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Etat civil - Mariage pour tous : malgré une centaine d'amendements, le texte peu modifié sur le fond

Réunis en commission depuis le 15 janvier, les députés se sont prononcés, dans la nuit du 16 au 17 janvier, en faveur du projet de loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe. Durant les très longs débats, l'opposition a mené la bataille sur chacun des 23 articles. Elle n'est pas parvenue à faire adopter la reconnaissance d'une clause de conscience pour les maires et adjoints récalcitrants.

Les députés ont en particulier validé l'article 1er du texte qui affirme que "le mariage est contracté par deux personnes de sexe différent ou de même sexe". Ce faisant, ils ont repoussé la proposition des députés UDI et UMP consistant à créer une "alliance civile" distincte du mariage (parce que notamment déconnectée de la filiation) mais qui, d'après ses auteurs, aurait apporté "une sécurité accrue" par rapport à l'actuel PACS, notamment en matière patrimoniale, et aurait été célébrée en mairie par un officier d'état civil.
Au total, une centaine d'amendements ont été adoptés sur le texte. Le principal émane du rapporteur du texte, le député PS de l'Isère, Erwann Binet. Il conduit à conserver dans le Code civil les termes de "père" et "mère", alors que le projet de loi initial prévoyait de les remplacer par le mot générique de "parents". Mais il introduit dans le Code civil, en tête des livres Ier et III, deux articles généraux. Ceux-ci indiquent en particulier que les dispositions contenues dans ces livres faisant référence aux père et mère s'appliquent également aux parents de même sexe. L'amendement du rapporteur a ouvert la voie à l'adoption de très nombreux amendements de l'opposition consistant à supprimer les articles du projet de loi qui prévoyaient de substituer dans divers codes le terme de "parent" à celui de "père" ou "mère" et d'"époux" à celui de "mari" ou "femme".

Une plus grande sécurité juridique

Les députés ont écarté les amendements de la gauche ouvrant la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de femmes. De même, ils ont rejeté un amendement de la droite réservant ce type de technique aux couples hétérosexuels. Malgré quelques contestations, la majorité s'est donc résignée à appliquer l'accord passé avec le gouvernement prévoyant qu'un prochain texte sur la famille permettrait d'accorder ce droit aux couples de femmes.
La question de la PMA n'a cessé d'être posée à Christiane Taubira, ministre de la Justice, notamment sur le fait de savoir si celle-ci soutiendrait la mesure dans ce prochain texte sur la famille. "Nous ouvrons le mariage avec tout ce qu'il est aux couples homosexuels ! Nous ne faisons pas deux régimes !", a-t-elle lancé. "C'est une vente à la découpe", avec d'abord le mariage puis la PMA dans un autre texte, a protesté Daniel Fasquelle (UMP). Olivier Dussopt (PS) a déploré, lui, que la question des mères porteuses viennent sur le tapis : "Vous parlez de la GPA (gestation pour autrui) alors que la GPA n'est pas dans ce texte !", a-t-il lancé à l'attention de l'opposition. Celle-ci s'inquiète de l'éventualité, à terme, d'une légalisation de l'accès des couples d'hommes à la GPA, qui instaurerait un "droit à l'enfant" prenant le dessus sur le "droit de l'enfant".
Evoquant la situation des enfants français nés à l'étranger de mère porteuse, que le projet de loi ne traite pas, la garde des Sceaux a annoncé qu'elle avait préparé "une circulaire pour les tribunaux d'instance, afin de faciliter la délivrance des certificats de nationalité" qui sont difficiles à obtenir dans ces cas-là. Elle a cité le chiffre de 38 cas ces quatre dernières années.
Le projet de loi améliorera la sécurité juridique des enfants lorsque l'un des conjoints d'un couple homosexuel a adopté un enfant. Un amendement voté en commission autorise en effet expressément l'époux à adopter l'enfant que son conjoint a antérieurement adopté seul. Un autre amendement facilite par ailleurs l'exercice en commun de l'autorité parentale en cas d'adoption simple de l'enfant du conjoint. En revanche, l'opposition a réussi à faire adopter des amendements supprimant les articles 17, 18 et 19 du projet de loi qui étendaient aux fonctionnaires mariés avec une personne de même sexe les droits existants en matière de congés pour maternité ou pour adoption.

Tous les maires, sans exception, devront appliquer la loi

Les amendements de la droite visant à permettre aux officiers d'état civil d'invoquer une clause de conscience pour ne pas procéder au mariage de couples de même sexe n'ont, eux, pas été adoptés. La droite a invoqué à maintes reprises les propos du président de la République prononcés lors de l'ouverture du dernier Congrès des maires. François Hollande s'était prononcé en faveur du respect de la liberté de conscience. Une position qu'il avait ajustée dès le lendemain. Les propositions tendant à la "délocalisation" du mariage dans une autre mairie, ou à la désignation d'office par le préfet ou le procureur de la République d'un autre officier d'état civil dans le cas d'un refus de célébrer une union homosexuelle ont donc, sans surprise, été rejetées. "Il serait incongru qu'il y ait un centimètre carré de ce pays où la loi ne serait pas appliquée !", s'est indigné Bernard Roman (PS). "Ce que vous appelez clause de conscience heurte un certain nombre de droits et de libertés constitutionnelles : la neutralité du service public, la liberté du mariage, l'égalité devant le droit, la non-discrimination", a souligné, de son côté, la ministre de la Justice. Examinés au même moment, des amendements accordant aux futurs époux – quels qu'ils soient – des possibilités plus grandes pour la localisation de la cérémonie de mariage ont été repoussés.
Le projet de loi sera examiné en séance du 29 janvier au 10 février prochains.