Pass culture : des évolutions pour faire une place aux collectivités
Lors d'un débat sur l'avenir du Pass culture, Rachida Dati, ministre de la Culture, a précisé comment elle envisagerait la coordination du dispositif avec l'action des collectivités territoriales. Elle les a notamment appelées à s'investir dans la mobilité des jeunes ruraux. Le tout sur fond d'annonce du gel des crédits de la part collective jusqu'en juin...
A la veille de la commission mixte paritaire devant se prononcer sur le projet de loi de finances (PLF) pour 2025 et alors que les moyens dont disposera cette année le Pass culture demeurent incertains, un débat sur l'avenir de ce dispositif, organisé au Sénat le 30 janvier, a permis de revenir sur le rôle des collectivités territoriales en la matière.
La question de la mobilité du jeune public en zone rurale a été la première débattue. Après que Rachida Dati a fait remarquer qu'en l'état, "le Pass culture n'est pas assez démocratique [et] peut même renforcer la reproduction sociale", la sénatrice de la Gironde, Monique de Marco, a estimé qu'"il ne réduit pas non plus les inégalités territoriales". La ministre a alors assuré que pour elle, la mobilité en milieu rural constitue bien un "point crucial". C'est là qu'entrent en jeu les collectivités. "Dans le Grand Est, nous avons expérimenté la convention Caravelle : les collectivités territoriales financent les coûts de mobilité", a précisé Rachida Dati, avant d'ajouter qu'elle signera prochainement avec François Sauvadet, président de Départements de France, une convention "pour éviter tout désengagement [des départements] et encourager encore plus la mobilité, afin de renforcer l'accès à la culture".
Ne pas réduire la dotation culturelle
Si la ministre de la Culture en a appelé aux collectivités pour prendre en charge la mobilité des jeunes dans l'accès à la culture, c'est parce qu'elle a estimé qu'"intégrer les frais de mobilité dans le Pass culture, c'est réduire d'autant la dotation culturelle". De plus, les enseignants mettraient "moins de temps à trouver l'activité culturelle que le moyen de transport". "La mobilité, c'est ce sur quoi nous devons travailler", a-t-elle répété. Tandis que des conventions avec les collectivités ont déjà été signées, avec la Charente-Maritime par exemple, Rachida Dati a révélé que des expérimentations avec certaines régions autour de nouvelles formes de mobilité, comme le covoiturage, étaient en cours. Par ailleurs, des contrats de territoire sur mesure, avec les moyens nécessaires, sont rédigés. La ministre a encore précisé que la "géolocalisation" aidera à identifier là où il faut encore renforcer cette mobilité et que ces axes du Pass culture pourront être financés dans le cadre du plan France ruralités.
Au-delà de la mobilité, et pour éviter des doublons avec des dispositifs culturels déjà pris en charge par des collectivités, Rachida Dati compte également s'appuyer sur les contrats de territoire passés entre le ministère et les départements via les Drac (directions régionales des affaires culturelles). Dans cette même logique, la convention prochainement signée avec Départements de France favorisera "l'équilibre, sans gaspillage".
Gel des crédits jusqu'en juin
Lors de ce débat très dense autour du Pass culture, Rachida Dati a encore confirmé que la société gestionnaire du dispositif, très critiquée pour ses frais, allait devenir un opérateur public avant la fin de l'année. Elle a aussi informé les sénateurs que les manifestations culturelles éligibles au pass allaient évoluer. Des critiques avaient en effet été émises à propos des 16 millions d'euros dépensés par des jeunes pour financer des escape games tandis que le spectacle historique du Puy du Fou était inéligible, au grand dam de certains sénateurs. Tout cela devrait changer, a annoncé la ministre.
Mais pendant que les sénateurs débattaient avec Rachida Dati, le ministère de l'Éducation nationale annonçait aux établissements scolaires du second degré un gel de la part collective du Pass culture, qui finance les activités et sorties culturelles des élèves de la 6e à la terminale. Interrogé par Localtis, le ministère confirme que "pour permettre aux actions culturelles de se tenir jusqu'à la fin de l'année scolaire, tout en disposant de crédits suffisants pour qu'elles reprennent à la rentrée scolaire de septembre 2025, 50 millions d'euros sont dédiés à la période janvier-juin 2025", sur les 72 millions prévus dans le PLF.
Problème : une très grande partie de ces crédits ne seraient déjà plus disponibles. Joint par Localtis, Olivier Beaufrère, secrétaire national du SNPDEN-Unsa explique : "Nous avons été alertés hier matin [30 janvier] de ce gel, sans qu'il y ait eu de concertation, et le ministère nous a annoncé que sur les 50 millions d'euros, 40 millions avaient déjà été engagés. Quant à l'application Adage, qui permet de saisir les demandes de subventions pour les actions culturelles programmées dans le cadre de la part collective du Pass culture, elle a été, selon les académies, soit bloquée, soit fermée." De son côté, la CGT de l'éducation va jusqu'à affirmer que "les actions qui ne seront pas validées ce 31 janvier ne pourront plus être financées sur la part collective".