Programme Leader 2023-27 : pas de réduction du nombre de groupes d’action locale, sauf en Aura

Les résultats de la plupart des appels à manifestation d’intérêt lancés par les régions pour le programme Leader sont désormais connus. Le nombre de groupes d’action locale variera finalement à la marge, à une exception près : la région Aura, qui en a réduit drastiquement le nombre, avec pour objectif que "le maximum de crédits aille aux porteurs de projets". Un choix qui ne fait pas l’unanimité.

La saison 2023-27 du programme européen de développement rural Leader est désormais sur les rails, ou presque. Une grande majorité des régions ont publié leurs appels à candidature – à l’exception de la Corse, qui n’a pour l’heure publié qu’un appel à manifestation d’intérêt – et même annoncé les résultats. Ne manquent plus qu’à l’appel ceux de la Guyane, de la Martinique, de la Réunion et des secondes vagues des Hauts-de-France et des Pays de la Loire. 

Finalement, le nombre de groupes d’action locale (GAL), qui mettent en œuvre le programme sur le terrain, n’aura évolué qu’à la marge. Il se réduit d’une unité en Bourgogne-Franche-Comté (22 au total), en Centre-Val-de-Loire (23), en Occitanie (37) et en Paca (11). Il est inchangé en Bretagne (21), en Île-de-France (5) et à Mayotte (3). Et il aura même augmenté en Grand Est (+3 ; 35), en Normandie (+1 ; 18) et en Nouvelle-Aquitaine (+2 ; 54). Pour être exhaustif, 10 ont d’ores et déjà été retenus par la 1re vague des Hauts-de-France (17 au total dans la précédente programmation) et 21 par celle des Pays de la Loire (28 précédemment).

Aura divise ses GAL par quatre

Comme attendu (v. notre article du 13 avril 2022), seule la région Auvergne-Rhône-Alpes (Aura) aura fait le choix de la concentration. Hier 43, ses GAL ne sont désormais plus que 13, "d’échelle départementale" (la région compte 12 départements). "Les GAL épousent les périmètres des EPCI, et ne correspondent donc pas nécessairement à ceux des départements. L’Isère, la Savoie et la Drôme comptent 4 GAL, afin de tenir compte du relief et des bassins de vie", précise Emmanuel Ferrand, conseiller régional délégué aux fonds européens agricoles, interrogé par Localtis. La raison de ces regroupements ? "La volonté de renforcer l’efficacité financière", explique-t-il. "Sur les 43 GAL de la précédente programmation, l’ancienne région Auvergne en comptait 12, et l’on s’est aperçu qu’avec une taille souvent plus importante, ils se montraient plus efficaces, soutenant davantage de projets, que leurs homologues de Rhône-Alpes. En Auvergne, les crédits consacrés à l’animation étaient de l’ordre de 15% de l’enveloppe, alors qu’ils dépassaient les 20% en Rhône-Alpes. Or nous souhaitons que le maximum de crédits aille aux porteurs de projets, sur les territoires", décrypte l’élu. Un objectif qui n’est pas sans répondre au souhait de la Cour des comptes européenne, émis l’an passé, de voir réduits "les coûts administratifs et de fonctionnement" de Leader (v. notre article du 12 juillet 2022). 

Emmanuel Ferrand avance une autre motivation : "La baisse de 20% des crédits Feader alloués à la région pour la programmation 2023-27 par rapport à la précédente, avec son impact sur Leader". Il développe : "En 9 ans (2014-2022), certains GAL n’ont même pas programmé l’intégralité de leur enveloppe initiale ; certains ont à peine consommé 200.000 euros. Si l’on avait répercuté cette baisse de 20% en conservant les mêmes périmètres, les montants en jeu n’auraient plus fait grand sens". 

Mariages forcés

Aussi l’élu a-t-il dans un premier temps pris son bâton de pèlerin pour inciter les GAL à se regrouper. Mais nul n’étant prophète en son pays, personne n’a voulu convoler. La région a donc décidé dans un second temps de forcer les mariages. "Tout en faisant preuve de souplesse", défend Emmanuel Ferrand, notamment "en permettant des dérogations" au cahier des charges fixé (i.e. un périmètre répondant à au moins deux des critères suivants – comprendre au moins 9 EPCI et/ou 200.000 habitants et/ou 2.500km–, avec en outre des EPCI entiers et en excluant les communes des métropoles, à l’exception des périmètres de parc naturel régional). "Nous n’imposons qu’une chose : avoir une programmation à l’échelle départementale. Pour le reste, les GAL peuvent s’organiser comme ils l’entendent à l’échelle infra-départementale", argue encore l’élu.

Un pari contesté

Un choix qui ne fait pas, loin s’en faut, l’unanimité. "Il y a des endroits où les réticences furent fortes", concède Emmanuel Ferrand. Interrogé par Localtis, Thibaut Guignard, président de Leader France, se fait très critique : "La création de GAL départementaux vise sans doute à ‘rationaliser’ – mot à la mode – et mutualiser les moyens. Toutefois, cela va à l’encontre de plusieurs fondamentaux de Leader, qui n’est pas un fonds européen, mais un programme qui s’appuie sur une méthode qui a fait ses preuves : le développement local par les acteurs locaux. Comment associer ces derniers dans un comité de programmation à l’échelle départementale ? Comment assurer une présence de terrain et un accompagnement de proximité des porteurs de projets par les animateurs ? Leader demande un territoire de projet cohérent et défini par les acteurs locaux, et non imposé. Plutôt que de s’attaquer aux raisons de la complexité administrative franco-française de la gestion de Leader, on préfère donc ‘rationaliser’, quitte à perdre l’esprit du programme". Pour autant, Emmanuel Ferrand ne se veut pas dogmatique : "Cette nouvelle architecture est un essai. On verra dans 5 ans s’il est concluant". Il s’avoue confiant, vantant le savoir-faire de la région : "Aura est la seule région à avoir consommé l’ensemble de ses fonds Feader 2014-2022, avec une programmation qui dépasse même les 100%. Même l’État n’y arrivait pas."

 

Le congrès des GAL ouvre bientôt ses portes à Briançon

Après Angers en 2022 (v. notre article du 15 novembre 2022), le congrès national des groupes d’action locale (GAL), organisé par Leader France, se tiendra cette année les 16 et 17 octobre à Briançon (Hautes-Alpes) – ville dont les fortifications Vauban sont inscrites depuis 2008 au patrimoine mondial de l’Unesco. Sont notamment au programme, un retour d’universitaires sur le bilan de Leader sur la programmation 2014-2020, la nouvelle programmation 2023-2027 et un débat sur "les territoires ruraux à l’heure des élections européennes".

Renseignements et inscriptions : leaderfrance.fr