Loi SRU : 1 million de logements produits... "et maintenant où va-t-on ?"
25 ans après la promulgation de la loi solidarité et renouvellement urbain (SRU), le réseau des acteurs de l’habitat a détaillé le bilan du dispositif en matière de logement des ménages modestes, de mixité sociale et d’égalité sociale et territoriale, lors d’un débat organisé lundi 25 novembre.
Piloté par l’Union sociale pour l’habitat (USH) et la Caisse des Dépôts, le Réseau des acteurs de l’habitat accompagne la décentralisation des politiques de l’habitat en vue d’engager le débat entre le monde de la recherche, les acteurs publics et les institutionnels. Lundi 25 novembre 2024, le réseau proposait un moment d’échange à l’occasion des 25 ans de la loi solidarité et renouvellement urbain (SRU). Promulguée en 2001, celle-ci fixe un quota de 25% de logements sociaux à atteindre pour les communes dont la population est au moins égale à 1.500 habitants dans l’unité urbaine de Paris et 3.500 habitants sur le reste du territoire.
"Dans cette affaire, tous les partenaires du logement ont un rôle, a introduit Jean-Luc Vidon, président de la Fédération des associations régionales HLM (Fnar). La loi SRU est là pour définir une répartition équitable du logement sur tous les territoires. N’oublions pas que 70% des Français ont accès au logement social de par leurs revenus : le logement social devrait donc être la règle."
Pour l’heure, la loi aurait permis la production de 1 million de logements. Il resterait cependant encore plus de 700 communes déficitaires sur les 1.022 concernées à la fin du dernier bilan triennal.
“Le compte n’y est pas”, a affirmé Julie Bergeot, directrice de la mission d’appui SRU à la direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP). “250 communes sont très éloignées des objectifs SRU et 90 se trouvent à moins de 10%”, a repris Jean-Luc Vidon. Selon le président de la Fnar, un décrochage inquiétant s’observerait entre les années 2020 et 2022 : “67% de l’objectif est atteint, contre 100 voire 150% dans les périodes précédentes”, a-t-il indiqué. Une dégringolade qui s’explique certes par la crise du logement mais également par des raisons politiques, estiment les intervenants.
Quantité et qualité
Pour Thomas Kirszbaum, sociologue, chercheur associé au Centre d'études et de recherches administratives politiques et sociales (Ceraps, Université de Lille), il convient en outre de distinguer le bilan qualitatif du bilan quantitatif : le premier s’avère honorable et le second très mauvais. "La loi SRU a produit 1 million de logements mais comme pour toute politique publique, ce qui compte, c’est l’impact propre du dispositif. Or, les études réalisées à ce sujet démontrent un effet modeste, concernant surtout les villes qui comptaient peu de logements sociaux au démarrage. Celles qui en avaient déjà sont restées sur leur tendance initiale, leur dynamique de construction n’a pas fondamentalement évolué."
Par ailleurs, toujours selon le chercheur, pendant longtemps, une partie des communes SRU ont plus ou moins satisfait leurs objectifs en produisant des logements dits sociaux “en réalité inaccessibles aux ménages modestes, tels que le PLS" (entre 10 et 12 euros du m2 contre 6 et 8 euros pour le logement locatif social).
Alors que 2,7 millions de ménages français se trouvent dans l’attente d’un logement social, Julie Bergeot a souligné que le PLAI représentait 32% des logements produits entre 2020 et 2022 dans le cadre de la loi SRU, et le PLS ou assimilé 26%. “Le PLAI se tient, tandis que le PLS augmente car il s’équilibre mieux économiquement dans les opérations. Le PLUS, lui, s’effondre. Il s’agit du segment le moins bien financé alors qu’il correspond à une large majorité de demandeurs. Ce n’est pas une bonne nouvelle.”
› Boussy-Saint-Antoine, “bon élève” SRUEn l’espace de 15 ans, la ville de Boussy-Saint-Antoine (Essonne) est passée de 5 à 22,5% de logements sociaux. Un choix politique assumé par le maire Romain Colas, également vice-président de la Communauté d’agglomération du Val d'Yerres-Val-de-Seine. “Nous avons bâti un plan local d’urbanisme en identifiant préalablement les opportunités foncières. Ce PLU contraint notamment à réaliser du LLS dans les opérations de 500 m2 de surface de plancher ou plus. Aujourd’hui, les grandes opérations sont finies, nous n’avons plus de foncier. Ce qui permettra de continuer à produire du logement pour tous, c’est la capacité de la ville à se reconstruire sur elle-même.” Ce qui confronte les édiles à deux difficultés : “l’enchevêtrement normatif, qui empêche toute agilité de la puissance publique, et l’incapacité des bailleurs sociaux à monter de petites opérations". |