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Etat civil / nationalité - Projet de loi immigration : le texte vidé de ses dispositions les moins consensuelles

L'Assemblée nationale et le Sénat se prononceront définitivement les 10 et 11 mai sur le projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité. Sauf surprise, les parlementaires adopteront le texte de la commission mixte paritaire (CMP). Le 4 mai, celle-ci a rendu ses arbitrages sur plusieurs points qui concernent directement les mairies.

  • Les parlementaires ont renforcé les conditions de la naturalisation. Aujourd’hui, un étranger doit détenir un niveau minimum de maîtrise de la langue française pour espérer devenir Français. Lorsque la loi sera parue, il devra, en plus, prouver qu’il a "une connaissance suffisante, selon sa condition, de l’histoire, de la culture et de la société françaises". Le niveau exigé et les modalités d‘évaluation seront fixés par un décret en Conseil d’Etat. En outre, le candidat à la naturalisation devra adhérer "aux principes et aux valeurs de la République". "À l’issue du contrôle de son assimilation", celui qui deviendra Français signera la charte des droits et devoirs du citoyen français. Cette charte, approuvée par décret en Conseil d’Etat, rappellera "les principes, valeurs et symboles essentiels de la République française". Les conditions de naturalisation seront également renforcées pour la personne de nationalité étrangère qui a épousé un Français ou une Française. Ce conjoint doit notamment, selon le Code civil, "justifier d'une connaissance suffisante, selon sa condition, de la langue française". Le projet de loi prévoit qu’un décret en Conseil d’Etat fixera le niveau et les modalités d’évaluation de la personne.
  • Le projet de loi punit les "mariages gris" des mêmes peines que les mariages de complaisance ("mariages blancs"), à savoir 5 ans de prison et 15.000 euros d’amende. A l’instigation de la députée Claude Greff, qui a présidé une mission d’étude sur les mariages gris instituée par le ministre de l‘Immigration, les députés ont voulu réprimer plus sévèrement ce type d’infraction (lire ci-contre notre article du 13 octobre 2010). Mais ils n’ont pas été suivis par les sénateurs et la commission mixte paritaire a arbitré en faveur de ces derniers. Les députés voulaient faire la distinction entre deux types d’infractions. Dans le mariage blanc, les deux conjoints sont complices : ils fraudent sciemment pour obtenir un titre de séjour ou la nationalité française. Le mariage gris s’apparente, lui, à une "escroquerie sentimentale" : l’un des deux conjoints est sincère, alors que l’autre le trompe sur ses intentions.
  • Le projet de loi adopté en CMP ne retient pas les dispositions introduites par les députés, qui visaient à supprimer le caractère automatique de l'acquisition de nationalité à 18 ans pour les enfants nés en France de parents étrangers, ayant eu leur résidence habituelle en France pendant au moins 5 ans depuis l'âge de 11 ans. Ces jeunes devaient toujours bénéficier de la nationalité française à leur majorité, mais seulement s’ils en faisaient la demande. En 2009, 2.300 jeunes ont acquis automatiquement la nationalité à leur majorité, mais 23.700 jeunes l’ont demandée à partir de 13 ans.
  • La CMP n’a pas validé non plus le souhait exprimé par les députés de conférer expressément aux maires "le soin de faire respecter les symboles républicains lors des célébrations de mariage se tenant dans les locaux de la mairie". Le député Christian Vanneste qui était à l’origine de la mesure, voulait "bannir de la célébration du mariage les drapeaux qui manifestent l’appartenance à une communauté étrangère" (voir notre article du 13 octobre 2010).
  • On notera qu’au cours de l’examen du texte, les parlementaires ont rejeté l’introduction d’un nouveau cas de déchéance de nationalité voulue par le président de la République dans son discours de Grenoble du 30 juillet 2010. Il s’agissait de déchoir de la nationalité française les personnes nouvellement naturalisées et condamnées pour le meurtre de représentants de forces de l’ordre ou de personnes dépositaires de l’autorité publique. L’annonce de cette mesure avait suscité une longue polémique.