Développement durable - Les intercommunalités "à la manoeuvre" sur le Grenelle
"70% des mesures concrètes pour lutter contre les gaz à effet de serre relèvent de notre compétence et nous sommes à la manœuvre pour engager les grands chantiers du développement durable", a déclaré Daniel Delaveau, président de l'Assemblée des communautés de France (ADCF), en introduisant les treizièmes rencontres Intercommunalité et Environnement qui se sont tenues le 9 juin à Paris. La déclinaison du Grenelle dans les territoires et l'évolution vers un nouveau modèle économique pour le service public de l'eau et de l'assainissement étaient au menu de cette manifestation. A quelques jours de l'examen du projet de loi Grenelle 2 en commission mixte paritaire au Parlement, deux des rapporteurs du texte, Dominique Braye, sénateur des Yvelines et président de la communauté d'agglomération Mantes-en-Yvelines, et Bertrand Pancher, député de la Meuse, sont venus expliciter les enjeux de cette boîte à outils. "Le Grenelle 2 n'est que la transposition juridique du Grenelle 1 et il y aura entre 500 et 1.000 décrets d'application à venir", a souligné Bertrand Pancher. Il a aussi insisté sur les défis à venir en termes de gouvernance. "Quand on va décliner les objectifs au niveau régional, pour la trame verte et bleue, par exemple, il faudra mettre d'accord tous les acteurs, c'est maintenant de la démocratie locale." "Nous avons de la réglementation, des mesures fiscales mais, a-t-il reconnu, on n'a pas réglé le partage des compétences entre l'Etat et les collectivités et entre les collectivités elles-mêmes."
Pour les élus locaux, la question des moyens financiers reste essentielle. Daniel Delaveau a rappelé que le groupe de travail Carrez-Thenault sur la maîtrise des dépenses locales avait mis en évidence "le caractère inflationniste des dépenses d'environnement des collectivités". "Le verdissement des politiques locales est inéluctable et peut constituer de nouvelles opportunités de croissance, permettre le développement de nouvelles filières d'activité mais il faut aussi que cet effort reste soutenable, maîtrisable localement", a-t-il insisté. Selon les premiers résultats d'une enquête menée par l'ADCF auprès de ses 1.130 adhérents, 67% d'entre eux considèrent que le contexte actuel des réformes financières et fiscales est susceptible de freiner l'implication de leur communauté dans le Grenelle de l'environnement, contre 23% qui ne le croient pas. Par ailleurs, 89% des élus considèrent que l'Etat est un partenaire indispensable pour accompagner leur collectivité dans la mise en œuvre du Grenelle. 80% comptent également sur la région, les départements et les communes. Pour Nicolas Portier, délégué général de l'ADCF, les fortes attentes des élus à l'égard de l'Etat tient au fait qu'ils n'ont pas l'ingénierie nécessaire à la mise en œuvre du Grenelle.
Michèle Pappalardo, commissaire générale au développement durable, a assuré que les services déconcentrés du ministère de l'Ecologie, à commencer par les Dreal et les centres techniques de l'équipement, étaient en mesure d'apporter leur appui à tous ceux qui en avaient besoin. Il faudra aussi bien veiller selon elle à une bonne coordination des acteurs pour assurer la compatibilité de tous les schémas issus du Grenelle (schémas régionaux du climat, de l'air et de l'énergie, schémas régionaux de raccordement au réseau des énergies renouvelables, plans climat territoriaux, schémas de cohérence écologique, etc.).
Clôturant les rencontres, Valérie Létard, secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Ecologie, a proposé la création d'un groupe de travail réunissant des représentants du ministère et de l'ADCF pour coproduire un guide pratique "Grenelle et intercommunalités. "Il s'agira de passer au peigne fin les outils du Grenelle 2 et d'aplanir les difficultés d'application éventuelles", a-t-elle conclu.
Anne Lenormand
Les principales mesures de Grenelle 2 pour les communautés
Urbanisme et aménagement : généralisation à l'horizon 2017 des schémas de cohérence territoriale (Scot), renforcement de la portée opérationnelle des documents d'orientation et d'objectifs (DOO), introduction de seuils minimums de densité, encouragement du plan local d'urbanisme (PLU) intercommunal, mise en cohérence des différents documents de planification locaux (PLU intercommunal, plan local de l'habitat, plan de déplacements urbains), création de la trame verte et bleue, fin de l'opposabilité directe des futures directives territoriales d'aménagement et de développement durables mais possibilité
donnée aux préfets de les mettre en oeuvre via les projets d'intérêt général (PIG).
Energie et défi climatique : généralisation des plans Climat-Energie territoriaux (PCET) aux
collectivités de plus de 50.000 habitants, rénovation thermique des bâtiments publics, objectif de 23% d'énergies renouvelables dans la consommation d'énergie finale à l'horizon 2020, redéfinition du cadre de déploiement des éoliennes, possibilité pour les collectivités de valoriser des certificats d'économie d'énergie (CEE) à partir d'actions conduites sur leur
patrimoine ou dans le cadre de leurs compétences.
Politique des déchets : mise en place de plans locaux de prévention en matière de déchets, objectif de réduction de 5 kg/habitant/an du volume de déchets produit par les ménages, objectif de 45% de déchets ménagers et assimilés recyclés en 2015, possibilité d'expérimenter l'introduction d'une part incitative dans la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (Teom), création de nouvelles filières de responsabilité élargie du producteur (meubles, pneus…).
Eau et assainissement : faculté d'instituer un service public unifié de l'assainissement, capacité du service à se substituer aux particuliers pour la réalisation des travaux, objectifs de résorption des fuites des réseaux (obligation de dresser un état du patrimoine et de définir des programmes de travaux), possibilité pour les établissements publics territoriaux de bassins (EPTB) de demander le doublement de la redevance des agences de l'eau pour financer les actions des schémas d'aménagement et de gestion des eaux (Sage), possibilité de majoration de la taxe sur les eaux pluviales en vue de lui assurer un meilleur rendement.
Transports collectifs : possibilité d'instituer une taxe sur les plus-values de cession des
terrains valorisés par un projet de transport collectif en site propre (TCSP) sur un périmètre maximum de 800 m, élargissement des compétences des autorités organisatrices de transports urbains (Aotu) au vélo libre service et à l'auto-partage (qui bénéficie d'un label), voiries communales desservies par les TCSP déclarées d'intérêt communautaire, possibilités renforcées d'appels de compétences des Aotu sur voiries départementales.