Archives

Innovation - Les mesures de Jean-Marc Ayrault pour relancer l'innovation en France

A l'occasion d'un déplacement le 8 avril 2013 dans l'Indre-et-Loire, Jean-Marc Ayrault a dévoilé les mesures envisagées pour développer l'innovation en France. Au programme : un programme expérimental d'innovation de rupture, une commission "Innovation 2030" chapeautée par Anne Lauvergeon qui viendra alimenter la réflexion du futur Commissariat général à la stratégie et à la prospective. Ce dernier sera installé "très prochainement".

La France est classée onzième en Europe et seizième au niveau mondial en termes d'investissement dans l'innovation... Partant de ce constat, le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault,  a dévoilé les premières mesures qu'il compte mettre en oeuvre pour remonter la pente, à l'occasion d'un déplacement dans l'Indre-et-Loire, lundi 8 avril. "La France a les moyens de tirer son épingle du jeu de la mondialisation et de renouer avec le progrès économique et social", a-t-il ainsi affirmé, s'appuyant sur la visite de deux entreprises très dynamiques en matière d'innovation et d'exportation, TLD et STMicroelectronics, accompagné de plusieurs ministres.
Le Premier ministre a ainsi annoncé la création d'une commission "Innovation 2030", présidée par l'ancienne PDG d'Areva Anne Lauvergeon, et placée sous l'égide du ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg. Le Premier ministre veut ainsi renouveler l'expérience du rapport Gallois qui a préfiguré le pacte de compétitivité de janvier.
Composée de scientifiques, d'entrepreneurs et d'économistes, cette nouvelle commission sera chargée de "réfléchir à la manière dont la France doit se préparer, sur le plan technologique et industriel, à répondre aux nouveaux besoins qui naîtront, dans les vingt prochaines années, des évolutions de nos modes de vie et de consommation, mais aussi des impératifs écologiques", a encore détaillé le Premier ministre. Elle devra aussi identifier les secteurs prioritaires, définir les moyens pour encourager l'innovation et suivre les projets. "Ses travaux nourriront la réflexion du Commissariat général à la stratégie et à la prospective que j'installerai très prochainement", a signalé enfin Jean-Marc Ayrault. Un rapport qui s'ajoutera à celui de Jean-Luc Beylat et Pierre Tambourin sur la politique de transfert et d'innovation publié vendredi 5 avril (voir encadré ci-dessous).

Innovation "de rupture"

Le Premier ministre a par ailleurs détaillé le programme expérimental d'innovation dite "de rupture", annoncé par Arnaud Montebourg en début d'année. Doté de 150 millions d'euros, issus du programme des investissements d'avenir, et alimenté à l'avenir par des fonds privés, il sera destiné à "stimuler la créativité de nos entreprises dans quelques secteurs stratégiques, qui occuperont une place centrale dans l'économie et la société de demain", a expliqué Jean-Marc Ayrault. Un concours d'innovation sera lancé à cet effet. "Les projets les plus prometteurs seront accompagnés dans la durée jusqu'à leur industrialisation et l'ensemble des instruments publics seront mobilisés et mis en cohérence pour accélérer leur développement et faire émerger les champions de demain", précise le ministère du Redressement productif, dans un communiqué.
Les entreprises ont aussi de fortes attentes en matière de simplifications, qu'il s'agisse des labels mais aussi du maquis des quelque "3.000 aides" à leur disposition, recensées par le Premier ministre (sur le sujet un audit est en cours dans le cadre de la modernisation de l'action publique). "Ce que nous demandent nos clients c'est le 'single point of contact', et c'est ce que nous aimerions avoir au niveau des aides, explique ainsi un cadre commercial de TLD, fabricant de tracteurs d'avion écologiques. Nous travaillons avec des structures humaines très légères, il faut que les aides soient plus accessibles, plus centralisées." Sans quoi ces entreprises, qui ont pourtant un fort potentiel d'innovation et d'exportation (95% des produits de TLD sont exportés), passent derrière les grands groupes, mieux outillés pour monter les dossiers en matière d'aide...

