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Réforme territoriale - Loi Notr : point par point, les ultimes évolutions du texte

L'Assemblée et le Sénat ont adopté définitivement le 16 juillet le projet de loi portant Nouvelle organisation territoriale de la République (Notr). Un texte élaboré une semaine plus tôt, à coups de compromis, par leurs représentants au sein de la commission mixte paritaire. Si la réforme n'a pas fondamentalement changé après cette ultime étape, reprenant souvent des dispositions voulues par les députés en seconde lecture, les évolutions ne sont pas négligeables. Zoom sur ces principaux ajustements. Le texte n'est peut-être pas encore tout à fait figé, le Conseil constitutionnel risquant d'être saisi, notamment sur le Grand Paris.

Des régions confortées dans leur rôle de définition de la stratégie
- En matière de développement économique et d'aides aux entreprises, l'affirmation de la compétence des régions a été confortée en associant à l'élaboration du schéma régional de développement économique d'innovation et d'internationalisation (SRDEII) les intercommunalités et les chambres consulaires (articles 2 et 3).
- Un schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET) se substituera aux divers schémas régionaux existants dans ce domaine (article 6). Il aura une valeur prescriptive envers les documents infrarégionaux, confirmant ainsi le chef de filat de la région en matière d'aménagement et de développement durable du territoire. La procédure d'élaboration et la liste des documents constituant le schéma faisaient l'objet d'un désaccord entre l'Assemblée et le Sénat. Les députés qui, en seconde lecture, s'étaient inspirés de travaux conduits par plusieurs associations d'élus locaux, ont finalement réussi à imposer leurs vues.
- Après bien des hésitations, les transports scolaires seront finalement de la responsabilité des régions. Mais celles-ci auront la possibilité de les déléguer aux départements (article 8). C'est d'ailleurs ce que la plupart d'entre elles feront, de l'avis de plusieurs sénateurs et députés, les départements ayant pour eux l'expérience et la proximité. Les régions seront ainsi aux commandes de quasiment l'ensemble des transports interurbains (à l'exception des transports des enfants handicapés pour lesquels les départements demeurent compétents). La concession des sénateurs est "énorme" a lâché le rapporteur Jean-Jacques Hyest lors de la réunion de la commission mixte paritaire (CMP).
- "En retour", les sénateurs ont bénéficié d'un geste de l'Assemblée nationale : les départements concernés qui le souhaiteront, pourront conserver leur compétence sur les ports maritimes et fluviaux (article 11), comme l'a rappelé Olivier Dussopt. On se souvient aussi que les députés, en concertation avec le gouvernement, avaient renoncé en première lecture au transfert aux régions des collèges et de la voirie départementale.
- La région ne sera finalement pas chef de file dans le domaine du tourisme (article 4). Le Sénat y était trop réticent. Le schéma de développement touristique que les collectivités territoriales d'une même région devaient élaborer ensemble disparaît aussi, alors qu'en seconde lecture, il avait suscité un accord des deux chambres. Le tourisme demeurera une compétence partagée entre les collectivités.
- La CMP n'a pas non plus retenu le projet sénatorial devant conduire à "une vraie décentralisation" de la politique de l'emploi au bénéfice des régions (articles 3 bis et 3 ter).
- Autre renoncement de la part du Sénat : les régions ne verront pas leur rôle renforcé dans l'élaboration de la carte des formations supérieures et de la recherche (article 12 bis A). Les sénateurs voulaient leur confier un rôle d'approbation de la carte, une option que la CMP n'a ainsi pas retenue.

