Fonds européens - Comment rendre les fonds structurels plus keynésiens ?
Souvent assimilés à un ressort ultime d’investissement dans les pays en crise, les fonds régionaux échouent à fonctionner comme un outil de relance.
La rigidité des règles européennes l’explique en partie : alors que les finances publiques des Etats sont sous pression, l’obligation d’un cofinancement local ou national est maintenue. Résultat, "moins de fonds européens ont été utilisés au moment où ils étaient le plus nécessaires", constatent les auteurs du groupe Euro2030, constitué de conseillers politiques et de jeunes professionnels du secteur public et privé à Bruxelles, à l’origine d’une cinquantaine de propositions.
En Italie, le premier ministre Matteo Renzi cherche, sans succès pour le moment, à déduire du calcul du déficit public les cofinancements nationaux adossés aux fonds européens.
En Grèce, au Portugal ou encore en Roumanie, la situation a été en partie corrigée en décembre 2011 grâce au rehaussement de la participation européenne : de manière temporaire, l’UE a accepté de prendre en charge 95% du coût d’un projet.
Contrepied aux règles d’Angela Merkel et Nicolas Sarkozy
Mais ce n’est pas le seul objet de litige. Les pays d’Europe du Sud gravement touchés par la crise subissent paradoxalement une baisse de leur dotation en fonds structurels : - 6,5 milliards d’euros de fonds régionaux en Grèce, - 11 milliards en Espagne, - 2,5 milliards au Portugal.
La Pologne engrange elle une somme colossale - 77 milliards sur 2014-2020, en euros courants, soit 20% de son PIB -, alors que ce pays affiche une croissance d’1,6% en 2013 et s’illustre comme le seul pays de l’Europe à avoir échappé à la récession depuis 2009.
Cette répartition des subventions, résultat de l’application assez automatique de critères techniques, limite l’utilité des fonds régionaux européens pour contrer un retournement de conjoncture.
Il est pourtant possible de conférer un "rôle contracyclique" aux fonds structurels, suggère le collectif Euro2030. D’une certaine manière, la proposition prend le contrepied des règles esquissées par Angela Merkel et Nicolas Sarkozy. Il y a trois ans, les deux dirigeants ont imposé une autre logique : en cas de déficit public trop élevé, la suspension des fonds régionaux peut être enclenchée.
Des garanties et non des subventions
Dans leur document, les auteurs d’Euro2030 promeuvent un scénario plus sophistiqué. Plutôt que de dépenser les fonds structurels au fil de l’eau, en tant que subventions, une sorte de système d’épargne serait mis en place : chaque année, une partie des fonds structurels serait mise de côté, afin de constituer un matelas.
Ils pourraient ensuite être mobilisés en tant que garanties, afin d’augmenter la capacité de prêts de la Banque européenne d’investissement. En contrepartie, celle-ci pourrait être amenée à exercer un contrôle accru dans la sélection des projets choisis.
Le groupe Euro2030 revient également sur les grands équilibres du budget européen et son mode de négociation, qui donne lieu à des "situations absurdes".
L’expérience du nouveau budget européen pour 2014-2020 le prouve : la plupart des Etats adhèrent à l’idée d’investir davantage dans l’innovation, mais toute "augmentation significative" dans ce domaine a été bloquée par le risque de veto en cas de réduction des crédits de la PAC ou de la politique de cohésion.
Les auteurs prônent de séparer les discussions budgétaires, afin que le plafond des dépenses historiques ne soit pas corrélé au plafond des dépenses dans d’autres domaines, comme la R&D, par exemple.