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Les OPH débutent une nouvelle relation avec les collectivités

La Fédération des OPH (offices publics de l'habitat) s'est réunie en assemblée générale les 23 et 24 mai 2019 au Mans. Le président, Marcel Rogemont, a signé une charte pour développer "de nouvelles capacités d'action" avec les représentants de cinq associations d'élus. Une résolution pointant "l'échec de la politique du logement du gouvernement" a été adoptée.

Dans sa résolution adoptée le 24 mai au Mans, lors de son assemblée générale 2019, la Fédération des OPH dénonce "le double échec de la politique du logement du gouvernement". "Double échec" parce que "moins d’offre à bas loyer créée" d'une part et "moins de rénovations énergétiques" d'autre part, qui constituent "autant de gains de pouvoir d’achat perdus pour des millions de nos concitoyens".

"Effectivement, depuis deux ans, le monde du logement social a subi deux chocs, institutionnel et financier, et beaucoup d’efforts ont été demandés à l’ensemble des acteurs que vous représentez", a reconnu Julien Denormandie quelques heures après l'adoption de la résolution. Après des mois de négociations autour de la clause de revoyure, conclue il y a tout juste un mois (voir nos articles ci-dessous des 24 et 25 avril 2019), le ministre a tenu un discours d’apaisement.

C'est que le choc fut aussi émotionnel. "Nous avons été surpris du regard porté par l'État sur notre métier, nous laissant interrogatifs sur notre place dans l'action au profit des ménages modestes", a rapporté Marcel Rogemont, président de la Fédération.

Six demandes au gouvernement

Aujourd'hui, les OPH se disent prêtes à "relever les cinq défis majeurs que sont la construction neuve, le changement climatique et donc celui de la rénovation énergétique, la rénovation des grands quartiers populaires, la prise en compte des besoins spécifiques des jeunes et des personnes âgées et la proximité avec les habitants et les collectivités locales". Mais pour cela, elles formulent six demandes au gouvernement (voir notre encadré ci-dessous), dont la plupart ont peu de chances d'aboutir : supprimer la RLS, indexer l'APL sur l'inflation, imposer au moins un OPH par département, possibilité pour les OPH de déroger au seuil de regroupement à 12.000 logements lorsque le chiffre d'affaires dépasse 40 millions d'euros…

Dans le cadre des futurs débats sur le nouvel acte de décentralisation à venir, la fédération prévient dans sa résolution qu'elle défendra âprement l'idée de "l’utilité de disposer d’organismes d’HLM locaux intrinsèquement liés aux collectivités locales". Car l'OPH est "une organisation gérée par des élus locaux qui souhaitent, par notre présence, être acteurs de l'acte de construire", a rappelé Marcel Rogemont, "Ainsi, nous participons au déploiement des politiques locales de l'habitat mais aussi, par cette proximité avec élus, à nourrir leurs politiques." Par exemple, "sans office à leur disposition, comment les élus résisteront-ils aux impératifs de gestion des grands groupes ?", a-t-il menacé.

Une charte entre les OPH et les élus locaux

Les associations d'élus locaux ont, depuis le premier "choc" de la politique gouvernementale (la première baisse des APL à l'été 2017), été aux côté des organismes HLM et des OPH en particulier. Avec plus ou moins d'ardeur. Les prises de position avaient été particulièrement virulentes lors du congrès HLM 2017 à Strasbourg, l’Association des maires de France avait assuré de son "soutien", l'ADCF de "sa solidarité" et un collectif de maires s'était monté autour d’une pétition en ligne (voir notre article "Congrès HLM 2017 - Julien Denormandie très chahuté, la contestation s'organise contre les dispositions du projet de budget logement" du 28 septembre 2017).

Au Mans, quatre représentants d'associations d'élus du bloc local (AMF, ADCF, France urbaine, Villes de France) et un représentant de l'Assemblée des départements de France (ADF) ont signé avec Marcel Rougemont une charte intitulée "Élus locaux, avec les OPH, développer de nouvelles capacités d'action". Il y est dit notamment : "Les communes, leurs groupements et les départements s'appuient au premier chef sur les offices pour agir au service des habitants aux ressources faibles, modestes ou moyennes qui éprouvent des difficultés à se loger convenablement et assurer la cohésion sociale et territoriale."

