Archives

Habitat / Fiscalité - Première année pour la taxe d'habitation sur les logements vacants

Dans les villes qui l'ont décidé, les premiers avis d'imposition à la taxe d'habitation sur les logements vacants depuis plus de cinq ans parviennent aux propriétaires concernés. Pour les communes, l'intérêt de cette taxe est double : remettre des biens locatifs sur le marché et optimiser leurs ressources fiscales.

Certains propriétaires seront peut-être surpris de recevoir dans le courant de ce mois un avis d'imposition pour un ou plusieurs logements qu'ils ont laissé vacants pendant au moins cinq ans. Une nouvelle taxe, instituée par l'article 47 de la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement, vise en effet, en les assujettissant à la part communale de la taxe d'habitation (et à la part intercommunale dans les communes appartenant à un EPCI sans fiscalité propre), à les inciter à remettre leur bien immobilier sur le marché locatif.
Il y a un an, les collectivités avaient jusqu'au 1er octobre pour prendre leur délibération. L'enjeu était de taille. "On évalue aujourd'hui à plus de 500.000 le nombre de logements vacants situés dans les zones de fortes tensions du marché immobilier et qui pourraient être facilement mobilisables", indiquait au Sénat le rapporteur du projet de la loi, lors de sa discussion.
Une taxe sur les logements vacants existe pourtant bien déjà, depuis le 1er janvier 1999, mais elle ne s'applique qu'à huit agglomérations de plus de 200.000 habitants. Jusqu'à présent, les autres communes, en particulier en milieu rural, étaient donc dépourvues de cet instrument fiscal. C'est pour répondre aux tensions sur le logement, qu'elles connaissent elles aussi, que le Parlement leur a donné la possibilité d'adopter une taxe d'habitation sur les logements vacants depuis plus de cinq ans. Celles qui sont intéressées doivent prendre une délibération avant le 1er octobre, pour une entrée en vigueur de la mesure l'année suivante.

Optimisation

Pour les communes, la nouvelle taxe présente un autre intérêt, en matière d'optimisation fiscale. En effet, les services fiscaux procéderont chaque année à l'envoi, à chaque propriétaire de logement vacant éligible à la taxe, d'une demande d'information sur l'état d'occupation du ou des logements. Cette relance permettra de réduire le nombre des locaux vacants et augmentera mécaniquement les recettes de taxe d'habitation. La ville de Pau s'attend par exemple à bénéficier de 480.000 euros de recettes supplémentaires dès cette année. Rien d'étonnant alors que les communes apportent fréquemment, dans les limites de leurs compétences, un coup de pouce à leur partenaire de l'Etat. Certaines, comme Pau, procèdent à des vérifications sur le terrain. Ainsi, des agents relèvent les noms figurant sur les boîtes aux lettres des habitations. Une information simple, mais précieuse, qui est recoupée avec les données de la régie des eaux sur les consommations d'eau.
Au total, combien de communes ont institué à ce jour la taxe sur les logements vacants ? Difficile de répondre, car la Direction générale des impôts ne dispose pas de statistiques centralisées. Il est cependant certain que beaucoup de communes ne se sont pas emparées du nouvel outil. A Arles, "les élus ont jugé la mesure anti-électoraliste", témoigne un agent de la mairie, qui invoque aussi les nombreuses "difficultés pratiques" liées au recouvrement fiscal. Les règles sont en effet les suivantes : les logements dont la durée d'occupation a été supérieure à  trente  jours consécutifs au cours de chacune des cinq années écoulées et ceux dont la  vacance est  "indépendante de la volonté du contribuable" bénéficient d'une exonération totale de la taxe.

Un effet réellement dissuasif

Mais comment ces règles peuvent-elles correctement s'appliquer, alors que la connaissance de la vacance est le plus souvent imparfaite ? De plus, on imagine aisément que les propriétaires seront tentés d'invoquer une vacance involontaire pour échapper à l'administration fiscale. Une instruction du 14 mai 2007 précise "qu'il appartient au contribuable de prouver qu'il a effectué toutes les démarches nécessaires pour vendre ou louer son logement vacant ou que l'immeuble ne peut être occupé dans des conditions normales". Chaque situation sera évaluée au cas par cas. Par conséquent, les dossiers de contentieux devraient rapidement s'empiler. De quoi peut-être décourager à l'avenir certaines communes, qui seront éventuellement tentées de se tourner vers d'autres outils de lutte contre la vacance.
Le recul manque encore évidemment pour évaluer l'impact réel de la nouvelle taxe. Mais à Pau, l'accélération soudaine de la vente des maisons déclarées vides laisse à penser que l'instrument joue un effet réellement dissuasif. "Des propriétaires qui, en plus de leurs revenus, n'avaient pas besoin de loyers pour vivre, se sont intéressés à leurs biens dès qu'ils ont su qu'ils étaient imposés", témoigne le responsable de l'observatoire fiscal de la ville, Laurent Chapuis. De quoi réjouir le maire, Yves Urieta, qui est bien décidé à réduire dans sa commune le nombre des logements vacants - 1.500 appartements et une centaine de maisons seraient vacants depuis au moins cinq ans.

 

Thomas Beurey / Projets publics