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L’Assemblée revoit la Lopmi à la marge

Après le Sénat, les députés viennent à leur tour d’adopter en première lecture (par 419 voix contre 116), mardi 22 novembre, le projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’Intérieur (Lopmi), sans en bouleverser l’architecture. Ils ont toutefois adopté un certain nombre de modifications, dont nombre d’entre elles concernent au premier chef les collectivités territoriales. Nous présentons ici les modifications apportées au texte lui-même ; celles apportées au rapport annexé seront présentées ultérieurement.

Dépôt de plainte

• À titre expérimental, pendant deux ans dans des départements à définir, est introduite la possibilité pour une victime d’infraction pénale, si une difficulté manifeste ou un motif impérieux le justifie, de demander à déposer plainte à son domicile ou au sein d’une association d’aide aux victimes.

• Toujours à titre expérimental, pour cinq ans, la possibilité pour l’État de mettre en place des brigades de gendarmes et de policiers mobiles afin de recueillir les plaintes de violences conjugales en territoire rural dans des zones déterminées par décret. Les députés reprennent ici une disposition du rapport sénatorial d’information Femmes en ruralité (v. notre article du 19 octobre 2021), en relevant que les territoires ruraux concentrent 47% des féminicides.

Outrages sexistes et sexuels

• Le harcèlement scolaire est ajouté à la liste des infractions à connotation sexuelle ou sexiste qui sont plus durement réprimées. Les députés étendent en outre la circonstance aggravante de l’outrage sexiste lorsque le fait est commis à l’encontre de tous les mineurs, et plus seulement de ceux de moins de 15 ans. Enfin, la limite de la peine complémentaire de travail d’intérêt général pouvant être prononcée en cas d’outrage sexiste et sexuel est portée de 120 à 150 heures.

Les députés demandent par ailleurs au gouvernement, dans les trois mois de la promulgation de la loi, un rapport "présentant les raisons de constituer des brigades spécialement dédiées à la lutte contre les outrages sexistes et sexuels et chargées d’assurer des patrouilles dans les transports en commun ou tout autre lieu public où ces actes sont le plus souvent commis".

Rodéos urbains : confiscation élargie des véhicules et élargissement aux "rodéos nautiques"

• La peine complémentaire de confiscation d’un ou de plusieurs véhicules appartenant au condamné pour une infraction de rodéo urbain est élargie aux véhicules n’ayant pas servi à commettre l’infraction. La mesure permettrait ainsi de sanctionner l’auteur du rodéo non propriétaire de l’engin, qui échappe aujourd’hui à la confiscation, afin de tenir "compte de la pratique des délinquants consistant à se prêter des engins".

Par ailleurs, le dispositif des rodéos urbains "terrestres" est transposé aux "rodéos nautiques", afin de permettre la verbalisation des comportements les plus dangereux et, le cas échéant, la confiscation des engins.

Amende forfaitaire délictuelle : consignation revue, champ étendu

• Les sénateurs avaient plutôt réduit l’élargissement du champ de l’amende forfaitaire délictuelle souhaité par le gouvernement. Les députés, au contraire, l’ont élargi aux délits suivantes : bruits ou tapages injurieux ou nocturnes ; rodéos urbains et nautiques (v. supra) ; dressage (et exercice) de chien au mordant sans certificat de capacité et en dehors de activités et structures autorisées ; délit de port ou de transport sans motif légitime d’arme blanche ou incapacitante, moyennant dessaisissement de l’arme ; introduction de boisson alcoolisée par force ou fraude dans les stades ; entrée sur une aire de jeux d’enceinte sportive troublant le déroulement de la compétition ; chasse sur le terrain d’autrui ou prohibée ; infractions en matière de navigation, comme la navigation sans titre ; entrave à la circulation routière ; vente au déballage ; infractions en matière de transport routier, comme le refus de présenter des documents.

• Ils ont en outre revu le champ de la consignation obligatoire préalable à la contestation de l’amende forfaitaire délictuelle, estimant que cette dernière doit être maintenue pour les délits relevant du contentieux de masse et pour lequel "la réalité de l’infraction n’est a priori pas contestable ou qui sont nécessairement commis par des personnes, et notamment des professionnels, disposant de revenus" (délits en matière de taxi, de transport routier, de cabotage, de refus de vérification ou de transformation d’un véhicule), mais doit être exclue pour les autres délits (filouterie, TAG, intrusion dans un établissement scolaire, atteintes au fonctionnement des trains, délits relatifs aux chiens d’attaques, entraves à la circulation ou ivresse dans les stades).

• Ils ont également introduit l’obligation d’informer l’auteur de l’infraction du droit de recours qu’il peut exercer contre la procédure de l’amende forfaitaire qui lui est appliquée.

• Ils ont enfin prévu un rapport du gouvernement au Parlement, avant le 1er janvier 2026, portant évaluation exhaustive de la mise en œuvre de la procédure de l’amende forfaitaire délictuelle, pour chacune des infractions auxquelles cette procédure est applicable, ainsi que les possibilités d’inclure les infractions liées à l’achat et à la détention de produits du tabac contrefaits acquis dans les réseaux de distribution illicites, particulièrement auprès de vendeurs à la sauvette. Cette évaluation devra notamment faire état du taux de recouvrement et des éventuelles difficultés de mise en œuvre (v. notre article du 15 septembre 2021) et, le cas échéant, identifie des pistes de résolution de ces difficultés, notamment par la mise en place d’une saisie sur salaire en concertation avec l’employeur de la personne mise en cause. Elle devra également dresser un état des actions mises en œuvre dans la prévention et la lutte contre le délit d’usage de stupéfiants chez les mineurs, aujourd’hui exclus du dispositif.

Outre-mer

Un amendement gouvernemental rend applicables les modifications apportées par la Lopmi à différents codes dans les collectivités de l’article 74 de la Constitution.

Rapports du gouvernement au Parlement

Outre ceux déjà évoqués, le Parlement demande au gouvernement de nouveaux rapports, parmi lesquels : un rapport (avant le 1er juillet 2024) appréciant "la protection des collectivités territoriales et leur vulnérabilité aux intrusions numériques" ; dans les trois mois de la promulgation de la loi, un rapport "évaluant les techniques d’interpellation permettant de mieux lutter contre les refus d’obtempérer".

 

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