Un premier bilan du pacte de compétitivité

La question des relations entre les petites entreprises et les grands groupes est d'ailleurs régulièrement mise en avant. "Nous souhaitons que l'on fasse la promotion des filières pour qu'on puisse s'adosser à de grands groupes", demande ainsi Valentin Schmitt, directeur général de TLD.
Au-delà de ces mesures, Jean-Marc Ayrault a annoncé un premier bilan, le 18 avril, du pacte national pour la croissance, la compétitivité, et l'emploi six mois après son lancement. "Le temps est venu d'évaluer sa mise en oeuvre et d'en dresser un premier bilan, a ainsi souligné le Premier ministre. Le gouvernement se réunira la semaine prochaine pour faire le point, sur la base du rapport de Louis Gallois."
En ce qui concerne le crédit impôt compétitivité emploi (Cice), principal outil de ce pacte, Oséo, la future branche financement de la Banque publique d'investissement, se félicite d'un bon démarrage. Au 8 avril 2013, 473 préfinancements ont déjà été accordés, pour un montant de 101 millions d'euros. Plus de 1.000 dossiers sont en phase de finalisation pour un montant de plus de 300 millions d'euros. "Le préfinancement du Cice rencontre actuellement un fort succès", assure ainsi Oséo dans son communiqué du 8 avril, avec près de 200 demandes supplémentaires par semaine auprès d'Oséo.

Emilie Zapalski
 

Innovation : un rapport veut renforcer la place des regions
Dans un rapport publié le 5 février, Jean-Luc Beylat, président du pôle de compétitivité Systematic Paris-Région, et Pierre Tambourin, directeur général du Genopole d'Evry, formulent 19 propositions pour relancer l'innovation en France. Missionnés en novembre, à la suite du rapport Gallois sur la compétitivité, les deux rapporteurs concluent à "l'absolue nécessité d'une stratégie nationale élaborée et revisitée régulièrement au plus haut", alors que le dernier tableau de bord de l'Union européenne place la France au niveau des "pays suiveurs". La stratégie d'innovation "doit être globale (et non centrale) et territoriale", indiquent les rapporteurs qui ont scruté les stratégies mises en place dans 16 régions. "Le rôle de pilotage par les régions de la stratégie régionale d'innovation doit être clairement affirmé", soulignent-ils. Selon eux la politique des pôles de compétitivité commence à porter ses fruits. Ils recommandent de conforter les "écosystèmes d'innovation locaux".
La France dispose d'une recherche de qualité mais elle pèche au niveau du transfert, c'est-à-dire le passage des inventions à l'innovation. Le rapport recommande d'agir principalement à ce niveau, notamment en favorisant la mobilité des chercheurs entre public et privé.
Le soutien à la croissance des entreprises innovantes est présenté comme le "maillon crucial" de la chaîne de l'innovation. Or le rapport estime à 2 milliards d'euros le manque de financement en fonds propres des entreprises innovantes (capital-risque et capital-développement technologique). Il propose de mobiliser 2% sur les 100 à 120 milliards d'euros de la collecte des contrats d'assurance-vie des Français au profit de fonds de fonds gérés par la Banque publique d'investissement (BPI). Celle-ci "aura pour mission de participer à la constitution de fonds de capital-innovation de grande taille (plusieurs centaines de millions d'euros), qui seuls seront à même d'assurer les besoins de financement des entreprise de croissance innovantes". La BPI deviendrait le bras armé unique de l'Etat pour le financement de l'innovation.
Enfin, Jean-Luc Beylat et Pierre Tambourin veulent encourager "la culture de l'innovation et de l'entrepreneuriat" à travers l'apprentissage, la création de mini-entreprises à l'école, l'attractivité des talents étrangers…
M.T.