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Etablissement public de coopération culturelle - Pour le Sénat, le statut d'EPCC est une réussite, mais reste perfectible

Quinze ans après la création des établissements publics de coopération culturelle (EPCC) par la loi, les sénateurs Laurent Lafon (Union Centriste, Val-de-Marne), et Sylvie Robert (Groupe Socialiste, Ille-et-Vilaine) dressent un bilan de fonctionnement très positif de ces institutions, dans un rapport présenté le 16 juillet en commission des affaires culturelles. Ils considèrent que les EPCC sont "des locomotives de la décentralisation de la culture à mieux connaître et soutenir".

Une "ampleur nouvelle" suite à la loi Notre

L'article Ier de la loi du 4 janvier 2002 relative à la création d'EPCC prévoit que "les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent constituer avec l'Etat un établissement public de coopération culturelle chargé de la gestion d'un service public culturel présentant un intérêt pour chacune des personnes morales en cause et contribuant à la réalisation des objectifs nationaux dans le domaine de la culture. Sont toutefois exclus les services qui, par leur nature ou par la loi, ne peuvent être assurés que par la collectivité territoriale elle-même".
Selon le rapport d'information, l'objectif était d'"offrir un instrument juridique moderne et indépendant susceptible de garantir une certaine stabilité et pérennité dans la gestion des services publics culturels locaux". L'autre avantage de l'EPCC est d'être ouvert à tous les types d'activités culturelles : spectacle vivant, festivals, lieux patrimoniaux, musées, centres de ressources, écoles d’art...
Quinze ans plus tard, le bilan apparaît largement positif. Les rapporteurs voient en effet dans les EPCC "un outil arrivé à maturité, plébiscité pour sa souplesse de fonctionnement et sa rigueur de gestion". Mais au-delà de cette réussite, Laurent Lafon, dans sa présentation devant la commission, indique aussi qu'"en examinant cet outil de près, nous nous sommes rendus compte de combien il était susceptible de prendre une ampleur nouvelle à la suite de la réaffirmation de la compétence culturelle partagée par la loi Notre [nouvelle organisation territoriale de la République, ndlr] en 2015".

Un dialogue à trouver avec l'Etat

Mais ces perspectives de développement des EPCC se heurtent à "un manque de données regrettable", avec l'absence de toute observation centralisée de cet outil au niveau de l'Etat. Le rapport rappelle d'ailleurs qu'aucune évaluation n'a été réalisée sur ce dispositif depuis un rapport de l'Inspection générale des affaires culturelles en 2010*.
Les rapporteurs relèvent également que, malgré sa réussite, le dispositif des EPCC rencontre encore un certain nombre de difficultés, "qui procèdent davantage de certaines pratiques que d'un cadre législatif qui serait incomplet". Il s'agit en premier lieu d'un "manque de dialogue" entre l'Etat et les collectivités, notamment sur l'accompagnement des établissements au-delà de leur phase de création. Le rapport se montre très favorable à la présence de l'Etat dans certains EPCC, où il pourrait "garantir un équilibre entre les différents partenaires locaux et favoriser l’articulation entre les politiques nationale et locale".
A l'inverse, le rapport évoque deux craintes contradictoires sur la place des collectivités territoriales : celle d'un "risque d'ingérence" au-delà de la gestion ou, au contraire, celle d'un désengagement des collectivités sous l'effet des contraintes budgétaires. Un risque bien réel, puisque le rapport fait état de la fermeture d'un certain nombre d'EPCC.

Des pistes d'amélioration pour faire face aux incertitudes financières

Le rapport du Sénat propose un certain nombre d'améliorations. Face aux incertitudes sur les financements, par exemple, les rapporteurs évoquent la piste de l'inscription, dans les statuts de l'établissement, du "montant minimal de la contribution annuelle nécessaire à la réalisation du projet de base" (tout en reconnaissant qu'il ne sera pas possible d'imposer un pourcentage de financement des différentes collectivités impliquées, en raison du principe de leur libre administration). En matière de financement, le rapport évoque aussi les difficultés d’accès au fonds de compensation de la TVA pour les EPCC dont l’Etat est partenaire et qui veulent assurer la maîtrise d’ouvrage. La mise en place d'une dérogation permettrait de surmonter cette difficulté.
Autre piste d'amélioration - et sujet récurrent de discussion depuis la création des EPCC - : la clarification du statut du directeur. Les problèmes à régler en ce domaine concernent respectivement la durée du premier mandat (qui peut être comprise entre trois et cinq ans et qui devrait être fixée systématiquement à cinq ans), la procédure de renouvellement du mandat (qui devrait être davantage formalisée dans les règlements intérieurs) et une meilleure articulation des procédures relatives à la nomination et au renouvellement des directeurs d’EPCC avec celles relatives à l’agrément des directeurs des structures labellisées.

Fluidifier la gouvernance

Enfin, les rapporteurs préconisent de "fluidifier" la gouvernance des EPCC, en systématisant les règlements intérieurs et en posant la question de la composition et du rôle du conseil d'administration. Si une composition large des conseils est jugée utile, ainsi que la présence de personnalités qualifiées, les CA "se résument bien souvent à de simples chambres d'enregistrement des décisions" et leur ordre du jour est "souvent trop encombré pour permettre de véritables discussions autour des orientations politiques et culturelles de l’établissement".
A noter : le rapport d'information du Sénat propose aussi un focus sur la question particulière des écoles d'art sous statut d'EPCC. Si ce statut est désormais "apprivoisé" par les écoles d'art, plusieurs questions restent néanmoins à régler, comme celle d'une plus grande adaptation aux spécificités de ces établissements ou celle du statut des enseignants des écoles d'art territoriales, "toujours en suspens".

*Le Sénat semble oublier qu'il a lui-même procédé à un suivi régulier du dispositif à travers l'organisation d'auditions sur le thème (voir nos articles ci-dessous du 5 avril 2011, 27 juillet et 12 décembre 2012).

Références : Sénat, rapport d'information n°679 (2017-2018) fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication sur le bilan de fonctionnement des établissements publics de coopération culturelle (EPCC) quinze ans après leur création par la loi (enregistré à la présidence de l'Assemblée nationale le 18 juillet 2018).

 

 

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