Maternités : rompre avec "un lent pourrissement" par une "transformation globale de l’offre"

"Renouer avec des standards de qualité de haut niveau, en conjuguant accessibilité des soins et sécurisation accrue des structures" : c’est ce que préconisent les sénatrices Annick Jacquemet et Véronique Guillotin, à l’issue d’une mission d’information sur l’avenir de la santé périnatale et son organisation territoriale.

Après un rapport alarmant de la Cour des comptes publié en mai dernier (voir notre article), une mission d’information du Sénat a appelé, le 11 septembre 2024, à "apporter une réponse organisée et assumée à la fragilité actuelle de l’offre de soins périnatals".  

Depuis dix ans, certains indicateurs de santé publique se dégradent, à tel point que la France est désormais aux 21e et 22e rangs européens en matière de mortinatalité spontanée (bébé naissant sans vie au-delà̀ de six mois de grossesse) et de mortalité infantile (décès d’enfants de moins d’un an). Le taux de mortalité infantile s’élevait en moyenne à 3,5‰ sur la période 2020-2022 en France hexagonale, avec des écarts importants entre départements. Mais ce taux est bien plus élevé outre-mer : 6,6‰ à La Réunion, 7,5‰ en Guadeloupe, 8,0‰ en Martinique, 8,2‰ en Guyane et 9,5‰ à Mayotte. 

La mission d’information met l’accent sur d’autres indicateurs problématiques : 55.000 enfants naissent chaque année prématurément en France, soit 7% des naissances. Si "leur prise en charge s’est améliorée", 75% de la mortalité néonatale et 50% des handicaps d’origine néonatale sont liés à des naissances prématurées. Par ailleurs, les complications au cours de la grossesse, lors de l’accouchement ou en post-partum sont qualifiées de "fréquentes", à l’instar des hémorragies du post-partum (10% des accouchements). 

Transformer et sécuriser l’offre sur la base d’un audit 

Or, les maternités ne sont pas toujours en capacité de faire face à ces complications. "Entre 10 et 15% des accouchements à risque demeurent réalisés dans des maternités présentant un niveau d’équipement non adapté à leur prise en charge", selon le rapport. Plus globalement, le réseau de maternités est considéré comme "fragile et inadapté aux besoins de santé, aux ressources disponibles et aux impératifs de sécurité". Dénonçant "un lent pourrissement", lié notamment à "un phénomène d’évitement des maternités en difficulté de la part des familles les mieux informées", les rapporteures appellent à "renouer avec des standards de qualité de haut niveau, en conjuguant accessibilité des soins et sécurisation accrue des structures". 

Il s’agit, pour les sénatrices Annick Jacquemet (UC, Doubs) et Véronique Guillotin (RDSE, Meurthe-et-Moselle), d’"engager une transformation globale de l’offre de maternités", non pas sur la base d’un seuil de naissances mais d’un audit précis de l’existant. Cela suppose notamment de rénover le pilotage national et régional de la santé périnatale, de renforcer les effectifs et les ratios d’encadrement, d’"assurer, sur tout le territoire, un ratio minimal d’un lit de réanimation néonatale pour 1.000 naissances" et d’organiser "une accessibilité des structures au regard des contraintes territoriales et une amélioration de l’offre de transport médical d’urgence". 

S’appuyer davantage sur les PMI 

La mission formule d’autres préconisations pour "garantir un suivi et un accompagnement de proximité dans les mois autour de l’accouchement", en s’appuyant sur les services de protection maternelle et infantile (PMI). Il est pointé dans le rapport une "forte baisse des actions des PMI à destination des enfants et des mères" depuis dix ans, ainsi que des disparités territoriales importantes dans les choix de maillage territorial et les moyens octroyées à ces services par les départements. 

Les services de PMI doivent pouvoir disposer d’un "modèle viable de financement" et être mieux articulés avec la médecine de ville et l’hôpital, "notamment par le développement d’antennes de PMI au sein des maternités", conclut la mission d’information. Cette dernière estime également nécessaire de "clarifier la prise en charge de certains actes entre les départements et l’Assurance maladie".