L'extension des aides bon débit aux zones FTTH privées, un aveu d'échec ?
L'aide à l'équipement en kit hertzien devrait être étendue aux oubliés de la fibre des zones d'initiative privée en 2024 et 2025. Sans s'y opposer formellement, l'Avicca, la FNCCR et Départements de France dénoncent "un aveu d'échec" du gouvernement et s'interrogent sur les répercussions possibles de cette décision sur les obligations de complétude FTTH des opérateurs.
Le guichet cohésion numérique des territoires, destiné à aider les personnes privées de connexion haut débit (soit plus de 30 Mbit/s), devrait être étendu aux zones privées. Cette évolution du dispositif est défendue la direction générale des entreprises (DGE) dans une consultation publique qui se terminait ce 27 juillet 2023. Pour mémoire, ce programme vise à faciliter l'accès au "bon débit" des foyers et entreprises mal desservis par les réseaux filaires, via des technologies sans fil, dans l'attente de l'arrivée de la fibre dans leur commune. L'État finance l'installation et la mise en service d'un kit 4G fixe, radio ou satellitaire, dans la limite de 300 euros par foyer. Un montant directement déduit par les opérateurs proposant ces offres labellisées.
Prolongation jusqu'à fin 2025
Jusqu'à présent, cette aide était réservée aux seules communes de la zone d'initiative publique comprenant au moins un local sans "bon haut débit" filaire (moins de 8 Mbit/s), soit près de 28.000 communes, pour l'essentiel des petites villes ou des communes rurales. La DGE propose de prolonger le dispositif en 2024 jusqu'au 31 décembre 2025 en y apportant deux ajustements. D'une part, l'extension de l'aide aux zones privées "ce qui se traduit par un passage du nombre de locaux éligibles de 3 à 7 millions" évalue la DGE. D'autre part, elle assouplit le critère d'éligibilité des foyers en prenant pour base les débits "heure de pointe" et non plus les débits de crête (faussement élevés). Par ailleurs, l'aide aux territoires d'outre-mer proposant des débits d'au moins 16Mbit/s est maintenue.
Maintenir la pression sur la complétude
Dans un communiqué commun daté du 25 juillet, l'Avicca, Départements de France et la FNCCR ont apporté leur soutien à cette modification "pour atténuer la souffrance des délaissés de la fibre" tout en soulignant qu'il s'agit d'un "terrible aveu d'échec de l'encadrement de l'initiative privée pour le déploiement du très haut débit". Les associations s'interrogent en effet sur l'intérêt de subventionner des technologies alternatives à la fibre dans des territoires qui étaient censés être naturellement couverts par la fibre par le seul jeu de l'initiative privée. Elles demandent par ailleurs au gouvernement "d'agir avec la plus grande fermeté pour la tenue des engagements pris pour la couverture en fibre optique [dans les zones Amii et Amel]". Elles expriment également la crainte que les locaux bénéficiant des aides de l'État pour être raccordés à une solution hertzienne soient exemptés des obligations de complétude FTTH. Elles demandent enfin que les aides financières ciblant les zones privées ne ponctionnent pas des fonds publics dans la mesure où "l'État n'a toujours pas mis en place de fond de péréquation pour l'exploitation des réseaux d'initiative publique".
Demande d'un bilan du dispositif
Sur le dispositif en lui-même, les associations déplorent l'absence de "bilan technique et économique" du guichet de cohésion. Elles demandent aussi la vérification de "la cohérence technique des offres" bon débit dans les zones cumulant de mauvais débits ADSL et l'absence de FTTH. Elles alertent enfin sur les enjeux concurrentiels, certains clients pouvant se trouver "enfermés" dans l'offre bon débit d'un seul opérateur.