"Ponction" sur les principaux budgets locaux : le détail des contributions, collectivité par collectivité

Intercommunalités de France a révélé, ce 10 octobre, la liste des collectivités qui pourraient être directement prélevées en 2025 sur leurs recettes, afin de participer à la maîtrise des finances publiques. Les montants individuels sont parfois considérables.

Les "ponctions" que l'Etat pourrait prélever en 2025 sur les plus grandes collectivités au travers du "fonds de précaution" de 3 milliards d'euros (voir notre article sur le dispositif) s'étaleraient de 0,8 million d'euros pour les collectivités les moins riches à 154 millions d'euros pour la ville de Paris, a calculé Intercommunalités de France.

Avec un prélèvement fixé à son maximum, à savoir 2% des recettes de fonctionnement des collectivités disposant de plus de 40 millions d'euros de ressources de fonctionnement, les contributions les plus faibles seraient un peu inférieures à 900.000 euros. Mais un tel montant ne concernerait que quatre communes : Béthune, Châtellerault, Herblay-sur-Seine et Le Perreux-sur-Marne. 

Forte contribution des départements les plus urbanisés 

La facture dépasserait 1 million d'euros pour la plupart des collectivités et intercommunalités, selon les estimations d'Intercommunalités de France, qui sont basées sur les données financières des budgets principaux des collectivités de 2023. La ville de Châteauroux devrait renoncer à 1,5 million d'euros, tandis que celle de Valence devrait débourser 1,7 million d'euros. Les montants grimperaient rapidement pour des collectivités plus peuplées et dotées de budgets plus élevés : à Cannes, le maire David Lisnard devrait se passer de 5,1 millions d'euros pour élaborer son budget.

Dans le même département (Alpes-Maritimes), la contribution atteindrait 11 millions d'euros pour Nice. La métropole de Nice-Côte-d'Azur serait "ponctionnée" quant à elle de 9,6 millions d'euros. En comptant les contributions dues par deux autres villes proches de Nice (Cagnes-sur-Mer et Villefranche-sur-Mer), la facture s'élèverait à 23,7 millions d'euros pour le territoire de la métropole de Nice.

Les départements les plus urbanisés comportent de nombreuses villes contributrices au dispositif inscrit dans le projet de loi de finances pour 2025. Pas moins de 26 communes des Hauts-de-Seine et autant en Seine-Saint-Denis participeraient ainsi à l'effort exigé par le gouvernement. Dans le Nord, les contributeurs (communes et intercommunalités) seraient au nombre de 18. Ils seraient 17 à la Réunion.

Exonération pour certains bénéficiaires de la péréquation

Les deux collectivités qui devraient supporter les plus forts prélèvements sont la région Ile-de-France (81 millions d'euros) et la ville de Paris (154 millions).

Sur quelque 600 collectivités ou intercommunalités disposant de plus de 40 millions d'euros de recettes de fonctionnement, 150 seraient exonérées en raison d'une situation de fragilité financière, dont 20 départements. Du côté des communes et intercommunalités, certains des bénéficiaires du fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) pourraient être épargnés, indique Intercommunalités de France, qui dit s'appuyer sur des informations gouvernementales. La liste précise des entités épargnées à ce titre n'est pas encore connue, l'association a donc intégré l'ensemble des bénéficiaires au FPIC (et qui sont dotés de recettes de fonctionnement supérieures à 40 millions d'euros) parmi les contributeurs au "fonds de précaution".

Au total, le dispositif reposerait donc sur un prélèvement de 3 milliards d'euros sur les recettes de 450 collectivités et intercommunalités.

 

› Sébastien Martin : "Un certain nombre de collectivités auront de grandes difficultés"

Le président d'Intercommunalités de France a réagi, lors d'un point presse téléphonique ce 9 octobre, aux annonces gouvernementales sur le "fonds de précaution". Comme les autres présidents d'associations d'élus (voir notre article sur leurs réactions), il s'est inquiété d'une fragilisation dès l'an prochain des capacités d'investissement des collectivités.

"Une ponction directe de 2% de nos recettes réelles de fonctionnement, cela peut paraître anodin. Mais lorsqu'on va regarder collectivité par collectivité, je pense que ça va créer de grandes difficultés à un certain nombre d'entre elles. On fait croire que les grosses collectivités sont riches et que les petites sont pauvres. Ce n'est pas toujours le cas. Je n'aime pas cette manière d'opposer les urbains et les ruraux, les gros et les petits. Est-ce cela, la nouvelle méthode ? Le dispositif implique en tout cas que la marge brute des collectivités pour investir va baisser de 14% en moyenne. Et ce, par une ponction directe sur leurs recettes, tous les mois ! Pour aller alimenter un pseudo-fonds qui pourrait ensuite revenir, mais uniquement l'année d'après, à travers d'autres fonds de péréquation, vers certains territoires – mais pas vers ceux qui auraient participé. Que les choses soient bien claires : ce n'est pas une réserve de précaution. Tout cela à un moment où nous sommes à un pic d'investissement des collectivités (…). Si ici, il s'agit d'une ponction directe, pour l'Etat en revanche, les 20 milliards de baisse affichés ne sont en réalité pas une baisse, mais une moindre augmentation. Ce qui est imposé aux collectivités, c'est du François Hollande douze ans plus tard."