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Gestion des sols - Les espaces artificialisés continuent à s'étendre

L'artificialisation des sols s'est poursuivie en France entre 2000 et 2006, mais à un rythme moins rapide qu'entre 1990 et 2000, selon les derniers résultats de Corine Land Cover, l'outil européen de suivi de l'occupation des sols, que vient de publier le Commissariat général au développement durable (CGDD).

Avec un gain de plus de 820 km2 en métropole, les espaces artificialisés, qui englobent aussi bien les zones urbaines et industrielles que les grandes infrastructures de transport et les équipements sportifs et de loisirs, y compris les espaces verts urbains, ont progressé de 3% entre 2000 et 2006. Selon l'étude "La France vue par Corine Land Cover", inventaire européen sur l'occupation biophysique des sols, publiée par le Commissariat général au développement durable (CGDD), ce grignotage, lié à l'étalement urbain, s'est fait principalement aux dépens des terres agricoles, qui ont reculé de 780 km2 entre 2000 et 2006. La surface totale de l'ensemble constitué des forêts ou autres espaces semi-naturels, des zones humides (marais, tourbières) ou surfaces aquatiques, et des sols agricoles, y compris les prairies a diminué dans toutes les régions au cours de cette période, comme cela avait été le cas entre 1990 et 2000. Mais globalement, la répartition des espaces reste pratiquement inchangée : hors régions d'outre-mer, la surface de la France est occupée majoritairement par des terres agricoles (60%) et des forêts ou autres espaces semi-naturels (34%), les sols artificialisés représentant 5% du territoire en 2006 contre 4,8% en 2000.

 

Un tissu urbain discontinu très consommateur d'espace

Les forêts et les espaces semi-naturels occupent majoritairement les zones montagneuses et la région des Landes tandis qu'ailleurs les zones agricoles dominent. Certaines régions comme le Nord-Pas-de-Calais, la Picardie mais aussi la Bretagne et les Pays-de-la-Loire apparaissent à la fois très agricoles et artificialisées, peu de surfaces étant disponibles pour les forêts et les autres milieux naturels. "L'Ile-de-France, le Nord, l'Alsace, le couloir rhodanien et le littoral en général, régions à forte densité de population permanente ou saisonnière, sont plus artificialisés que le reste du territoire", souligne l'étude qui constate aussi que la progression de l'artificialisation a lieu principalement aux alentours des grandes villes, le long des réseaux de transport et des vallées.
Le tissu urbain continu, qui ne couvre que 1,6% des sols artificialisés, est resté stable depuis 1990. Mais le tissu urbain discontinu, plus consommateur d'espace, connaît une évolution nettement plus préoccupante : il occupe les trois quarts des espaces artificialisés (21.000 km2) et son extension se poursuit globalement au rythme de 56 km2/an. Les régions les plus touchées par ce phénomène sont Midi-Pyrénées, le long des axes de transport autour de Toulouse, le Languedoc-Roussillon, la Bretagne, les Pays-de-la-Loire et près du littoral en général. Champagne-Ardenne et la Bourgogne sont les régions les plus épargnées.
Partout, les zones industrielles et commerciales continuent de s'étendre (+38 km2/an entre 2000 et 2006). L'emprise et la progression de ces zones est particulièrement forte en Ile-de-France et dans les Pays-de-la-Loire. La Corse et la Bourgogne connaissant une situation inverse. Les réseaux routiers et ferroviaires de large emprise progressent de 13 km2/an. "Rapporté à leur surface totale, ce type d'occupation des sols présente la plus forte progression relative (+19%)", note l'étude du CGDD.

 

Un fort impact sur l'environnement

"L'artificialisation soutenue des paysages entraîne la destruction d'habitats naturels, rappelle encore le CGDD. La progression rapide des réseaux de transport de large emprise a aussi tendance à fragmenter et cloisonner fortement les milieux naturels. Par ailleurs, l'extension du tissu urbain peu dense et des zones industrielles et commerciales contribue à l'accroissement des émissions de gaz à effet de serre et de la pollution atmosphérique imputables aux déplacements." De surcroît, poursuit l'étude, "l'artificialisation des sols s'accompagne souvent de leur imperméabilisation. L'amplification du ruissellement qui en résulte peut accroître les risques d'inondation, en augmentant les niveaux des crues et leur rapidité d'apparition après les précipitations".
Réalisées à partir d'images satellitaires prises en 2006, les données françaises de Corine Land Cover servent notamment aux services régionaux de l'Etat, aux bureaux d'études mais aussi aux collectivités territoriales qui élaborent leur schéma de cohérence territoriale (Scot) ou leur directive territoriale d'aménagement. Disponibles sur le site du CGDD, elles peuvent aussi être affichées sur l'outil Google Earth. Des données similaires devraient être bientôt consultables sur le site de l'Agence européenne de l'environnement (AEE) pour 38 pays européens, pays de l'UE compris.

 

Anne Lenormand