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Défense - Programmation militaire : Jean-Yves Le Drian ne lève pas le voile sur les restructurations

Les députés ont achevé, vendredi, l'examen du projet de loi de programmation militaire pour les années 2014-2019. Au cours des débats qui ont commencé le 26 novembre, plusieurs députés ont reproché au gouvernement le manque de visibilité sur les sites concernés par les restructurations.

Les députés ont achevé, vendredi le 29 novembre 2013, l'examen du projet de loi relatif à la loi de programmation militaire (LPM) pour la période 2014-2019. Ils ont notamment adopté les nouvelles dispositions sur les services de renseignement destinées à lutter contre le terrorisme.
Au-delà de ce sujet sensible,  les débats ont été émaillés de nombreuses inquiétudes concernant les restructurations à venir. Le texte, qui a été voté par le Sénat le 21 octobre, prévoit une nouvelle réduction d'effectifs de 23.500, en plus des 10.175 suppressions de postes prévues dans le cadre de la loi précédente sur les années 2014 et 2015, et des fermetures de sites. Sur le sujet, dans son discours d'ouverture mardi 26 novembre, le ministre de la Défense a voulu se montrer rassurant. "Concernant les restructurations, mon objectif est de préserver au maximum les liens qui unissent les armées et les territoires, a ainsi affirmé Jean-Yves Le Drian. Mais ma démarche est aussi, pour les rares sites qui seront amenés à fermer, de permettre une transition dans les meilleures conditions possibles. Pour ce faire, un accompagnement économique est inscrit dans le projet de loi, qui tire les enseignements des précédentes restructurations."
150 millions d'euros seront ainsi consacrés aux territoires les plus affectés, l'Etat souhaitant concentrer davantage ses actions pour éviter l'éparpillement. Le gouvernement a déjà annoncé quelques-unes des restructurations à venir (voir notre article du 4 septembre 2013), qui concernent deux régiments (le 4e régiment de dragons de Carpiagne et le 1er régiment étranger de cavalerie d'Orange) et quatre sites de l'armée de l'air (base aérienne 116 de Luxeuil-les-Bains, base aérienne 102 de Dijon, le détachement air 277 de Varennes-sur-Allier et l'unité de commandement de la base aérienne 279 de Châteaudun). Mais au-delà de ces annonces, peu d'informations sont données sur le programme de fermeture de site. Un manque de transparence que nombre de députés ont critiqué, comme   l'ancien ministre de la Défense Hervé Morin, député (UDI) de l'Eure : "J'aurais souhaité qu'un plan global soit annoncé, pour prendre le temps de la conversion des sites, et pour que les membres du personnel puissent organiser leur vie familiale en tenant compte de la réforme des implantations."

"Nous agissons à l'aveugle"

De son côté, François Fillon, député de Paris (UMP), qui a été à l'origine, en tant que Premier ministre, de la réorganisation de 2008, a lui aussi fait part de ses inquiétudes, soutenant une motion de rejet préalable du projet de loi. "Aujourd'hui, nous ne savons pas qui, où, quand, comment et selon quelle cohérence opérationnelle seront touchés les régiments et les garnisons !, a-t-il ainsi reproché. L'objectif de 34.000 déflations sur cinq ans ne peut se réaliser sans un plan clair et pluriannuel de restructuration. A cet égard, notre débat actuel est amputé par un manque de précision et de visibilité, que je veux dénoncer. Oui j'ai assumé le resserrement des effectifs, mais là nous agissons à l'aveugle et je pense que nous dépassons le seuil du raisonnable." Même remarque pour d'autres députés, à l'image de Philippe Folliot, député (UDI) du Tarn, qui a demandé au ministre d'informer "au plus vite les unités victimes de restructuration", pour permettre aux personnels militaires et civils de se préparer au mieux à leur changement de situation, "les délais légaux étant d'un an pour les premiers et de deux ans pour les seconds", a-t-il précisé.
La critique principale repose sur le choix du gouvernement de livrer au compte-goutte les noms des sites qui seront concernés par les restructurations. "Vous refusez de citer la liste complète des sites de défense que vous prévoyez de fermer, préférant les annonces au fil de l'eau", a ainsi souligné Marianne Dubois, députée (UMP) du Loiret.
Pourtant les répercussions sur les territoires sont importantes et ont été maintes fois mises en avant par les députés. Des questions quant au montant, 150 millions d'euros, alloué à l'accompagnement de ces territoires, ont été posées. "Il nous est difficile de dire si les crédits alloués au plan d'accompagnement des restructurations sont suffisants ou non", a ainsi indiqué Jean-Jacques Candelier, député (GDR) du Nord, insistant sur les conséquences négatives sur la situation des territoires de la disparition d'unités et d'établissements militaires. "Je connais cette situation dans le Nord, un département sinistré par les fermetures d'entreprises et où la fermeture de la base aérienne de Cambrai est un traumatisme. Cette LPM présente des risques sociaux importants non seulement pour le ministère et ses personnels, mais aussi pour l'industrie de défense", a-t-il souligné. Le député du Nord a également mis en avant les suppressions de postes annoncées par les acteurs du secteur, du fait de l'évolution à la baisse du rythme des livraisons de matériels. "Au total, la réduction des commandes implique des milliers de suppressions d'emplois : sur les 165.000 postes de travail des 4.000 entreprises du secteur de la défense, les industriels prévoient la perte de 10.000 emplois directs et d'autant d'emplois induits", a-t-il signalé.
Le vote solennel sur l'ensemble de la loi de programmation militaire aura lieu mardi 3 décembre.