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Réforme territoriale - Les villes moyennes à l'épreuve de la réforme territoriale

La réforme territoriale inquiète les villes moyennes qui redoutent un affaiblissement au profit des grandes métropoles. Elles sont pourtant riches d'atouts et constituent l'élément essentiel qui favorise le maillage des territoires et le lien entre les collectivités, comme ont pu l'observer les 170 participants aux 12es Rencontres Entreprises et Territoires qui se sont tenues à Paris le 29 avril.

Treize régions, quatorze métropoles, de nouvelles intercommunalités, des territoires du littoral et transfrontaliers qui s'affirment. Dans cette nouvelle architecture territoriale, comment se positionnent les villes moyennes et quelles sont leurs opportunités de développement ? Pour l'heure, "c'est l'inquiétude qui domine. A tort ou à raison, les villes moyennes craignent d'être affaiblies et marginalisées," relève Didier Giard, vice-doyen de la faculté Administration et échanges internationaux de l'Université Paris-Est Créteil Val-de-Marne (Upec) et responsable du Master Administration et Management international des territoires. Ce Master organisait ce 29 avril à Paris les 12es Rencontres Entreprises et Territoires, en collaboration avec l'Institut CDC pour la Recherche (Caisse des Dépôts) et avec Villes de France (l'ex-Fédération des maires des villes moyennes). L'intitulé de ces rencontres était explicite : "Entre ruralité et métropoles, les villes moyennes au cœur de toutes les convergences".
"La réforme territoriale au 1er janvier 2016 va poser d'énormes problèmes d'organisation. Nous allons avoir, face à nous, des périmètres démesurés", affirme Gilbert Meyer, maire de Colmar, président de la communauté d'agglomération de Colmar et vice-président de Villes de France. Et pourtant, avec 600 villes, 300 intercommunalités et 32 millions d'habitants, les villes moyennes sont les "locomotives des territoires."
"Avec leur rayonnement sur 200 à 300 kilomètres, elles arrivent à fédérer les communes rurales et constituent le meilleur socle pour réorganiser le territoire", ajoute Gilbert Meyer. Et Didier Giard de compléter : "Elles constituent l'élément essentiel qui favorise le maillage des territoires et le lien entre les collectivités." Le destin des métropoles et celui des villes moyennes sont ainsi liés, observe Marc Abadie, directeur du Réseau et des territoires de la Caisse des Dépôts. "Si le lien se fait de manière dynamique, la capacité de rebond des territoires sera plus forte : si l'on rebondit de Toulouse à Cahors, on pourra rebondir de Cahors à Figeac." Et de Figeac à Toulouse. Cette "fertilisation croisée" génère "une dynamique de développement sur les territoires," observe Jean-Pierre Saulnier, ancien président du conseil général du Cher et co-animateur des Nouvelles Ruralités.

Développer les solidarités

A condition que ce maillage territorial "repose sur les solidarités", insiste Marc Abadie. "C'est dans ce sens-là que la Caisse des Dépôts doit travailler en partenariat avec les élus." Il faut en particulier, dit-il, "organiser une meilleure offre de service public sur les territoires et assurer l'égalité territoriale". D'après des données des Nouvelles Ruralités sur les besoins et les demandes des micro-territoires, cette solidarité devrait s'exercer dans trois domaines : l'éducation (ces territoires souhaitent sauvegarder leur école, leur collège, les activités périscolaires, le sport, les activités intergénérationnelles) ; les services publics et au public (garder la Poste, la boulangerie, la maison de santé pluridisciplinaire, le garage, le maçon, etc.) ; et la mobilité. "Du covoiturage au réseau de bus, c'est une demande très forte des habitants et des salariés des entreprises implantées à la campagne", souligne Jean-Pierre Saulnier.
Les villes moyennes sont inquiètes. "Surtout celles qui n'ont pas trouvé d'activité de niche", observe Didier Giard, citant l'exemple d'Orléans (certes en réalité comptée parmi les grandes villes) qui a su devenir le premier centre français de pharmacie. Les villes du littoral recèlent elles aussi de nombreux atouts. "Le littoral a ce privilège : les habitants répondent ensemble aux problèmes qui se posent. Il n'y a pas une bataille de pouvoir mais un partage de vision", assure Catherine Bersani, inspectrice générale honoraire de l'équipement, expert chez LittOcéan. C'est ce que l'on appelle "la gestion intégrée de la zone côtière, un exemple de mise en réseau des acteurs et des territoires" où les villes moyennes jouent un rôle important. Ces zones littorales ont souvent su préserver des îlots de richesse autour des villes, comme en Vendée, territoire qui a maintenu des industries traditionnelles particulièrement dynamiques et dont la réputation dépasse les frontières de l'hexagone avec par exemple l'industrie des hameçons ou des filets de pêche de fuel. "La création de réseaux repose sur les pôles d'échanges et les villes moyennes sont cela. Ce sont des villes où l'on se parle car on se connaît", martèle Catherine Bersani. Elles constituent "un réseau des pensées".
Les actes du colloque seront disponibles cet automne.