L'Etat et l'ADF lancent la concertation en vue d'élaborer un pacte pour la protection de l'enfance
Le secrétaire d'Etat Adrien Taquet a lancé ce mercredi 27 mars une phase de concertation sur la protection de l'enfance, avec la mise en place de six groupes de travail, pour aboutir à un "pacte national" courant juillet. Les départements y occupent naturellement une place de premier rang. L'occasion pour Adrien Taquet d'évoquer la contractualisation avec les départements ainsi que les autres travaux en cours dans le champ de l'enfance.
Adrien Taquet, le secrétaire d'État chargé de la protection de l'enfance, a lancé le 27 mars la concertation sur la protection de l'enfance. Le lancement s'est fait en présence de Dominique Bussereau, le président de l’Assemblée des départements de France (ADF), et de l'ensemble des acteurs qui interviennent dans le champ de la protection de l’enfance. Cette démarche doit servir de point de focalisation et mettre un peu d'ordre dans les initiatives qui se sont multipliées depuis la polémique autour du documentaire à charge sur l'aide sociale à l'enfance (ASE) et autour de la question des jeunes majeurs : projet de création d'une commission d'enquête sur l'ASE finalement transformée en mission d'information, mission sur les jeunes majeurs confiée à Brigitte Bourguignon, la présidente de la commission des affaires sociales de l'Assemblée, mais aussi annonce par le Premier ministre d'une contractualisation avec les départements, dans le cadre du plan Pauvreté, sur plusieurs engagements... dont l'accompagnement des jeunes majeurs (voir nos articles ci-dessous).
Une présentation du pacte prévue pour juillet 2019
Cette concertation "est une des dimensions du pacte pour l'enfance, que je souhaite proposer et décliner tout au long des prochains mois", a déclaré Adrien Taquet en présentant la démarche à la presse aux côtés de Frédéric Bierry, président de la commission Solidarité et affaires sociales de l'ADF et président du conseil départemental du Bas-Rhin. Ce pacte sera placé, comme le plan Pauvreté, sous le signe de la "lutte contre les inégalités de destins", régulièrement mis en avant par Emmanuel Macron. Le secrétaire d'État prévoit trois piliers pour structurer ce pacte : le soutien à la parentalité et la prévention, la lutte contre toutes les formes de violences faites aux enfants (avec l'annonce d'un plan spécifique à la fin du mois de mai) et, enfin, l'accompagnement des enfants pris en charge au titre de l'ASE.
La concertation lancée ce 27 mars est plus spécialement centrée sur ce troisième point. Elle se traduit par la mise en place de six groupes de travail co-présidés chacun par un président de conseil départemental et une personnalité du secteur (directeur général de la cohésion sociale, directrice de la qualité à la HAS, responsable associatif...). Thèmes retenus pour les groupes de travail : sécuriser le parcours de l'enfant, développer les modes d'accueil de type familial (comme les tiers de confiance), mieux accompagner les enfants atteints de handicaps (20% des enfants pris en charge par l'ASE relèvent aussi de la MDPH), promouvoir l'ambition scolaire des enfants, diffuser une culture de la transparence et de la qualité des lieux d'accueil - un thème sur lequel Adrien Taquet comme Frédéric Bierry ont particulièrement insisté, afin de sortir d'une certaine "omerta" - et, enfin, renforcer le pilotage de la politique publique et la participation des enfants et des familles. Sur ce dernier point, on retiendra d'ailleurs que chaque groupe de travail, d'une quinzaine de personnes, comprendra également des jeunes de l'ASE.
Le calendrier est assez serré, puisque les groupes de travail se réuniront entre avril et juin, en vue d'une restitution de leurs résultats et propositions à la fin du mois de juin. La présentation du pacte national pour la protection de l'enfance devrait ensuite intervenir dans le courant du mois de juillet.
Une reconnaissance après les accusations
Pour les départements, la concertation et la place qui leur y est accordée constituent une reconnaissance, après les accusations et les mises en cause, parfois virulentes, de ces dernières semaines. Frédéric Bierry a d'ailleurs tenu à rappeler l'engagement des départements en ce domaine : 341.000 mesures d'aide sociale à l'enfance mises en œuvre chaque année (52% de placements en établissement ou en famille d'accueil et 48% d'actions éducatives à domicile), sept milliards d'euros de dépenses pour l'ASE...
Pas question toutefois, pour les représentants de départements présents à ce lancement, de nier que la révélation des 25% de jeunes sortant de l'ASE parmi les personnes SDF a constitué un choc et qu'un certain nombre de points restent clairement perfectibles. Philippe Grosvalet, le président du conseil départemental de Loire-Atlantique, considère d'ailleurs qu'il ne faut pas s'en tenir au seul cas de l'ASE, mais rechercher des solutions plus globales pour les jeunes de 18 à 25 ans, qui ont besoin d'un accompagnement adapté. Une allusion à la proposition d'expérimentation d'un revenu de base, portée par 18 départements socialistes, mais finalement écartée par l'Assemblée nationale au profit du revenu universel d'activité (RUA).
Des démarches parallèles qui se rencontrent
Pour sa part, Adrien Taquet a donné quelques précisions sur la contractualisation avec les départements, initiée par le Premier ministre il y a un mois (voir nos articles ci-dessous des 15 et 21 février 2019). À ce jour, quinze départements ont déjà signé un contrat avec l'État et l'objectif reste de contractualiser avec la très grande majorité, sinon la totalité, des départements d'ici la fin du mois de juin. Le secrétaire d'État a confirmé que les départements signataires bénéficieraient dès 2019, sur l'axe des jeunes sortant de l'ASE, d'un financement annuel de 2.000 euros par jeune majeur, destiné à financer uniquement l'accompagnement, soit une enveloppe totale de 12 millions d'euros.
Adrien Taquet a également apporté des précisions sur l'avancement de diverses démarches parallèles qui devraient néanmoins finir par se rencontrer. Ainsi, Michèle Peyron, députée (LREM) de Seine-et-Marne doit remettre son rapport sur la PMI dans une quinzaine de jours, tandis que Stéphanie Rist, députée (LREM) du Loiret, devrait remettre celui sur l'adoption (et notamment l'adoption d'enfants de l'ASE) dans les mêmes délais.
Pour sa part, Brigitte Bourguignon contribuera à alimenter le pacte pour l'enfance sur le volet de la sortie de l'ASE. Ses travaux devraient également conduire à amender la proposition de loi sur les jeunes majeurs, déposée par elle-même et le groupe LREM et déjà adoptée en commission des affaires sociales (voir notre article ci-dessous du 12 Juillet 2018). Adrien Taquet est réservé sur l'idée d'une systématisation du statut de jeune majeur figurant dans la version originelle de la proposition de loi, mais il n'exclut cependant pas un examen du texte en séance publique au mois de mai... sous réserve que des mesures issues du Grand Débat national ne viennent pas occuper les créneaux parlementaires disponibles.