PLF 2025 : les Maisons de l’emploi de nouveau écartées du projet de budget initial
Le projet de loi de finances 2025 ne prévoit pas de ligne budgétaire spécifique en faveur des Maisons de l’emploi, contrairement à l’an dernier. Leur tête de réseau, Alliance Villes Emploi, va devoir relancer la bataille par amendements pour défendre les moyens de ces structures contribuant au développement de l’emploi et à l’insertion des personnes écartées du marché du travail.
Les Maisons de l’emploi vont devoir reprendre la bataille parlementaire pour obtenir leurs crédits. Alors que l’an dernier, elles avaient enfin obtenu du ministère du Travail de voir leur budget inscrit dans la loi de finances dès le dépôt du texte (lire notre article), elles ne figurent plus dans le détail du programme 102 ("Accès et retour à l’emploi").
Le sujet s’est invité à la matinée organisée au Sénat par Alliance Villes Emploi ce lundi 21 octobre, consacrée aux achats socialement responsables. Les Maisons de l’emploi emploient en effet quelque 30% des 600 "facilitateurs" dont la mission est de favoriser la rédaction de clauses d’insertion dans les marchés publics et ainsi favoriser le retour à l’emploi de personnes écartées du marché du travail qui en bénéficient.
"Il ne faut pas qu’on oublie les Maisons de l’emploi et le réseau", a déclaré Nathalie Delattre, présidente d’honneur d’Alliance Villes Emploi et désormais ministre chargée des relations avec le Parlement. L’ex-sénatrice promet de peser auprès de la ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet. "Tous les acteurs, dont Thibaut Guilluy [le directeur de France Travail présent lors de la matinée, ndlr] sont déjà montés au créneau pour nous aider dans ce match à gagner, ce combat que l’on pensait acquis. On va le jouer, et je ferai tout pour qu’on puisse le remporter", a-t-elle promis.
Des postes de facilitateurs à financer
Le document budgétaire ne fait pas non plus mention des financements visant les facilitateurs et coordinateurs des clauses sociales, contrairement au budget 2024, où 5,7 millions d’euros en autorisation d’engagement et en crédits de paiement étaient inscrits en faveur des 158 équivalents temps plein créés en 2022 et 2023. Ce sont pourtant ces fonctions qui ont pu contribuer à la progression des heures d’insertion réalisées dans le cadre des marchés publics.
Pour preuve : entre 2020 et 2023, la part des clauses sociales dans les marchés de l’État est passée de 8 à 25% ! Le rôle des facilitateurs est "important", a confirmé François Adam, directeur des achats de l’État (DAE), lors de la matinée. "Nous savons qu’il y a des enjeux budgétaires non encore réglés sur ce sujet, dans un contexte que vous savez très délicat. Avec le CGDD et la DGEFP, on s’efforcera de régler ces difficultés au mieux, sans prendre aucun engagement à ce stade", a-t-il déclaré.
25% de "considérations sociales" dans les marchés de l’État
En 2023, 25% des marchés notifiés par l’État comportaient une "considération sociale", prenant dans 80% des cas la forme de clauses d’insertion dans l’emploi, qui ont représenté 5,2 millions d’heures de travail. Soit environ un cinquième des heures d’insertion comptabilisées par Alliance Villes Emploi en 2023, tous donneurs d’ordre publics accompagnés.
Selon Yohan David, président d’Alliance Villes Emploi, il s’agit déjà d’"une énorme victoire qui atteste de l’intérêt et de la réussite du plan national des achats durables (PNAD) et de son organisation territoriale". Lancé en 2022, le plan national des achats durables (lire notre article du 18 mars 2022) vise néanmoins 30% de contrats notifiés avec au moins une considération sociale d’ici à 2025.
Des facilitateurs très prisés
D’où l’importance, pour espérer atteindre cet objectif, de mettre un maximum d’huile dans les rouages. "On a vraiment besoin que les dispositifs d’accompagnement soient encore augmentés. Il faut continuer à étoffer ce réseau de facilitateurs. On en a besoin pour trouver des personnes [des candidats] et pour que les facilitateurs soient les garants de leur éligibilité. On ne peut pas être juge et partie", a témoigné Philippe Etur, directeur général adjoint de Valorem, pionnier de l’éolien et opérateur français et indépendant en énergies vertes.
L’accompagnement par Laval Agglo a également transformé la clause d’insertion en expérience positive pour l’entreprise familiale Gruau, un carrossier ayant remporté deux marchés initiés par l’Union des groupements d’achat public (Ugap) pour le compte du ministère de l’Intérieur afin de livrer des fourgons aux gendarmes mobiles. "Ces marchés comportaient une clause d’insertion d’une vingtaine d’heures par véhicule, soit 11.000 heures. Je ne cache pas qu’au début, on a regardé cette clause comme une poule qui a trouvé un couteau", a reconnu Jean Margerie, directeur du développement et des grands projets.
"Aujourd’hui, aucune entreprise du digital n’est capable de manière autonome [...] d’œuvrer pour mener des actions de retour à l’emploi", a abondé Laurent Benazera, directeur recrutement du groupe Open, une entreprise de services numériques française passée de 20.000 à 50.000 heures d’insertion par an entre 2018 et 2024. Les facilitateurs "ont les relais, les connexions, les partenaires, les fournisseurs de formation, de mise en œuvre de POEI [préparation opérationnelle à l'emploi individuelle]", souligne-t-il.