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Logement social - Livret A : la France dépose son recours

Comme l'avait annoncé Matignon le 19 juin, la France devait déposer ce 23 juillet son recours devant la Cour de justice européenne de Luxembourg pour contester la demande de la Commission européenne d'étendre à toutes les banques la distribution des Livrets A et Bleu. Bruxelles avait demandé le 10 mai que soit mis fin à l'exclusivité de distribution dont bénéficient actuellement la Banque postale et le groupe Caisse d'épargne pour le Livret A, et le Crédit mutuel pour le Livret Bleu.
Le recours est fondé sur trois points principaux, qui répondent à ceux exposés par Bruxelles. Le premier concerne la définition du "marché pertinent", autrement dit le marché de référence utilisé pour juger du poids des Livret A et Bleu en France. Tandis que Bruxelles considère le marché de l'épargne liquide comme référent, la France souhaite utiliser le marché des services bancaires en général, ce qui dilue sensiblement le poids relatif des Livrets A et Bleu. Le deuxième argument porte sur les "droits spéciaux" de distribution des Livret A et Bleu. La France fait valoir que ces droits "ne constituent pas une entrave à la liberté d'établissement", tandis que la Commission les qualifie d'"anomalie préjudiciable au développement de conditions de concurrence équitables". Le troisième point concerne "des désaccords techniques" sur l'évaluation du coût pour les finances publiques des services d'intérêt économique général (SIEG) que sont l'accessibilité aux services bancaires et le logement social, dont le financement repose en partie sur le Livret A. Bruxelles estime que l'ouverture de la distribution des livrets n'entraînerait pas forcément de surcoût pour les finances publiques.
Le recours de l'Etat intervient alors que le gouverneur honoraire de la Banque de France, Michel Camdessus, a déjà entamé ses consultations sur la réforme de la distribution des Livrets A et Bleu, à la demande de Bercy. Il devrait remettre ses conclusions mi-décembre, soit deux mois environ avant la date limite fixée par Bruxelles pour l'ouverture. En cas de rejet du recours, la France disposerait ainsi d'éléments pour l'aider à mettre en oeuvre la réforme.
L'une des grandes questions est évidemment l'influence de la banalisation du Livret A banques sur le volume de la collecte. Les grands acteurs du logement social, tels que l'Union sociale pour l'habitat (USH) et la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS), mettent en avant un réel risque lié à la "cannibalisation" des plus gros livrets (les banques attirant chez elles les livrets existants mais proposant ensuite aux épargnants de transférer cette épargne vers d'autres supports). Un risque que Bruxelles juge très "aléatoire".

Avec AFP