Pour l'observatoire des territoires connectés et durables, la dynamique d'adoption est enclenchée
La première publication de l'observatoire des territoires connectés et durables confirme l'appétit des collectivités pour la mobilisation des objets connectés au service de la transition environnementale. L'étude éclaire sur les bénéfices de ces projets à partir des retours concrets des territoires tout en listant les marges de progression.
La FNCCR, Infranum et la Banque des Territoires ont présenté le 1er février 2024 les résultats du premier observatoire des territoires durables et connectés. 60 collectivités ayant un projet en cours ou opérationnel ont répondu à cette enquête complétée de 30 interviews d'industriels et collectivités. Si l'échantillon peut paraitre faible, Agnès Le Meil, directrice des études, lnfraNum relève "la présence de collectivités de tous types, rurales comme urbaines, avec globalement une maturité plus importante que ce à quoi on pouvait s'attendre".
Des gains identifiés
Une banalisation que les auteurs imputent à la maturité des technologies et à des "gains clairement identifiés". C'est du reste pas du tout un hasard si les territoires connectés se concentrent sur quelques usages : la gestion énergétique des bâtiments (30 projets en cours ou réalisés), l'éclairage public (28), la gestion de l’eau (26), le stationnement (19) et l'optimisation de la collecte des déchets (19). "Grâce aux entretiens réalisés, nous avons pu comparer les bénéfices théoriques des territoires connectés aux retours du terrain", explique Agnès Le Meil. Pour l'eau, il faut par exemple ajouter à la détection fuite et à la maîtrise des consommations, "l'aide à la régularisation des factures", qui représente "un gain de temps dans la relation-usager". Certains domaines se révèlent par ailleurs plus complexe que d'autres à mettre en œuvre. C'est par exemple le cas de l'optimisation de la collecte des déchets, un projet qui exige un accompagnement humain tant il modifie les habitudes des équipes d'éboueurs. L'éclairage public intelligent amène pour sa part à "renouveler le dialogue entre les syndicats d'électricité et les communes", car il engendre des arbitrages sur le bon niveau d'éclairage et l'équilibre sécurité/sobriété. Quant à l'instrumentation des bâtiments, si "la méthode est réplicable, les données comparables, chaque cas est particulier car il faut tenir compte des usages du bâtiment".
Conception en mode puzzle
Autre constat : le smart territoire se conçoit encore largement en mode puzzle. En d’autres termes il s'agit avant tout d'applications verticales, gérées par les métiers. L'étude dénombre 25 éditeurs positionnés sur le territoire connecté. Une offre aujourd'hui "segmentée" constate l'étude, certains ne faisant que de la collecte de données via des objets connectés, d'autres proposant un stockage et un traitement des données, la dernière couche concernant la supervision via une interface de visualisation. Et peu de solutions sont multimétiers et offrent un pilotage à 360° (hypervision).
"Les concepts hyperviseur ou de jumeau numérique restent très abstraits pour les collectivités faute de définitions claires", souligne Loïc Haÿ de la FNCCR. Dans ce domaine, 2024 pourrait cependant contribuer à changer la donne. Les projets d'hyperviseurs et de jumeaux numériques sont au cœur de plusieurs projets financés dans le cadre des Démonstrateurs d’IA frugale au service de la transition écologique dans les territoires (DIAT) et des Territoires intelligents et durables (TID) (notre article du 27 novembre 2023). Interrogés sur leurs attentes en matière de fonctionnalités des plateformes, les répondants insistent sur leur ergonomie, les fonctions de visualisation, l'accès à des données temps réel via des API et sur le fait de pouvoir répondre aussi aux besoins des citoyens. Le critère de l'interopérabilité, vecteur de transversalité et de collaboration entre territoires, est également mis en avant. Ce besoin concerne aussi le jumeau numérique national sur lequel planche l'IGN. "Une plateforme qui doit privilégier la représentation des données sans chercher à les stocker", souligne Loïc Haÿ.
Eligibilité des projets au Fonds Vert
En matière de gouvernance des projets, la tendance prédominante est celle de la mutualisation grâce à l'implication des syndicats et départements. Elle bénéficie d'abord aux territoires ruraux. "La smart city n'est plus l'apanage des grandes villes" ont témoigné plusieurs collectivités. En outre, le temps n'est plus aux expérimentations ponctuelles mais à des tests de validation technique dans une perspective de déploiement massif. Dans les points d'amélioration, les collectivités pointent la difficulté à s'y retrouver dans le maquis des subventions, ces dernières contribuant pourtant à créer "une dynamique". Les industriels souhaitent pour leur part disposer de davantage de visibilité sur leur retour sur investissement, le modèle économique du territoire connecté restant à clarifier. L'étude estime que l'éligibilité des projets de territoires connectés au Fonds Vert contribuerait beaucoup à lever ces incertitudes financières.
Mais ce n'est pas le seul levier pour aller vers leur généralisation. Si la mutualisation apparait ainsi comme une clef, elle rime aussi avec communication. "On constate que 20% des répondants ne savent tout simplement pas s'il existe une offre mutualisée sur leur territoire", souligne Julian Calderon, expert en infrastructures numériques à la Banque des Territoires. La mutualisation doit par ailleurs progresser : car si les acteurs locaux veulent travailler ensemble et sont convaincus à 70% que la mutualisation sera effective "à terme", ils butent encore souvent sur des problèmes d'interopérabilité. Encore un point sur lequel les lauréats des appels à projet DIAT-TID sont attendus.
Les bénéfices de la mutualisation L'étude estime que la mutualisation gagne à se faire à une échelle départementale ou régionale, territoires les plus à même d'optimiser les coûts et de planifier les déploiements. Elle met en avant quatre bénéfices à la mutualisation : - L'optimisation des coûts qui détermine aussi la tarification de l'offre et en partie son adoption ; - La sobriété en optimisant les équipements et les logiciels déployés sur un territoire ; - La sécurisation avec une échelle de déploiement qui facilite le recours à des acteurs spécialisés ; - La souveraineté numérique plus facilement prise en compte à grande échelle. |