Parentalité : des mesures et une commission scientifique pour "un choc d’autorité"
Suite aux émeutes de cet été, Aurore Bergé annonce de nouvelles possibilités de sanction, dont des travaux d’intérêt général pour des "parents défaillants". Une commission scientifique se penchera de façon plus globale sur le soutien à apporter aux parents en difficulté, en particulier aux parents d’adolescents.
"81% des Français pensent que les parents ont moins d’autorité qu’avant", selon un sondage publié le 10 décembre 2023 par La Tribune. Le même jour dans ce journal, la ministre des Solidarités et des Familles Aurore Bergé a annoncé des mesures destinées à susciter un "choc d’autorité", dans la continuité du plan "post-émeutes" présenté en octobre par la Première ministre. L’objectif : diversifier la gamme de sanctions pour responsabiliser davantage les parents (voir notre article).
"Les pères ne peuvent pas se résumer à une pension alimentaire !"
"On a vu parfois dans les émeutes des parents qui étaient absents, des parents qui encourageaient leurs enfants à commettre des actes qui sont illégaux et, ce choc d’autorité, cela veut dire de nouvelles règles du jeu qu’on doit mettre en place avec les parents", a justifié Aurore Bergé au micro de France Télévision. Trois nouveaux dispositifs sont mis en avant : des travaux d’intérêt général (TIG) pour les parents qualifiés de "défaillants", le paiement d’une contribution auprès d’une association de victimes en cas de dégradation commise par l’enfant et une amende pour les parents ne se présentant pas à une audience concernant leur enfant.
Derrière la notion de défaillance, c’est l’absence de certains pères qui semble en particulier visée. "Les pères ne peuvent pas se résumer à une pension alimentaire !", insiste Aurore Bergé dans La Tribune. Pour la ministre des Familles, "la société a fini par s'accommoder du fait que les femmes assument seules certaines missions auprès des enfants. Un couple peut se séparer mais la famille vit toujours : on ne quitte pas ses enfants."
"Des parents se retrouvent un peu criminalisés alors même qu’ils sont d’abord en difficulté, qu’ils ont besoin d’être aidés", réagit Brice Castel, du syndicat national unitaire des assistants sociaux de la fonction publique, auprès de France Info. Ces idées sont "indignes" et "stigmatisantes", estime de son côté Manuel Bompard, coordinateur de La France insoumise. Le député rappelle sur France 2 que des mesures d’assistance éducative existent et que leur mise en œuvre souffre actuellement d’un manque de moyens.
"Dès 2024 et jusqu’en 2027, j’augmente de 30% les moyens de toutes les CAF pour le soutien aux parents", répond la ministre des Familles, concernant l’accompagnement. Sur la prévention et l’assistance éducative, le secteur de la protection de l’enfance est par ailleurs en attente de la "mobilisation État-départements" annoncée pour début 2024 et des décisions qui en découleront.
"C'est toute la collectivité qui doit se remettre en question pour élever ses enfants"
Un "tour de France" de la parentalité a également été lancé, le 11 décembre, à Trélazé (Maine-et-Loire), Aurore Bergé se rendant "à la rencontre des parents, des adolescents, des élus, des professionnels de terrain qui agissent au quotidien avec les familles". Sur le modèle de la commission des "1.000 premiers jours de l’enfant" qui avait remis son rapport en 2020, une commission scientifique devra rendre en juin prochain des propositions sur le soutien aux parents et le rétablissement de l’autorité.
"Notre angle, c'est la prévention", a expliqué à France Info Hélène Roques, fondatrice de Notre Avenir à tous, qui co-présidera cette commission aux côtés du psychiatre Serge Hefez. Selon elle, "on a trop stigmatisé les parents parce qu'en réalité, c'est toute la collectivité qui doit se remettre en question pour élever ses enfants. C'est le principe d'ailleurs des cités éducatives. Ce ne sont pas que les parents qui sont en face de cette crise d'autorité." Exprimant d’emblée sa réserve sur l’idée des TIG pour les "parents défaillants", Hélène Roques a évoqué le profond mal-être des 11-15 ans, les difficultés liées aux écrans ou encore la nécessité d’avoir dans les villes des "lieux de médiation" sécurisés, en dehors de la maison et de l’école, pour aider les jeunes à se construire.