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Fonds structurels - Politique de cohésion : gouvernement et collectivités évitent les sujets qui fâchent

L'investissement des fonds régionaux européens va pouvoir entrer dans une phase opérationnelle. A Montpellier, les élus se sont réjouis des 26 milliards d'euros disponibles pour la France. Même si des interrogations demeurent.

26,7 milliards d'euros. C'est la somme dont bénéficiera la France pour la politique de cohésion entre 2014 et 2020. Elle sera répartie entre les différents fonds : Feder, FSE, Feader et Feamp. Au total l'enveloppe pour l'UE est de 351,8 milliards d'euros (euros courants). Le lancement officiel de la programmation de ces fonds a eu lieu, vendredi 14 novembre, à Montpellier.
Sur le terrain, la traduction se veut concrète. L'argent de l'Union européenne a jusqu'à présent pu compléter le financement du tramway à Valenciennes, la rénovation d'un écoquartier à Reims, l'institut d'optique à Bordeaux... Pour les années à venir, le cap est mis sur le numérique, l'innovation, l'emploi des jeunes ou encore la transition énergétique.

Un rempart à la crise ?

En cette période de crise, la politique de cohésion est perçue, côté français, comme un amortisseur, voire un outil de relance. Elle permet de continuer à financer de grands projets malgré des finances en berne. La ligne LGV Lyon-Turin et le canal Seine-Nord, qui pourraient être cofinancés par l'Union européenne à travers les fonds régionaux, ont ainsi été évoqués. Mais cette politique est aussi, selon ses défenseurs, un outil-clé pour soutenir la grande priorité de la France et de l'UE : l'emploi. Ces fonds vont "créer de l'activité, soutenir l'innovation et créer des milliers d'emplois", assure le secrétaire d'Etat aux Affaires européennes, Harlem Désir.

Des retards de programmation maîtrisés

Leur déploiement est toutefois encadré par l'adoption de "programmes opérationnels" (PO), dans lesquels chaque région arrête ses priorités d'investissements. La Commission européenne a déjà donné son feu vert à plusieurs territoires (Aquitaine, Auvergne, Franche-Comté, Languedoc-Roussillon) qui pourront donc commencer à engager les fonds. Une large majorité des PO devrait être adoptée d'ici la fin de l'année.

Interrogations sur la mise en oeuvre

Un travail est aussi engagé pour quantifier les résultats concrets des fonds européens (voir ci-contre nos articles des 20 mai et 29 juillet 2014). Loin des discours idéalistes, la politique de cohésion continue de patiner sur certains aspects, à l'heure où la France a fait le choix d'une gestion décentralisée des fonds européens (en partie pour le FSE, intégralement pour le Feder et de manière encadrée pour le Feader). Or, les régions dénoncent les réticences des services de l'Etat à assurer le transfert de leurs agents vers les conseils régionaux. Elles se retrouvent donc à gérer l'utilisation des fonds, sans le personnel nécessaire.

Sanctions pour déficit excessif, la menace plane

Dans sa version réformée, la politique de cohésion établit désormais un lien avec l'équilibre budgétaire : les fonds peuvent être suspendus en cas de sévère dérapage des finances publiques. Une nouveauté poussée, dès 2011, par Angela Merkel et Nicolas Sarkozy. Interrogée sur ce dispositif, la Commission européenne s'est voulue rassurante. "Ce n'est pas d'actualité", a estimé la directrice générale de la DG Politique régionale, Lena Andersson Pench.
Le déficit français, évalué aujourd'hui à 4,4%, devrait se creuser légèrement en 2015, mais le scénario des sanctions reste bien lointain. "Il y a d'autres étapes avant d'en arriver là", tempère-t-on à la Commission. L'Allemagne défend pourtant une application orthodoxe du dispositif. Il y a quelques semaines, le ministre des Finances Wolfgang Schäuble a évoqué la possibilité de suspendre les fonds européens, selon le Spiegel, qui a dévoilé la lettre remise au président de la Commission, Jean-Claude Juncker.