Huit engagements auprès des élus locaux

"Nous avons besoin des offices en tant qu’acteurs généralistes pour tous les territoires, y compris non tendus", a déclaré à cette occasion Jean-Paul Bret, vice-président de l'ADCF, en déclarant les élus communautaires "prêts à un nouvel acte de décentralisation" en matière de politique publique du logement. "Si le nouvel acte de décentralisation permet de mettre en place des nouvelles stratégies collectives du logement et de l’habitat répondant aux besoins de chacun des territoires, il sera bénéfique", a abondé le maire d'Arras, Frédéric Leturque, secrétaire général de Villes de France.

Dans la charte, les OPH s'engagent sur huit points : la qualité de service rendu au locataire HLM ; être les "chevilles ouvrières" des projets Anru et "Cœur de ville" ; la transition énergétique ; décliner les politiques publiques locales dans des plans pluriannuels signés entre OPH et collectivités ; développer de nouveaux services, notamment auprès des personnes âgées, personnes handicapées, victimes de violence conjugale… ; favoriser l'accès au logement des jeunes, des salariés, notamment des travailleurs précaires.

De nouvelles interventions pour le compte des collectivités

Les OPH s'engagent également à élargir la gamme de leurs interventions auprès des collectivités : production et gestion des équipements locaux d'intérêt général, études d'ingénierie urbaine, opérations de construction et d'aménagement. La charte cite en exemple des équipements accueillant des services publics tels que des crèches, des écoles ou encore des maisons de santé.

Enfin, les OPH s'engagent à renforcer la complémentarité entre leurs équipes et celles des collectivités. "Conformément au principe de subsidiarité des politiques publiques, les offices soutiennent toutes les mesures propres à rapprocher les lieux de décision des citoyens", est-il également écrit.

Une instance partenariale sera créée pour évaluer les nouvelles actions locales allant dans le sens de la charte. Et éventuellement les réorienter, parallèlement aux débats sur le nouvel acte de décentralisation.

Les six demandes des OPH au gouvernement

Dans une résolution adoptée le 24 mai 2019, les offices publics de l'habitat (OPH) formulent six demandes au gouvernement. D'abord, "que la baisse des APL financée par les loyers des locataires soit supprimée", en d'autres termes : supprimer la RLS  introduite par la loi de finances 2018. La Fédération ne décolère pas : "C’est 1,3 milliard d’APL en moins par an en 2020, 21 et 22, soit en moyenne 650 euros par locataire bénéficiaire de l’APL !" rappelle-t-elle. "C’est une mesure qui rompt le pacte républicain en organisant une solidarité entre les plus pauvres et prive les organismes d’HLM des moyens pour investir", estime-t-elle toujours. Elle demande également que l’APL soit à nouveau indexée sur l’inflation.
Elle voudrait que tous les investissements HLM bénéficient de la TVA à 5,5%. Il faudrait également une fiscalité qui favorise la libération du foncier en zone tendue et que la mise à disposition du foncier public par l’Etat se fasse à des prix "compatibles avec ceux du logement HLM".
Plus originale, la Fédération demande que les collectivités locales puissent souscrire des titres participatifs émis par les offices pour soutenir leurs investissements. Elle espère que ces titres participatifs, considérés comme des quasi-fonds propres, provoqueront un effet de levier. Pour rappel, dans son plan Logement 2 (voir notre article "La Banque des Territoires détaille son Plan logement 2" du 9 mai 2019), la Caisse des Dépôts s’engage à souscrire des titres participatifs émis par les bailleurs sociaux ( et "principalement les OPH") à hauteur de 800 millions d'euros, d'ici à 2022.
Enfin, la fédération demande d'ajuster la loi Elan pour qu’il puisse y avoir au moins un office par département et que le seuil des 40 millions de chiffre d’affaires dérogatoire au seuil des 12.000 logements qui s’applique aux seules EPL, soit étendu à tous les organismes d’HLM.

 

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