Les régions réclament à l'État un soutien de 350 millions d'euros pour leurs investissements
La présidente de Régions de France, Carole Delga, a plaidé le 16 janvier pour le financement par l'État d'un fonds de 350 millions d'euros et la substitution des "impôts automobile" revenant aux régions par une "fiscalité économique dynamique", le tout dans le but de soutenir les investissements régionaux. Dans un contexte difficile pour les régions, ceux-ci devraient baisser en 2024, s'est-elle inquiétée.
"La situation financière" des régions est "particulièrement préoccupante", s'est alarmée la présidente de la région Occitanie lors d'une audition par la commission des finances de l'Assemblée nationale. Du fait de l'"augmentation des dépenses de carburant à travers les services de mobilité" et de "l'explosion des dépenses liées à l'énergie sur les bâtiments publics", les finances des régions sont passées dans le rouge en 2023. Leurs dépenses de fonctionnement ont dépassé l'an dernier leurs recettes de fonctionnement d'"un milliard d'euros". Dans le même temps, les recettes d'investissement ont augmenté, mais "pas suffisamment".
"Il va y avoir dans l'exécution du budget 2024 des conséquences", a prévenu Carole Delga. Selon qui la situation actuelle "demande à de nombreux présidents de région de réduire la voilure au niveau de l'investissement".
Ayant pris à l'été 2020 l'engagement (voir notre article du 30 juillet 2020) d'accélérer leurs investissements – en contrepartie du remplacement de leurs recettes de CVAE par de la TVA – les régions ont accru leurs investissements de "20%" au total sur la période 2019-2022, participant ainsi à la relance. "Nous voulons continuer à investir massivement", a souligné la présidente de Régions de France. Mais les régions n'en auront vraisemblablement pas les moyens. Or, "quand les régions investissent moins, c'est un investissement moindre pour la question de l'emploi, les mobilités et les énergies renouvelables", a déploré l'élue. Qui a dit "alerter le gouvernement".
"Pacte d'engagement"
Autre question mise sur la table par Carole Delga : le "panier de ressources fiscales lié à l'automobile", qui est "dépassé" et "en diminution". Réduction des ventes de véhicules neufs, progression de la part des véhicules électriques… La taxe sur les certificats d’immatriculation a reculé de 400 millions d'euros entre 2019 et 2022, pour atteindre un peu moins de 2 milliards d'euros. La taxe intérieure sur les produits énergétiques (Ticpe) connaît aussi une "perte de dynamisme", indiquent les "chiffres clés des régions 2023", une publication de Régions de France. "Nous partageons la nécessité que [ces impôts] soient en diminution pour des questions de pollution", mais ils doivent "être substitués par une autre part d'impôt", a jugé Carole Delga. Qui s'est prononcée pour l'affectation à leur place d'un "impôt lié à la dynamique économique". Les présidents de région veulent travailler à ce chantier avec le gouvernement.
Ils réclament également, du fait de la situation, la préparation d'un "pacte d'engagement" avec l'exécutif sur un "fonds d'investissement" de "350 millions d'euros", afin de "pouvoir répondre aux enjeux de transition écologique, énergétique". Cette enveloppe est d'autant plus nécessaire que les régions ne sont pas éligibles au fonds vert, dispositif qui pour l'essentiel bénéficie aux communes et à leurs groupements, a souligné Carole Delga. Les discussions sur la création de ce fonds avaient débuté en décembre avec la Première ministre de l'époque, Élisabeth Borne. "Nous allons les poursuivre dès la fin du mois de janvier avec Monsieur le Premier ministre Attal", a dit la présidente de Régions de France. Le rendez-vous entre la présidente de Régions de France et le nouveau locataire de Matignon est d'ores et déjà fixée au "29 ou 30 janvier".
Avec le remplacement en 2021 de la CVAE régionale par de la TVA, les régions ont enregistré un gain "de l'ordre de 1,2 à 1,3 milliard d'euros", selon le rapporteur général de la commission des finances, Jean-René Cazeneuve. "C'est une illustration assez claire, sonnante et trébuchante du soutien de l'État aux régions", a-t-il estimé. Au total, du fait de bonnes rentrées fiscales, l'épargne brute des régions (c'est-à-dire la différence entre les dépenses et les recettes de fonctionnement) "a augmenté de 17%" entre 2017 et 2022, a indiqué le député de la majorité. Tout en reconnaissant que "2023 risque d'être un peu moins bon".
2 milliards d'euros d'économies avec la fusion des régions
Alors que l'exécutif a chargé l'ex-ministre du Budget Éric Woerth de préparer des propositions sur la décentralisation, la présidente de Régions de France a aussi été interrogée sur la fusion des régions au 1er janvier 2016. "Le bilan des grandes régions au niveau économique est positif", a-t-elle soutenu, mettant en avant "une capacité d'entraînement beaucoup plus forte sur les filières économiques" et "un travail mieux organisé avec les consulaires, les branches professionnelles". "Les régions, en particulier les régions fusionnées ont pu faire des économies sur les dépenses de fonctionnement en mutualisant de nombreux services, en particulier les fonctions support", a également souligné Carole Delga. Ces économies chiffrées par Régions de France "à 2 milliards d'euros" ont "été affectées prioritairement sur l'investissement dans les mobilités".
Sur les "compétences partagées" que sont la culture, le tourisme et le sport, Carole Delga s'est prononcée pour la poursuite de l'intervention de l'ensemble des collectivités, mais avec la désignation d'une collectivité "chef de file", rejetant ainsi l'idée d'une "spécialisation".
La date de la "réunion de travail entre Éric Woerth et les présidents de région ne sera fixée que "d'ici 15 jours ou trois semaines". Ces derniers ont donc encore un peu de temps pour peaufiner leurs propositions.