Les sénateurs adoptent la PPL Bien Vieillir et attendent la "grande loi"
Sans grande conviction mais reconnaissant des avancées, les sénateurs ont adopté ce 6 février la proposition de loi sur le bien vieillir. Une trentaine d’articles ont été supprimés et un amendement rendant facultative la réforme des services autonomie à domicile a été adopté. La corapporteure Jocelyne Guidez ne juge cependant "pas opportun de remettre en cause cette réforme bien avancée".
Les sénateurs ont adopté, ce 6 février, le texte sur le bien vieillir rebaptisé "proposition de loi portant diverses mesures relatives au grand âge et à l’autonomie". Avec 233 voix pour et 17 contre, la PPL a été largement soutenue, mais pas par le groupe communiste (opposition) ni par les écologistes et les socialistes (abstention).
"Cette proposition de loi ne répond que très partiellement aux enjeux du vieillissement de la population", a souligné Jean Sol (LR, Pyrénées-Orientales), corapporteur du texte au Sénat. S’ils reconnaissent que le texte comporte des avancées, les sénateurs insistent sur l’urgence d’une "grande loi" grand âge-autonomie porteuse d’une vision globale des enjeux et d’une programmation des moyens. Cette loi de programmation devant être présentée au Parlement d’ici fin 2024 est inscrite dans la PPL ; cela "vous oblige", a affirmé Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales, à l’adresse de Catherine Vautrin, ministre du Travail, des Solidarités et de la Santé.
Des modifications portant notamment sur les Ehpad
À l’issue de l’examen sénatorial, le texte comporte presque moitié moins d’articles que la version qui avait été adoptée par les députés en novembre dernier (voir notre article). En commission des affaires sociales (voir notre article) ou en séance, les sénateurs ont apporté plusieurs modifications, dont le fait d’inclure le soutien du passage du permis de conduire dans l’aide à la mobilité des professionnels de l’aide à domicile – une aide qui sera attribuée par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) aux départements.
Autres apports du Sénat : le fait de "prévoir un avis du président du conseil départemental sur la nomination des directeurs d’Ehpad publics par l’agence régionale de santé" (ARS) ; l’introduction d’un volet portant sur l’accompagnement des personnes en situation de handicap vieillissantes dans le projet d’accompagnement partagé des futurs groupements territoriaux sociaux et médicosociaux (GTSMS) ; le fait d’attribuer un "caractère absolu" au droit de visite en Ehpad, y compris en période de crise sanitaire ; la modulation du tarif hébergement en fonction des ressources pour les résidents d’Ehpad ne relevant pas de l’aide sociale à l’hébergement (ce qui conduira à "réduire davantage le nombre de places réservées aux bénéficiaires de l’ASH", a alerté la sénatrice communiste Cathy Apourceau-Poly).
Services autonomie à domicile : le risque d’"un coup d’arrêt à une réforme d’ampleur"
Un amendement de Corinne Imbert (LR, Charente-Maritime) a fait bondir les fédérations d’aide à domicile. Considérant que la réforme actuelle des services autonomie à domicile mettait les services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) en difficulté, l’amendement rend facultative la transformation des Ssiad en services proposant à la fois de l’aide et du soin. En pratique, cela dispense les Ssiad d’avoir à fusionner, d’ici le 30 juin 2025, avec un service d’aide et d’accompagnement à domicile (Saad) ou d’avoir à développer directement une activité d’aide à domicile autorisée par le département.
"C’est vraiment mettre un coup d’arrêt à une réforme d’ampleur qui pour nous va incontestablement dans le bon sens", réagit auprès de Localtis Vincent Vincentelli, directeur des politiques publiques de l’UNA. Il explique : "Les difficultés sont réelles mais l’enjeu est de trouver les moyens de les surmonter pour faire aboutir la réforme." Cette dernière est jugée nécessaire en premier lieu pour offrir aux personnes des services "sous forme de guichet unique" mais aussi pour renforcer le secteur et proposer "de vrais parcours professionnels entre l’aide et le soin", poursuit le représentant de l’UNA. Il rappelle que le cahier des charges publié l’été dernier (voir notre article) a fait l’objet d’un travail de coconstruction d’un an entre l’État, les fédérations, des représentants des départements et des ARS.
La disposition est d’ailleurs précédée d’un autre article - ajouté par les sénateurs - apportant de la souplesse à la transformation attendue, en permettant notamment à des services de se rapprocher dans le cadre d’une convention d’une durée maximale de trois ans. Cela pour préparer la fusion dans un service autonomie à domicile, avec un délai supplémentaire.
"Il ne semble pas opportun de remettre en cause cette réforme bien avancée", a considéré la corapporteure Jocelyne Guidez (UC, Essonne), ce 6 février lors de l’explication de vote. Elle assure qu’elle veillera, dans la suite de l’examen, à ce que soient prévues des mesures d’accompagnement des Ssiad dans cette réforme.
Prochaine étape pour cette PPL : la tenue d’une commission mixte paritaire (CMP) entre sept députés et sept sénateurs, pour aboutir à une version commune du texte.