Plan d’investissement dans les compétences : les pistes du comité scientifique pour former plus de publics peu qualifiés
Le quatrième rapport d’évaluation du plan d’investissement dans les compétences signale une légère diminution des entrées en formation. Et insiste sur la nécessité d’améliorer les conditions d’accès à la formation des publics les plus fragiles.
Après avoir atteint un pic en 2021, la formation des demandeurs d’emploi reflue légèrement. En 2022, 1,6 million d’entrées en formation ont été enregistrées, contre 1,65 million en 2021, d’après le quatrième rapport d’évaluation du plan d’investissement dans les compétences rendu public mardi 19 décembre. 850.000 personnes ont bénéficié des programmes régionaux financés par les régions ou Pôle emploi et 180.000 ont suivi l’un des programmes nationaux. S’ajoutent les 570.000 entrées via le CPF dit autonome. La baisse du chômage, plus favorable à la reprise d’un emploi, explique en partie la diminution des entrées en formation. S’y ajoute la plus forte régulation du compte personnel de formation.
Hausse des formations d’adaptation au poste
Entre 2017 et 2022, la moitié des régions de France métropolitaine a connu une hausse des entrées en formation. Les plus fortes progressions se trouvent du côté des Hauts-de-France (+33%), de l’Ile-de-France (+29%), la région Sud (+17%) et la Bretagne (+17%). En 2022, les régions ont financé 441.700 entrées en stage de la formation professionnelle, dont 17% via des délégations à Pôle emploi, contre 363.300 en 2017, soit +22%.
Dans son rapport, le Conseil scientifique souligne l’augmentation de la part des formations d’adaptation au poste (AFPR, POEI) orientées vers les besoins en recrutement des entreprises et le perfectionnement, dont le nombre a progressé de 20% sur 5 ans. Les formations "préparatoires" qui visent à travailler un projet professionnel ou les compétences socle, ont aussi augmenté mais représentent, comme en 2017, 19% des entrées. La part des formations certifiantes est également plus élevée en 2022.
Près de la moitié des entrées en formation cible des métiers en tension ou des secteurs prioritaires, révèle le rapport. Cependant, leur part a diminué, passant de 48% en 2019 à 45% en 2021. Une évolution plutôt positive aux yeux du comité scientifique qui remarque que la plus grande partie de ces formations visent des métiers en tension faute d’une faible attractivité et non d’un manque de compétences sur le marché du travail.
Les formations certifiantes peu accessibles aux peu diplômés
"Le taux d’accès des peu diplômés à la formation a augmenté malgré un ciblage de la formation qui n’a pas été très activement orienté vers eux", remarque le comité d’évaluation. Ils représentent toujours en 2022, comme en 2018, 52% des entrées en formation hors CPF autonome. Surtout, 3,9% des demandeurs d’emploi peu diplômés accèdent à un emploi après avoir effectué une formation certifiante dans les 12 mois suivant leur inscription en 2021, contre 5,3% des bacheliers et 4,1% des diplômés du supérieur. "Les publics les plus fragiles bénéficient fortement des programmes pré-qualifiants, mais souvent sans déboucher sur des actions qualifiantes", peut-on lire dans le rapport.
Pour expliquer cette limite, le comité d’évaluation pointe l’absence de cibles quantitatives en termes d’entrées en formation des publics fragiles. "L’objectif du ciblage explicite des personnes éloignées de l’emploi semble peu compris par les organismes de formation", ajoute-t-il. Par ailleurs, "les commanditaires disposent de peu d’outils pour mesurer, objectiver et analyser le processus d’entrée par type de publics jusqu’à son terme". Faute d’incitations financières particulières, ils peinent à infléchir les processus de sélection à l’entrée pratiqués par les organismes de formation, préoccupés par exemple par la limitation des abandons. Enfin, "les pratiques d’orientation des prescripteurs ont peu évolué et aller chercher un public non connu des services institutionnels, les invisibles, s’est révélé compliqué".
Mieux rémunérer la formation
Conscientes de ces problématiques, certaines régions ont agi sur le maillage territorial de l’offre afin de réduire la proportion de stagiaires résidant loin de leur lieu de formation. Et pour cause, "les demandeurs d’emploi ayant au moins 5 centres de formation à moins de 30 minutes de leur domicile ont 10% plus de chances d’entrer en formation que ceux pour lesquels l’offre de formation locale est plus réduite".
Afin de favoriser l’entrée en formation, certaines régions ont décidé dès 2019 d’utiliser une partie des fonds des Pactes régionaux pour proposer des aides financières ou même augmenter les rémunérations des stagiaires. Le comité scientifique, qui a étudié l’effet de ces incitations en Normandie et Bourgogne-Franche-Comté, suggère une augmentation supplémentaire de 29% du nombre d’entrées, notamment sur les formations préparatoires et certifiantes. Une piste à creuser davantage afin de lever un peu plus les freins à l’entrée dans les parcours.