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Mesures d’urgences économiques : le gouvernement présente son arsenal législatif

Le gouvernement a présenté, mercredi, en conseil des ministres, les deux textes qui permettront la mise en oeuvre du plan d'urgence économique présenté la veille par Bruno Le Maire.

C’est par deux projets de loi présentés en conseil des ministres, ce mercredi 18 mars, que le gouvernement entend prendre les mesures d’urgences économiques liées à la crise épidémique de coronavirus : le projet de loi de finances rectificative (PLFR) et le projet de loi "d’urgence" qui l’habilite à légiférer par voie d’ordonnances dans toutes sortes de domaines, dont la trésorerie des entreprises. Ce texte vise ainsi - à côté de mesures sanitaires ou électorales - à "limiter les cessations d'activités d'entreprises quel qu'en soit le statut et les licenciements".

Impact économique de la crise

Le PLFR évalue tout d’abord le choc économique de l’épidémie qui "conduirait à une évolution du PIB d’environ – 1% en 2020". Il prévoit un recul de la consommation de 2% imputable à l’impact de la crise sur l’hébergement, la restauration, les loisirs et la culture, les transports... L’inflation diminuerait à +0,6% en 2020, après +1,1% en 2019 "principalement sous l’effet de la baisse prononcée des prix du pétrole, en raison des craintes sur la demande chinoise, affectée par la crise sanitaire liée au coronavirus, et plus largement de la dégradation des perspectives de croissance mondiale et du désaccord entre la Russie et l’Opep pour limiter la production".

Le PLFR prévoit ensuite le financement des deux mesures phares annoncées par l’exécutif : les 300 milliards de garantie bancaire de l’Etat évoquée par le président de la République lundi (qui a rendu obsolètes les initiatives que les régions avaient commencé à prendre dans ce domaine, voir notre article ci-dessous) et le plan de 45 milliards d’euros présenté par Bruno Le Maire le lendemain.

Garantie bancaire et fonds de solidarité

La garantie de l’Etat peut être accordée aux banques à "compter du 16 mars 2020 et jusqu’au 31 décembre 2020 inclus, à des entreprises non financières immatriculées en France". Les prêts ainsi couverts répondront à un cahier des charges précis défini par un arrêté du ministre de l’Economie. Ces prêts doivent prévoir un délai d’amortissement supplémentaire de douze mois minimum et donner à l’emprunteur la possibilité de les rembourser sur une période de cinq ans supplémentaires. C’est Bpifrance qui est chargé de suivre les encours ainsi garantis pour le compte de l’Etat.

Le PLFR prévoit ensuite le financement du plan de Bruno Le Maire qui repose sur des annulations et des reports de charges, le renforcement du chômage partiel et la création d’un fonds de solidarité. Les modalités de mise en œuvre – très attendues par les régions qui sont notamment appelées à cofinancer le fonds de solidarité – seront précisées par ordonnances. En effet le projet de loi d’urgence présenté le même jour en conseil des ministres autorise le gouvernement à prendre par ordonnances dans un délai de trois mois toute mesure provisoire "de soutien à la trésorerie de ces entreprises" et "d’aide directe ou indirecte au profit des entreprises dont la viabilité est mise en cause, notamment par la mise en place d’un fonds dont le financement sera partagé avec les collectivités territoriales". Le PLFR, lui, indique que le fonds sera doté de 750 millions d’euros, les régions s’étant engagées hier à apporter 250 millions d’euros, soit un montant total d’un milliard d’euros (le gouvernement parlait hier tantôt d’un milliard, tantôt de deux). Il s’agit de soutenir les "très petites entreprises indépendantes appartenant aux secteurs qui sont particulièrement touchés, tels les secteurs du tourisme, de la restauration, de l’hôtellerie et de l’organisation d’événements qui font face à une baisse très importante de leur activité", précise le texte. Ou celles dont l’activité "non indispensable" a dû cesser en raison des mesures de fermetures :  salles d'auditions, de conférences, de réunions, de spectacles ou à usage multiple, centres commerciaux, restaurants et débits de boissons, salles de danse et salles de jeux, salles d'expositions, établissements sportifs couverts et musées.

Indemnisation du chômage partiel

Le gouvernement a renoncé à l’interdiction administrative des licenciements, contrairement à ce que certaines déclarations de la ministre du Travail avaient pu laisser entendre. Son objectif est d’encourager le recours au chômage partiel en le rendant plus attractif. Le PLFR prévoit une enveloppe de 5,5 milliards d’euros (sur un besoin estimé à 8,5 milliards, le solde étant à la charge de l’Unédic) à cet effet. L’Etat va ainsi prendre en charge le chômage partiel des salariés à hauteur de 70% du salaire brut jusqu’à 4,5 Smic (contre 1 smic actuellement). "Ce nouveau dispositif de chômage partiel concerne également les assistants maternels et les employés à domicile", est-il précisé. Le dispositif "réduit significativement le reste à charge pour les entreprises et permet ainsi aux entreprises de limiter les licenciements en cas de difficulté économique". Il sera applicable de manière rétroactive pour toutes les heures chômées à compter du 1er mars 2020. Un décret en précise les modalités.

Le projet de loi d’urgence permettra aussi de "reporter ou d’étaler le paiement des loyers, des factures de fluide et d’énergie afférents aux locaux professionnels". A cet égard, cinq grandes fédérations du commerce ont demandé mercredi "l’annulation des loyers et des charges locatives dus pendant la période de fermeture des commerces quelles que soient leurs tailles".

Forte dégradation des comptes publics

Le contexte de dégradation économique va lourdement peser sur les comptes publics. Le gouvernement s’attend à une baisse de 10,7 milliards d'euros des recettes fiscales nettes par rapport à la loi de finances initiale, notamment du fait de l’impact de la baisse d’activité sur le produit de l’impôt sur les sociétés. Les dépenses nouvelles liées aux mesures d’urgence se montent à 6,3 milliards d’euros. Le déficit public recalculé devrait passer de 93,1 à 108,5 milliards d’euros pour l’année 2020, dépassant très largement la barre des 3% du PIB. La dette publique dépassera les 100% du PIB, a déjà prévenu le gouvernement.