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Habitat - Loi Dalo : la Halde juge "discriminatoires" les conditions imposées à certains étrangers

La Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (Halde) a jugé "discriminatoires" les conditions de résidence imposées aux étrangers non communautaires pour faire valoir leur droit au logement opposable.
La loi du 5 mars 2007 (loi Dalo) prévoit que "le droit à un logement décent et indépendant (…) est garanti par l'Etat à toute personne qui, résidant sur le territoire français de façon régulière et dans des conditions de permanence définies par décret en Conseil d'Etat, n'est pas en mesure d'y accéder par ses propres moyens ou de s'y maintenir" (Code de la construction et de l'habitation, L.300-1). Peuvent engager une procédure Dalo les personnes qui sont soit en situation d'urgence (dépourvues de logement, menacées d'expulsion, handicapées, etc.), soit dont la demande de logement social est en attente depuis un "délai anormalement long".
Français et ressortissants communautaires peuvent donc saisir la commission Dalo dans ce cadre. Mais pour les ressortissants non communautaires, un texte réglementaire a posé des conditions pour faire valoir leur droit : ils doivent soit être dotés d'une carte de résident ou d'un titre de résident, soit "justifier d'au moins deux années de résidence ininterrompue en France sous couvert d'un titre de séjour d'un an renouvelé au moins deux fois" (CCH, R.300-2). C'est ce dernier article qui impose des conditions de résidence, que la Halde a jugé discriminatoire.

La Halde estime en effet que cette disposition du Code de la construction et de l'habitation est contraire :
1) à la jurisprudence du Conseil constitutionnel ;
2) à la Charte sociale européenne du Conseil de l'Europe (article 31) ;
3) à la convention C97 révisée de l'Organisation internationale du travail relative aux travailleurs migrants du 1er juillet 1949 (article 6) ;
4) au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966 ;
5) aux articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH).
Ainsi, "la condition d'une résidence préalable de deux ans au moins pour pouvoir soumettre un dossier à la commission chargée de la procédure Dalo, condition de résidence préalable imposée aux seuls ressortissants non communautaires, apparaît comme un traitement défavorable fondé sur la nationalité qui n'apparaît pas justifié et proportionné à l'objectif poursuivi par la loi Dalo qui est de garantir le droit à un logement décent pour les personnes les plus démunies".
La Halde recommande donc au secrétaire d'Etat chargé du logement et de l'urbanisme d'abroger cet article. La Haute Autorité ayant seulement un "pouvoir de recommandation", Benoist Apparu n'a pas l'obligation de respecter cet avis et de publier le décret modifiant l'article R.300-2 du CCH. Le ministère n'a pas encore réagi à la publication de cet avis.

 

Hélène Lemesle

 

Références : Délibération n°2009-385 du 30 novembre 2009 de la Halde