000, elle avoisinerait les 4,8 %, soit une hausse plus rapide que celle du PIB.
Le poste qui progresse le plus est la gestion des déchets. Et plus précisément celle des déchets municipaux. Entre 2000 et 2010, la dépense courante de gestion des déchets municipaux a augmenté en moyenne de plus de 6% par an. Quelle en est la raison ? Cela va de pair avec le développement de la collecte sélective, note le rapport. Et avec l'apparition de modes de traitement plus complexes et plus coûteux : procédés de valorisation organique, incinération avec récupération d'énergie, etc. L'augmentation du parc des déchèteries (plus de 4.500 déchèteries recensées en 2010 contre un peu plus de 3.000 en 2000) pèse aussi dans la balance, au même titre que le durcissement réglementaire. Pour financer une partie de ces dépenses, les ménages sont mis à contribution par le biais de la taxe ou de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères (Teom ou Reom), dont les niveaux ne cessent du coup d'augmenter. En 2010, la Teom, acquittée par 56 millions d'habitants, a crû de 5,8% pour atteindre 5,7 milliards d'euros, après une hausse de 7,5% en 2009. Au total, les ménages financent plus de 60% de la dépense courante de gestion des déchets. Le rapport fait aussi apparaître une augmentation des soutiens versés par Eco-Emballages aux collectivités locales (+2,9% à 416 millions d'euros). "Ces soutiens augmentent en moyenne chaque année de près de 11% depuis 2000", souligne-t-il. On relève aussi dans le rapport que le montant des services de gestion de déchets délégués aux entreprises est stable par rapport à 2009 - il représente 4,3 milliards d'euros hors taxes en 2010 - et que les comptétences relatives à la gestion des déchets ménagers sont de plus en souvent transférées à des structures intercommunales. Autre donnée du rapport : la dépense de nettoyage des rues qui, selon la classification européenne des activités de protection de l'environnement, relève de la gestion des déchets est quant à elle stabilisée à 1,2 milliard d'euros en 2010, après une baisse en 2009.
La protection de la biodiversité augmente
La dépense liée à la protection de la biodiversité connaît également une progression marquée (+5% en 2010). Financée aux trois quarts par des fonds publics et fortement portée par les administrations publiques, elle s'établit à 1,9 milliard d'euros. Le rapport estime que "cette hausse s'inscrit dans un contexte favorable lié à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement qui fixe plusieurs objectifs afin de stopper la perte de la biodiversité à l'horizon 2010". Elle concerne autant des actions de réduction des pressions sur les milieux que de connaissance de la biodiversité et des paysages. La moitié de la dépense de gestion des espaces et des espèces visait à restaurer des milieux aquatiques, avec en tête des actions des Agences de l'eau. Parmi les autres acteurs impliqués figurent le ministère de l'Écologie, le Conservatoire du littoral, les parcs nationaux ou encore l'Agence des aires marines protégées. Bien qu'étant à la marge, les entreprises aussi participent via leurs actions compensatoires. Les collectivités ont accru leur contribution mais "l'évolution de leur effort financier est à mettre en regard de l'élargissement de leurs compétences en matière d'environnement", souligne le rapport. "Ainsi, illustre-t-il, les intercommunalités élaborent des 'schémas trame verte' ou contractualisent la gestion d'espaces avec des associations. Les départements acquièrent et gèrent des espaces naturels sensibles. Enfin, les régions peuvent initier la création de parcs naturels régionaux et de réserves naturelles régionales".
Les dépenses liées à la protection de l'air ou à la R&D augmentent elles aussi (respectivement +4,8 % et +2,4 %) tandis que les dépenses de protection des sols et des eaux souterraines restent "relativement stables" en 2010. Le rapport note aussi une progression de la dépense d'administration générale pour la protection de l'environnement, qui représente près de 3,8 milliards d'euros en 2008. "Ces dépenses correspondent aux activités d'entités publiques dans le but d'administrer, de réglementer et d'aider à la mise en oeuvre des décisions prises dans le contexte de la protection de l'environnement", explique-t-il. La progression de ce poste de dépenses est surtout le fait du niveau local (+10%), au premier rang duquel figurent les communes (plus de 43% des 2,2 milliards d'euros dépensés par les administrations locales). En revanche, les sommes consacrées par les départements (193 millions d'euros) et les régions (46 millions d'euros) aux activités de gestion et d'administration environnementales se réduisent de 7% en 2010.
