Lopmi : l’Assemblée renforce la place des collectivités dans le rapport annexé

Après la présentation des principales modifications opérées par les députés sur le texte de la Lopmi (voir notre article du 24 novembre), nous présentons ici les principaux ajouts opérés sur le rapport annexé  à  cette dernière qui concernent les collectivités territoriales. Revue de détail avant que l'ensemble du texte (projet de loi et rapport annexé) ne passe en commission mixte paritaire le 1er décembre.

 

Outre les dispositions du texte proprement dit – "qui est d’abord une loi de transformation numérique" comme l’indique la place Beauvau –, le projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l'Intérieur (Lopmi) se matérialise surtout par un rapport annexé qui "fixe une trajectoire jusqu’en 2027 à l’ambition de transformer l’institution pour être à la hauteur des attentes des citoyens". Si les députés n’ont pas bouleversé l’économie générale de ce rapport, ils ne l’ont pas moins enrichi, notamment en prenant davantage en compte les collectivités territoriales. Revue de détail. 

Sdis

Via un amendement proposé par Départements de France, les députés ont ajouté "les collectivités territoriales" comme parties prenantes des pactes capacitaires pouvant être conclus avec l’État et les services départementaux d’incendie et de secours (Sdis), en précisant que l’État accompagnera également les investissements innovants "en concertation avec les financeurs". Il est également précisé que le pacte capacitaire "doit être articulé avec une augmentation durable de l’enveloppe d’aide à l’investissement structurant des Sdis". Deux mesures notamment préconisées dans un récent rapport de Départements de France (voir notre article du 14 octobre).
Les députés ont également prévu que "le ministère de l’Intérieur entame des négociations avec le ministère de l’Économie afin d’exonérer du malus écologique les véhicules affectés aux Sdis et aux forces de sécurité intérieure". Satisfaisant ici une revendication exprimée par la Fédération nationale des sapeurs-pompiers (voir notre article du 17 juin).

Représentation des territoires ruraux

Déplorant le manque d’égalité territoriale dans le recrutement au sein du ministère de l’Intérieur, les députés ont précisé que les dispositifs de recrutement devaient être mieux ciblés non seulement sur les quartiers populaires, mais aussi "sur les territoires ruraux". Le ministère devra également veiller "à assurer la promotion de ses dispositifs de recrutement dans les territoires ultramarins".
De même, s’agissant des "cent classes de reconquête républicaine" destinées à être créées dans les quartiers de reconquête républicaine et les quartiers prioritaires de la politique de la ville pour préparer aux concours de la fonction publique, a été introduite l’expérimentation, "dans les territoires ruraux", d’un dispositif visant "à susciter l’ambition scolaire des élèves et à les inciter à intégrer les forces de sécurité publique".

Maillage territorial des services publics

À la consultation préalable du maire de la commune siège du commissariat ou de la brigade de gendarmerie que le ministère de l’Intérieur envisagerait de fermer, ont été ajoutées celles du président de l’intercommunalité et des parlementaires concernés. De même, s’agissant du choix des territoires d’implantation des 200 nouvelles brigades de gendarmerie prévues, les députés ont précisé que ce choix "donne lieu à une concertation entre les élus locaux et les services du ministère", lesquels "communiquent aux élus un état des lieux de la situation sécuritaire" du territoire concerné, un "délai raisonnable" devant être accordé aux élus locaux pour transmettre leurs observations et propositions (voir aussi notre article du 30 septembre 2022).

Gardes champêtres, acteurs du continuum de sécurité

Omis jusque-là, les députés ont ajouté les gardes champêtres au continuum de sécurité, en précisant que, comme les polices municipales, ils "jouent un rôle essentiel, aux côtés des forces de sécurité intérieure, pour la sécurité des citoyens". La direction unique des partenariats chargées de l’animation de ce continuum devra également les y inclure.

Opérations funéraires

"Afin de déployer plus d’effectifs des forces de l’ordre vers des missions de sécurité", les députés ont prévu que "le ministère de l’Intérieur, en concertation avec les élus locaux, déchargera au maximum la police nationale en transférant, quand c’est possible, les opérations funéraires aux communes".

Outre-mer

Le ministère de l’Intérieur devra établir "une nouvelle feuille de route dédiée à la protection des frontières du département de Mayotte". Il a également "vocation à établir un état des lieux de la situation de la sécurité" sur ce territoire, bilan qui "a vocation à être communiqué aux élus locaux et aux parlementaires" de l’île et à "donner lieu à une concertation contradictoire".
Il est par ailleurs précisé que "la démarche de renforcement et de redéploiement des moyens pour les forces de secours se fera en prenant en compte les spécificités insulaires et ultramarines".

Formation

Il est désormais prévu que le ministère de l’Intérieur "renforcera son partenariat avec les élus locaux pour proposer aux maires et aux adjoints au maire des formations à la fonction d’officier de police judiciaire". Cette mesure répond à une demande régulièrement formulée (voir notre article du 19 novembre 2021), même après l’introduction, par la loi Engagement et Proximité, qui prévoit que les préfets et procureurs doivent désormais présenter ces attributions d'OPJ aux maires après le renouvellement général des conseils municipaux (voir notre article du 23 janvier 2020).

Gestion de crises

La coopération plus structurée souhaitée entre le ministère de l’Intérieur, les opérateurs de l’État ayant un rôle dans la prévision des événements majeurs et, initialement, "les communes", est élargie "aux collectivités territoriales", motif pris que "si la conduite des opérations de crise est assurée par l’État (préfet ou maire), c’est en réalité l’ensemble des collectivités qui sont concernées dans la planification et la gestion du soutien". Là-encore, la mesure était préconisée dans le rapport de Départements de France précédemment évoquée.

Lutte contre les groupuscules violents

Dans le cadre d’une lutte renforcée contre les groupuscules violents, il est prévu que "les services de police mettront à disposition des élus locaux un guide méthodologique présentant les instruments juridiques mobilisables par l’autorité administrative et des conseils pratiques pour prévenir les troubles à l’ordre public susceptibles d’être causés par des groupes radicaux violents".

Délinquance des mineurs

Les députés prévoient la mise en place de "cellules d’enquête, spécialisées et pluridisciplinaires", pour lutter contre la délinquance des mineurs non accompagnés "dans les villes où leur présence est particulièrement importante, comme Paris, Rennes ou Nice, à l’image de la cellule mise en place à Bordeaux depuis 2019".