Loi grand âge en 2024 : Catherine Vautrin s’engage à son tour
La ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités confirme globalement le calendrier qui avait été annoncé par Elisabeth Borne, mais précise que le futur projet de loi ne sera pas forcément une loi de programmation. "La stratégie, les finances et la gouvernance" de la politique grand âge et autonomie du gouvernement figureront toutefois dans ce texte, selon Catherine Vautrin qui met l’accent sur le "virage domiciliaire" et sur les enjeux de formation et de parcours professionnels dans ce secteur.
Auditionnée le 24 janvier 2024 par la commission des affaires sociales du Sénat, Catherine Vautrin, ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités, s’est engagée à "faire une loi grand âge et qu’elle soit votée d’ici la fin de cette année". Il ne s’agira peut-être pas formellement d’une loi de programmation, comme cela figure en l’état dans la proposition de loi (PPL) sur le bien vieillir et comme s’y étaient engagées Elisabeth Borne et Aurore Bergé, car "l’article 34 de la Constitution ne prévoit pas à ce stade de capacité de loi de programmation sur ce type d’activité", a indiqué la ministre. "Des lois de programmation déterminent les objectifs de l'action de l'État", spécifie pourtant, de manière large, l’article 34 de la Constitution, mais Catherine Vautrin attend sur ce point un avis du Conseil d’État, qui devrait arriver "d’ici un mois".
La ministre compte ensuite "réunir et auditionner les uns et les autres pour être en capacité d’écrire ce projet de loi et ensuite le discuter en deuxième partie d’année", cela malgré les "quelques obligations" législatives de fin d’année. Qu’il s’agisse ou non formellement d’une loi de programmation, ce projet de loi aura "trois éléments clé : la stratégie, les finances et la gouvernance, en d’autres termes quel virage domiciliaire et surtout avec qui", selon Catherine Vautrin. Cette dernière a également communiqué sur X (ex-Twitter) cinq "piliers importants" de cette future loi : le virage domiciliaire, l’"humanisation" des lieux d’accueil, la poursuite du renforcement des contrôles, le recrutement avec la revalorisation du personnel et "une meilleure attractivité des carrières" et, enfin, la "tolérance zéro pour toutes les formes de violence".
Quelles relations État-départements pour financer le "virage domiciliaire" ?
Ce texte sera l’occasion d’une "réflexion globale" concernant "le lien entre les départements et l’État sur les financements et sur ce virage domiciliaire", indique-t-elle encore face aux sénateurs. Mentionnant le fait que "la situation s’est dégradée pour les départements", la sénatrice Corinne Imbert (LR, Charente-Maritime) lui demande d’éviter la "posture" selon laquelle "à chaque fois que l’État met 1 euro le département doit mettre 1 euro". "Nous au département on ne pourra pas continuer à soutenir les Ehpad et à la fois les soins à domicile", témoigne Pascale Gruny (LR, Aisne), expliquant que certains Ehpad sont vides et que le département est en train de fermer celui de Saint-Quentin. Alors que ces établissements sont "de plus en plus médicalisés", elle interroge : "est-ce que c’est encore un sujet de département ou est-ce que ce n’est pas plutôt lié à l’hôpital" ?
"J’ai bien senti la volonté, maintenant il faudra effectivement trouver les moyens", souligne Elisabeth Doineau (UC, Mayenne). "Il faut absolument répondre à l’essentiel", alerte la rapporteure générale de la commission des affaires sociales, qui pointe "le problème de recrutements des professionnels" et "les moyens donnés aux établissements". Si le virage domiciliaire est une priorité, "il ne faut pas condamner les établissements, parce qu’on aura de plus en plus de centenaires, de nonagénaires", appuie-t-elle. Catherine Vautrin affirme vouloir "trouver l’équilibre", entre la prise en compte du fait que "certains Ehpad ne trouvent pas leur public" et la nécessité de prévoir la prise en charge des "pathologies du grand âge".
Former et favoriser des parcours professionnels attractifs
Concernant les moyens financiers, "à chaque fois que des gens retournent vers l’emploi, je retrouve des marges de manœuvre pour le reste", affirme la ministre qui vante les avantages de son grand ministère. Entre travail, santé et solidarités, "c’est un continuum", selon l’élue rémoise, revenant à plusieurs reprises sur l’importance de la formation et des parcours des professionnels des "métiers de l’humain". A 60 ans, une professionnelle de la petite enfance qui ne souhaite plus exercer un métier physique peut par exemple devenir assistante médicale, illustre-t-elle.
Sur le grand âge, "une de nos questions c’est notre capacité à former des personnes", répond-elle suite à l’interpellation de Dominique Théophile (RDPI, Guadeloupe) sur la situation des Antilles. "Le vieillissement de la population y est si rapide que la Guadeloupe et la Martinique passeront d’ici 2050 directement des départements parmi les plus jeunes aux deux départements les plus âgés de France", pointe le sénateur.
"La difficulté quand on a une personne à domicile, c’est la coordination des intervenants", met en avant Véronique Guillotin, mentionnant le fait que l’absence de médecin disponible pouvait être la cause d’une hospitalisation et donc d’une "rupture du parcours". "Le numerus apertus c’est 10.300 médecins par an, mais il faut 10 ans pour les former, donc on peut se raconter ce qu’on veut mais on a encore à peu près cinq années compliquées devant nous le temps que ces médecins puissent être opérationnels", lui répond la ministre de la Santé.
Si la PPL Bien vieillir est à l’ordre du jour des sénateurs à partir de ce 30 janvier, c’est bien l’avenir de la "fameuse loi grand âge" qui, malgré les promesses gouvernementales successives, préoccupe les parlementaires.