Poids lourds et bus : la Commission européenne propose de nouveaux standards d’émissions de CO2
La Commission européenne a publié ce 14 février une proposition de règlement sur les normes d’émissions de CO2 des bus et des poids lourds. Selon ce texte, les premiers devraient atteindre le zéro carbone dès 2030, soit cinq ans avant les véhicules particuliers. En raison d’une moindre maturité technologique, les seconds devront avoir réduit leurs émissions de CO2 de 90% en 2040. Le même jour, le Parlement a approuvé les nouveaux objectifs de réduction des émissions de CO2 pour les voitures et les camionnettes neuves dans le cadre du paquet législatif "Fit for 55".
Dans le cadre de son Pacte vert et des objectifs de son plan RePowerEU, la Commission européenne a publié ce 14 février une proposition de règlement sur les normes d’émissions de CO2 des bus et des poids lourds. Alors que le règlement européen fixant à 2035 l’atteinte du "zéro émission" pour l’ensemble des véhicules particuliers neufs vient d'achever son parcours législatif (lire notre encadré), ce nouveau texte vise à la fois à faire participer ce secteur à l’atteinte de l’objectif de neutralité climatique adopté par l’Union européenne - il est à l’origine de plus de 6% des émissions totales de gaz à effet de serre de l’UE et de plus de 25% de celles du transport routier - et à l’amélioration de la qualité de l’air dans les villes.
Trois échéances pour les poids lourds...et quelques exceptions
La proposition de règlement de la Commission vise à introduire progressivement des normes d’émissions de CO2 plus strictes pour presque tous les véhicules utilitaires lourds neufs avec des émissions de CO2 certifiées, par rapport aux niveaux de 2019, et plus précisément :
- 45% de réduction des émissions à compter de 2030 ;
- 65% de réduction des émissions à compter de 2035 ;
- 90% de réduction des émissions à compter de 2040.
La proposition de règlement prévoit des exemptions pour certains types de poids lourds : les véhicules de petits constructeurs ; ceux utilisés dans les secteurs minier, agricole et sylvicole ; ceux conçus et construits pour être utilisés par les forces armées et les véhicules à chenilles ; les véhicules conçus et construits ou adaptés pour être utilisés par la protection civile, les services de pompiers et les services responsables du maintien de l’ordre public ou des soins médicaux urgents ; et les véhicules professionnels tels que les camions à ordures.
Zéro émission pour les bus urbains neufs en 2030
Quant aux bus urbains neufs, ils devront avoir des émissions nulles à compter de 2030. "Les autobus électriques représentent déjà une proportion considérable de la nouvelle flotte dans plusieurs États membres, a justifié la Commission. Les autorités publiques locales de l'UE achètent des volumes importants de ces bus. Les autobus urbains se prêtent particulièrement bien à un passage plus rapide à la mobilité sans émissions en raison de leur mode d'utilisation : ils peuvent se recharger complètement pendant la nuit et se déplacer sur des itinéraires courts bien définis et prévisibles." En France, selon les derniers chiffres diffusés par l'Union des transports publics et ferroviaires (UTP), le verdissement de la flotte s'est accéléré récemment. Au 1er janvier 2022, sur 18.836 véhicules, la part des véhicules à énergie alternative était de 40% (+10 points en deux ans). L'énergie alternative la plus utilisée reste le gaz naturel avec 22% du parc mais le nombre de bus électriques et à hydrogène a été multiplié par 4 entre 2020 et 2022.
Infrastructures de recharge : un autre texte déjà en phase de trilogue
Trois technologies pourraient donc s’imposer dans les prochaines années : l’électrification, les piles à hydrogène et l’hydrogène. Le volet relatif aux infrastructures de recharge nécessaire au déploiement des véhicules zéro émission est traité dans un autre texte, le règlement sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs, présenté en juillet 2021 dans le cadre du paquet "Fit for 55" et aujourd'hui en phase de trilogue. Mais la difficulté sera moindre que pour les véhicules particuliers, car le besoin de bornes de recharge sera limité aux aires d’autoroute et aux zones logistiques où s’effectuent les chargements et les déchargements. La Commission a ainsi proposé d'installer des points de recharge et de ravitaillement sur les grands axes routiers tous les 60 kilomètres pour la recharge électrique et tous les 150 kilomètres pour la recharge à l'hydrogène.
La nouvelle proposition de règlement sur les émissions de véhicules lourds doit désormais être examinée en parallèle par le Conseil de l’UE (instance qui représente les États membres) et le Parlement européen. L’adoption de leur position respective permettra d’enclencher la phase de trilogue au cours de laquelle les deux institutions et la Commission tenteront de trouver un texte de compromis.
Le Parlement européen a adopté, mardi 14 février, l’accord interinstitutionnel qui mettra fin à la vente des véhicules neufs à moteur thermique (essence, diesel ou hybride) en 2035, par 340 voix pour, 279 contre et 21 abstentions. Le nouveau règlement est issu du paquet "Fit For 55" présenté en juillet 2021, qui a pour but d’atteindre "de façon rentable" l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de l’UE d’au moins 55% d’ici à 2030 par rapport à 1990, en vue d'arriver à la "neutralité climatique" en 2050. Il vise ainsi à réduire de 100% les émissions de CO2 produites par les voitures et les véhicules utilitaires neufs au 1er janvier 2035 par rapport à 2021. Des objectifs intermédiaires sont fixés pour 2030 (55% de réduction pour les voitures et 50% pour les camionnettes). Il s’agit d’envoyer "un signal fort", souligne le texte. Lors de leur examen, les Parlementaires ont tenu compte des demandes du Comité des régions pour évaluer l’impact territorial de ces mesures. "Il convient d'accorder une attention particulière à l'incidence qu'aura cette transition sur les micro, petites et moyennes entreprises (PME) tout au long de la chaîne d'approvisionnement automobile ainsi que sur les régions et communautés touchées qui pourraient être plus vulnérables en raison de la présence d'une industrie automobile intensive", est-il désormais inscrit. Au plus tard le 31 décembre 2025, la Commission devra présenter un rapport recensant "les déficits de financement pour assurer une transition juste dans la chaîne d'approvisionnement automobile". Le texte mentionne à cet égard explicitement le rôle de conseil que l’Alliance des régions de production de véhicules automobiles, émanation du Comité des régions, sera amenée à jouer. L’alliance aidera la Commission européenne à "identifier les mesures financières adéquates pour répondre aux besoins des PME et des régions les plus touchées par la transition", se félicite le Comité des régions, dans un communiqué. Cinq régions françaises (Bretagne, Grand-Est, Bourgogne-Franche-Comté, Centre-Val de Loire et Auvergne-Rhône-Alpes) font partie de l’alliance dont le rôle est de "veiller à ce que la transition dans le secteur automobile soit équitable et réussie". "Les régions où l’industrie automobile est importante, comme la Bourgogne-Franche-Comté, auront besoin de l’aide de l’UE pour mettre en œuvre les nouveaux standards d'émission de CO2 et parvenir à une transition juste et équitable, qui ne laisse personne de côté", souligne Patrick Molinoz, vice-président de la région Bourgogne-Franche-Comté en charge des affaires européennes et internationales, cité dans le communiqué. |