Après un fort recul en 2009, on note encore une légère progression de la dépense pour la protection et l'assainissement du sol, des eaux souterraines et des eaux de surface qui s'établit à 1,6 milliard d'euros. "Alors que la dépense consacrée à la dépollution repart à la hausse, les dépenses de prévention et de surveillance, mesure et contrôle diminuent légèrement", détaille le rapport tandis que "la dépense de lutte contre l'érosion des sols est stable entre 2009 et 2010". Au chapitre des baisses, les dépenses de lutte contre le bruit (2,1 milliards d'euros en 2010) ont reculé de 3% par rapport à 2009. Principaux postes touchés par cette baisse : l'isolation acoustique des logements neufs, le remplacement des silencieux des véhicules légers et des deux-roues et l'investissement en outils de lutte contre le bruit industriel. Les ménages financent plus de la moitié de la dépense de lutte contre le bruit. L'Etat, l'Ademe et les les collectivités locales contribuent à hauteur de 210 millions d'euros - la moitié sous forme d'aides pour les ménages et l'autre moitié principalement pour la résorption des "points noirs du bruit".
Forte relance du secteur de la récupération
La deuxième partie du rapport est consacrée aux "dépenses de gestion des ressources naturelles" - prélèvement et distribution d'eau, récupération/recyclage des déchets - qui augmentent de 10,9%. La première progresse d'un peu plus de 2% en 2010 pour s'établir à 13,1 milliards d'euros, avec une dépense courante en hausse de 1,7%. La progression de la consommation finale ralentit, "confirmant vraisemblablement les changements dans les comportements des ménages entrevus les années antérieures qui tendraient à modérer davantage leur consommation en eau", souligne le rapport. Celui-ci insiste aussi sur les changements intervenus dans l'organisation du service collectif de production et de distribution d'eau. "Alors que la production de ce service était assurée à 80% par les entreprises délégataires en 2000, elles ne représentent que 77% de la production en 2010". La dépense liée au secteur de la récupération de déchets, sévèrement touché par la crise économique en 2009, a quant à elle connu une forte hausse (+39% par rapport à 2009, à 5,6 milliards d'euros). Elle a été tirée par la conjugaison de trois facteurs (investissements plus importants, production croissante et renchérissement des prix) tandis que la mise ne place de nouvelles filières de responsabilité élargie du producteur se poursuit.
Emplois verts : la difficile rencontre de l'offre et de la demande
Enfin, le rapport s'achève par un zoom sur plusieurs dossiers environnementaux. Le premier traite de la dépense relative aux espaces verts urbains qui, en dépit d'une baisse continue des investissements depuis 2007, progresse encore en 2010 pour atteindre 3,4 milliards d'euros. Autre focus : la dépense nationale en faveur des énergies renouvelables qui a connu une forte progression (19%) en 2010. Après un recul de plus de 2% en 2009, elle est estimée à 21 milliards d'euros l'an dernier. Toutes les filières sont concernées, "à l'exception des pompes à chaleur", qui se sont mal vendues en 2010. La dépense pour l'énergie photovoltaïque a plus que doublé entre 2009 et 2010 pour atteindre 2,9 milliards d'euros tandis que celle du solaire thermique marque le pas (470 millions d'euros en 2010). La production d'hydro-électricité s'est aussi accrue (+9% par rapport à 2009 à 63 TWh) et "l'éolien a encore le vent en poupe", souligne le rapport avec une dépense en progression de 28% à 2,8 milliards d'euros. Les dépenses pour les énergies tirées de la biomasse ont elles aussi toutes progressé. Au final, en termes de subventions, les producteurs d'énergies renouvelables ont été plutôt gâtés et reçu plus d'1,5 milliard d'euros d'aides publiques, soit 36 % de plus qu'en 2009. Côté éco-activités et emploi environnemental, 2010 a été marqué par un regain de dynamisme après le repli de 2009 consécutif à la crise économique. Avec une production de 69,9 milliards d'euros, les éco-activités ont mobilisé 452.600 emplois en équivalents temps plein (+4,5% par rapport à 2009). Mais le marché du travail des métiers "verts" apparaît moins porteur en 2011. "Les offres, comme les demandes, sont concentrées sur les métiers d'entretien des espaces naturels et urbains", note le rapport qui constate "un décalage (...) entre les métiers demandés et ceux offerts".