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L'exode urbain, un double malentendu ?

L'exode urbain post-Covid a-t-il vraiment lieu ? Une nouvelle étude, commandée par le Réseau rural français avec le Plan urbanisme construction architecture (Puca), évoque un double malentendu. Loin d'être massif, l'exode correspond davantage à de petits flux - qui ont toutefois un impact en termes de dynamique territoriale - et ne concerne pas toutes les catégories de villes. L'étude signale en revanche l'émergence d'un nouveau modèle d'investissement immobilier dans les territoires ruraux.

L'exode urbain, un double malentendu ? C'est ce que semblent indiquer les premières conclusions, publiées le 17 février, de l'étude "Exode urbain : impacts de la pandémie de Covid-19 sur les mobilités résidentielles", commandée par le Réseau rural français avec le Plan urbanisme construction architecture (Puca) et opérée par le programme Popsu (plateforme d'observation des projets et stratégies urbaines). En accord avec les récents éléments d'analyse de l'économiste Olivier Bouba-Olga, responsable du pôle Datar de la région Nouvelle-Aquitaine, et contrairement à tout ce que l'on peut entendre aujourd'hui - le rêve de campagne partagé par les citadins après la crise Covid... -, l'étude confirme qu'il n'y a pas de déferlement massif de populations urbaines dans les campagnes. Et que s'il y a des départs de population, ils sont loin de concerner toutes les catégories de villes.

S'appuyant sur des données variées (leboncoin.fr, meilleursagents.com, seloger.com, les changements d'adresses déclarés à la Poste...), les chercheurs constatent en effet une grande stabilité des équilibres territoriaux précédant la crise et une confirmation des tendances lourdes préexistantes, dont l'attractivité des grands pôles urbains (Paris, Marseille, Lyon, Lille, Strasbourg...) qui concentrent population, emplois et services, l'attractivité des façades littorales et la périurbanisation. "On ne trouve pas les traces d'une réorientation géographique massive des populations à venir, et donc pas de recomposition majeure des flux vers des espaces isolés, hors des aires d'attraction des villes", indique le rapport, poursuivant : "Il n'y a donc, a priori, pas de grande rupture territoriale dans les intentions de mobilité avant et après la crise, si l'on considère l'ensemble des aspirations des internautes."

Plus qu'un exode, un ensemble de "petits flux" sortants des grands pôles urbains

D'après les chercheurs, plus qu'un exode urbain, on assisterait davantage à un ensemble de "petits flux" sortant principalement des pôles urbains de très grande taille. "Cela correspond à seulement des dizaines de ménages qui quittent les centres denses mais cela peut beaucoup compter pour la campagne", explique à Localtis Hélène Milet, responsable de programme à Popsu.

L'étude ne minimise en effet pas l'impact que peuvent avoir ces petits flux, en matière de services publics, de planification, de marché du logement et d'activités économiques. Ces petits flux "participent d'un renforcement de la dynamique, déjà en cours, d'attractivité de certaines zones périurbaines et rurales", souligne le rapport. Les gagnants, qui enregistrent un "effet Covid positif" sur leurs soldes migratoires, sont les villes petites et moyennes (moins de 50.000 habitants), les espaces périurbains ou les communes de couronne et les espaces ruraux ou les espaces hors des aires d'attraction des villes.

L'étude met aussi en avant des profils et des stratégies d'achat très différents : des ménages qui souhaitent généraliser le télétravail, souvent des cadres, et développent la "bi, voire la tri-résidentialité", des ménages qui ont un projet de transition rurale avec le développement d'une activité professionnelle nouvelle, des (pré)retraités qui ont des projets de villégiature et des populations à la précarité plus ou moins choisie en quête d'un mode de vie alternatif dans des territoires plutôt éloignés et très proches d'espaces de nature. "Une transaction immobilière ne veut pas dire un déménagement, détaille Hélène Milet, il y a une myriade de projets."

L'étude signale aussi l'émergence d'un nouveau modèle d'investissement immobilier dans les territoires ruraux. Des investissements (achats de biens anciens) qui sont réalisés pour placer son épargne et la valoriser à travers la création de gîtes ou la location de courte durée, pour disposer d'une résidence de vacances ou pour le télétravail, ou encore pour se doter d'un refuge en cas de reconfinement. Cette forme de "parisianisation des marchés locaux", comme la dénomme le rapport, se manifeste par des achats sans négociation et des paiements comptants, des pratiques peu courantes dans ces territoires où les marchés étaient jusque-là détendus.