Des intercommunalités plus grandes aux compétences étendues
- Les intercommunalités à fiscalité propre devront comporter au moins 15.000 habitants (article 14). Alors que les deux chambres campaient sur leurs positions (20.000 habitants pour les députés, 5.000 pour les sénateurs), la proposition formulée par les sénateurs socialistes et centristes en deuxième lecture a donc fait son chemin.
Dans les 57 départements dont la densité est inférieure à la moyenne nationale, les intercommunalités dont la densité démographique est inférieure à la moitié de la densité nationale bénéficieront d'adaptations. Ce sera aussi le cas des communautés dont la densité démographique est inférieure à 30% de la densité nationale et des communautés de montagne si la moitié de leurs communes se situent dans ce milieu géographique. Dans tous les cas, les communautés qui bénéficieront d'adaptations devront cependant compter au moins 5.000 habitants. Enfin, les communautés de communes créées par une fusion postérieure à 2012 seront exonérées de regroupement si elles ont plus de 12.000 habitants.
- Voulue par le groupe socialiste de l'Assemblée nationale, la fixation d'un rendez-vous législatif pour déterminer avant le 1er janvier 2017 les modalités de l'élection des organes délibérants de toutes les intercommunalités à fiscalité propre (article 22 octies) constituait un "chiffon rouge" pour le Sénat. La disposition disparaît du texte.
- Le Sénat a aussi fait échec à la tentative opérée par les députés de revenir sur la minorité de blocage (25% des communes correspondant à 20% de la population) concernant le transfert à l'intercommunalité de l'élaboration du plan local d'urbanisme (PLU) prévu par la loi Alur. Les députés avaient proposé d'exiger une majorité qualifiée de communes pour faire obstacle au transfert du PLU.
- Le calendrier de réalisation des schémas départementaux de coopération intercommunale est celui adopté par les députés, à savoir une mise en œuvre intégrale au 31 décembre 2016, date qui a semblé "irréaliste" à l'Assemblée des communautés de France (AdCF).
- La CMP a reporté à 2020 le transfert obligatoire aux communautés de communes et aux communautés d'agglomération des compétences communales en matière d'eau et d'assainissement (articles 18 et 20).
- Les conseils communautaires auront jusqu'au 31 décembre de cette année pour adopter le projet de schéma de mutualisation prévu par la loi de réforme des collectivités territoriales (article 22 bis AA).
- La procédure de délégation ou de transfert de compétences départementales aux métropoles est celle qu'ont voulue les députés (article 23). Neuf compétences sont concernées dans les domaines du social, des personnes âgées, des routes, du tourisme et des collèges. À défaut de convention entre le département et la métropole au 1er janvier 2017 sur au moins trois groupes de compétences (routes mises à part), la totalité des compétences départementales prévues à l'article est transférée de plein droit à la métropole (à l'exception des collèges).
- Sur la métropole du Grand Paris, les députés ont pu imposer leur version (article 17 septdecies). La création de la métropole reste fixée au 1er janvier 2016, alors que les sénateurs voulaient la reporter d'un an. On notera toutefois que le nouvel EPCI à fiscalité propre n'exercera réellement ses compétences qu'à partir du début de 2017. La CMP a opté pour une gouvernance resserrée avec une assemblée de 210 élus. Présente à la réunion, Nathalie Kosciusko-Morizet n'a pas pu empêcher ses collègues d'exclure sa participation du conseil de la métropole.

Dispositions diverses
- Les députés ont de nouveau échoué à mettre sur pied le Haut Conseil des territoires, instance censée améliorer le dialogue entre l'Etat et les collectivités territoriales (article 1er bis). Les sénateurs ont eu peur qu'elle fasse concurrence à leur assemblée (puisque le Sénat est chargé par la Constitution de représenter les collectivités territoriales). Avec les règles pour l'opposition des communes au transfert du PLU et le principe de l'élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires, la création de l'instance par la loi constituait un "casus belli" pour le Sénat.
- La culture, le sport, le tourisme, la promotion des langues régionales et l'éducation populaire seront des compétences "partagées entre les communes, les départements, les régions et les collectivités à statut particulier" (article 28). Les conférences territoriales de l'action publique créées par la loi Maptam de janvier 2014 n'auront pas pour obligation de créer des commissions en charge du sport et de la culture.
- Le droit à compensation des charges d'investissement transférées par le projet de loi sera égal à la moyenne des dépenses constatées sur une période d'au moins cinq ans précédant le transfert de compétences (article 37). Cette période sera de sept ans en cas de désaccord des membres de la commission locale pour l'évaluation des charges et des ressources transférées.