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Enfance / Jeunesse - Lutte contre la pauvreté des enfants et des jeunes : le collectif Alerte avance ses propositions

Alors qu'une "réunion de ministres" doit se tenir ce jeudi 15 mars à Matignon sur la préparation de la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté des jeunes et des enfants et que les groupes de travail, coordonnés par le délégué interministériel Olivier Noblecourt, doivent remettre dans la soirée leurs préconisations, le collectif Alerte a déjà fait entendre sa voix, en formulant ses propositions mardi lors d'une conférence de presse. Celles-ci ont également été avancées dans le cadre des différents groupes de travail. Alerte regroupe 37 associations de lutte contre l'exclusion, dont l'APF, ATD Quart Monde, Emmaüs, la Fédération des acteurs de la solidarité (ex Fnars) la fondation Abbé-Pierre, Médecins du Monde, le Secours catholique, Soliha, l'Unaf, l'Uniopss...

"Les enfants pauvres vivent dans des familles pauvres"

La principale revendication d'Alerte porte sur le périmètre de la démarche engagée par le gouvernement (voir nos articles ci-dessous). En effet, comme l'a expliqué François Soulage, le président du collectif (et ancien président du Secours catholique), "les enfants pauvres vivent dans des familles pauvres. [...] On ne peut donc préparer des mesures pour les enfants sans s'occuper de la situation des familles dans lesquelles ils vivent". De même, "on ne peut traiter les jeunes hors d'un contexte global".
Lors de sa récente audition par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale (voir notre article ci-dessous du 13 février 2018), Olivier Noblecourt, le délégué interministériel à la prévention et à la lutte contre la pauvreté des enfants et des jeunes, avait devancé cette critique en indiquant qu'il ne s'agit pas de "créer un grand soir des politiques sociales" qui remettrait en cause les politiques de ces dernières années, mais d'apporter "une inflexion" sur les jeunes et les enfants, dans la mesure où "c'est aujourd'hui le public qui est le plus directement victime de la pauvreté". Auditionnée à son tour en compagnie de Jean-Michel Blanquer, Agnès Buzyn avait également affirmé qu'"il n'est pas tolérable que les enfants pauvres d'aujourd'hui soient les adultes pauvres de demain" (voir notre article ci-dessous du 7 mars 2018).

Quels moyens pour la stratégie ?

Au-delà de cette question de périmètre, le collectif Alerte estime que "beaucoup de droits existent pour vivre décemment, il n'y a pas besoin d'en créer de nouveaux, mais les inégalités fondamentales se trouvent dans l'accès de chacun à ses propres droits".
Critiquant certaines mesures fiscales (flat tax, suppression de l'ISF, augmentation des taxes sur l'essence...), François Soulage pose aussi la question du financement : "Nous disons au président de la République [...] que le compte n'y est pas. Certes la stratégie est en route, mais quand verrons-nous les résultats ? Une stratégie n'est ni une loi, ni un plan, ni un budget. Elle n'a pas de calendrier et nous ne connaissons pas les moyens mis en œuvre".
En attendant les annonces du chef de l'Etat, le collectif Alerte met en avant, parmi les propositions présentées dans les groupes de travail, "douze points essentiels qui doivent figurer dans la stratégie qu'annoncera le gouvernement pour éradiquer la pauvreté et donner à chacun les moyens d'accéder aux droits communs".

Un revenu minimum de 850 euros et le RSA financé par l'Etat

Parmi ces points essentiels figurent notamment la création d'un "droit formel à un accueil de tous les enfants de moins de trois ans" (autrement dit le retour du droit opposable au mode de garde évoqué sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy, mais finalement abandonné), le renforcement de l'offre de logements très sociaux (avec un objectif annuel de 60.000 PLAI et 50.000 logements dans le parc privé à vocation sociale), l'abandon du plan d'économie de 20 millions d'euros sur les CHRS en 2018 ou encore la demande de "faire de la lutte contre le non recours aux droits sociaux une priorité absolue (notamment en utilisant l'instauration du prélèvement à la source pour automatiser l'attribution de certaines prestations et en lançant une expérimentation sur des "territoires zéro non recours").
Alerte revient également sur l'idée d'une fusion des minima sociaux en vue de créer, sous forme d'une allocation différentielle, un "revenu minimum décent" d'environ 850 euros par mois. En attendant, il demande une revalorisation immédiate du RSA et des ressources complémentaires pour les familles fragiles. A noter : le collectif estime que "l'Etat doit assurer en intégralité le financement du RSA, en contrepartie d'engagements des conseils départementaux à mener une réelle politique d'insertion".
Alerte prône aussi l'instauration du principe "aucun jeune sans ressources, ni accompagnement, ni formation" (sans limitation de durée, contrairement à la garantie jeunes actuelle) et un "développement massif" de l'offre d'emploi et de formation à destination des personnes les plus éloignées de l'emploi.

Lutter contre les "déserts alimentaires"

Dans le même esprit, le collectif propose une fusion de l'aide médicale d'Etat (AME) et de la protection universelle maladie (Puma) dans "une protection maladie réellement inclusive", ainsi qu'une simplification des démarches d'accès à la CMU et à l'aide à la complémentaire Santé (ACS). Autre demande : la garantie d'"un accès digne à l'alimentation", en luttant contre les "déserts alimentaires" et en instaurant un accès à la cantine scolaire pour tous.
Enfin, le collectif demande la régularisation des familles présentes en France depuis plus de deux ans et "présentant une volonté d'insertion", ainsi qu'une simplification du parcours administratif pour l'obtention des titres de séjour et, pour les demandeurs d'asile, des autorisations de travail dès trois mois.
En termes de gouvernance, le collectif Alerte préconise de transformer le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale (CNLE) en une instance de coordination et de pilotage des politiques de lutte contre la pauvreté, avec déclinaison au niveau départemental et contractualisation entre les différents acteurs impliqués, dont les collectivités territoriales.

 

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