L'exécution budgétaire sous haute surveillance

Pour éviter une nouvelle dérive des finances publiques, les ministres de l'Économie et des Comptes publics ont annoncé ce 3 mars la création d'un "comité d'alerte budgétaire" composé de parlementaires, mais aussi d'élus locaux. Couvrant tout le champ de la dépense publique, ce comité examinera "les risques d'écart aux prévisions des dépenses et recettes publiques" et "les éventuelles mesures correctives envisagées".

 

Après les dérapages du déficit public ces deux dernières années et alors que la France est sous la surveillance des agences de notation, le ministre de l'Économie, Éric Lombard, et sa collègue chargée des Comptes publics, Amélie de Montchalin, ont présenté à la presse ce 3 mars leur "plan d'action pour améliorer le pilotage des finances publiques".

"C'est un vrai tournant (…) qui se fera dans la transparence et le dialogue", a déclaré Éric Lombard. "C'est d'autant plus important (…) avec la montée des tensions internationales, qui sont telles que l'Union européenne va devoir retrouver une autonomie stratégique accrue", laquelle nécessitera de s'assurer "des marges de manoeuvre budgétaires", a-t-il ajouté.

Décidé à parvenir au respect en fin d'année de l'objectif d'un déficit public à 5,4% du PIB, Bercy a annoncé la création d'un "comité d'alerte budgétaire" pour "poser à un moment donné la photo de là où en sont nos recettes et de là où en sont nos dépenses", selon les termes d'Amélie de Montchalin. Seront présentés dans ce cadre "les risques d’écart aux prévisions des dépenses et recettes publiques" inscrites dans la loi de finances de l'année et "les éventuelles mesures correctives envisagées", précise Bercy.

Rendez-vous début avril

Cet exercice sera réalisé pour l'État, mais pas seulement, puisque la structure s'intéressera à l'ensemble de la dépense publique : État et ses opérateurs, Sécurité sociale et collectivités locales. "C'est peut-être l'un des points les plus importants", a relevé la ministre chargée des Comptes publics. Seront réunis autour de la table, "au moins trois fois dans l'année" : les ministres concernés, des parlementaires (commissions des finances et des affaires sociales, délégations aux collectivités territoriales), les représentants des associations d'élus locaux et des caisses de sécurité sociale, ainsi que le premier président de la Cour des comptes.

A leur programme : une rencontre au "début du mois d'avril" pour "dresser un état des lieux de la mise en œuvre du budget". Bercy veut ainsi prendre de l'avance sur le calendrier habituel. En effet, jusque-là cet exercice avait plutôt lieu en "juin ou juillet", avec le risque que "si vous devez prendre des mesures correctrices, vous les pren[i]ez "trop tard", a expliqué Amélie de Montchalin.

Pour alimenter les discussions, Bercy va lancer des travaux pour améliorer ses prévisions concernant les principaux impôts. Le ministère va aussi mettre au point des données plus fraîches et régulières concernant l'exécution des budgets, y compris de la sécurité sociale et des collectivités locales. Pour ces dernières, la ministre a souhaité que les données différencient les strates de collectivités, pour éviter des "grands amalgames". Le débat pourrait ainsi être "plus mature" et "sortir d'un ping-pong assez délétère où souvent État et collectivités ont un dialogue un peu de sourds sur qui est responsable de quoi dans la dépense et dans le déficit et dans la dette", a estimé la ministre.

Collectivités "impliquées" dans la construction du budget

La préparation du budget de l'État sera "plus mature et donc efficace", a-t-elle aussi considéré, en annonçant que les collectivités seraient "désormais pleinement impliquées, comme elles le demandent depuis des années", dans cet exercice. La ministre entend mettre en pratique cet engagement dès la construction du projet de loi de finances pour 2026, qui va débuter prochainement. "Les collectivités ne sont pas des filiales de l'État", a-t-elle souligné.

Pour améliorer les prévisions en matière de finances publiques, le gouvernement va installer un "cercle" d'experts, qui examinera la pertinence des hypothèses de prévisions macroéconomiques. Est en outre annoncée la création d'une mission sur "les perspectives à long terme" (2050) des finances publiques. Conduits par la Cour des comptes et France stratégie, ses travaux seront remis l'an prochain.

Le gouvernement promet également plus de transparence. Le Haut Conseil des finances publiques, instance d'évaluation indépendante, sera saisi automatiquement sur les prévisions macroéconomiques et budgétaires. Mais l'institution présidée par le premier président de la Cour des comptes ne pourra pas se saisir elle-même. En outre, une base de données sur les prévisions et l’exécution budgétaire sera publiée en libre accès.

"Conversation" avec les Français

Parce qu'il n'a "rien à cacher", Bercy va ouvrir sa "boîte noire" au plus grand nombre, s'est engagée la ministre des Comptes publics. Ce sera l'objet d'un "événement national, décliné ensuite partout en France, sous le nom de 'Notre Nation, nos finances'". Cette "conversation" avec les Français sera l'occasion de démonter les "idées reçues sur les finances publiques" et de "mettre fin aux mensonges qui sont trop souvent colportés", a-t-elle assuré.

"Ce plan et cette méthode ont comme objectif de répondre au déficit de consensus et à cette difficulté à nous mettre d'accord (…) au cours de l'année sur les mesures à prendre" pour réduire le déficit, a résumé Amélie de Montchalin. 

 

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