Les élus intercommunaux impatients de dialoguer avec le nouveau gouvernement

Les responsables d'Intercommunalités de France ont souhaité ce 30 septembre que l'exécutif dévoile rapidement ses orientations. Ils se sont déclarés ouverts à un "débat clair et apaisé" sur la question de la participation des collectivités à la maîtrise des finances publiques.

À la veille du discours de politique générale du Premier ministre et à une dizaine de jours de la présentation du projet de loi de finances (PLF) pour 2025, Sébastien Martin, le président de l'association qui fédère près de 1.000 intercommunalités (communautés de communes, communautés d'agglomération…), a appelé ce 30 septembre le gouvernement à faire preuve de clarté dans ses intentions concernant les finances publiques et le champ d'action de leurs structures, faisant remarquer qu'elles avaient besoin de "visibilité" et de "stabilité". Il a listé des questions lors d'une conférence de presse. 

Le nouveau gouvernement poursuivra-t-il la mise en oeuvre des contrats de relance et de transition écologique (CRTE) et le programme Territoires d'industrie, que les gouvernements issus du parti d'Emmanuel Macron avaient mis en place ? Soutiendra-t-il une réforme de la décentralisation de la politique du logement, comme avait pu le faire un temps le gouvernement d'Élisabeth Borne ? Ira-t-il jusqu'à confier aux collectivités les dispositifs d'aides à la rénovation énergétique dans les logements, comme le demande Intercommunalités de France ? 

Des actes valent mieux que des discours

Concernant les finances locales, l'équipe dirigée par Michel Barnier s'inscrit-elle dans la continuité du gouvernement sortant – qui avait déclenché une vive polémique en pointant la responsabilité des collectivités dans la hausse du déficit public cette année (voir notre article) - ou "ramènera-t-elle de la mesure dans l'analyse de la situation financière du pays ?", s'est interrogé le président d'Intercommunalités de France.

Après les trois mois de pause institutionnelle provoquée par la dissolution de l'Assemblée nationale et l'attente de la nomination d'un nouveau Premier ministre, "il est temps de se mettre au travail", a déclaré le président d'Intercommunalités de France, indiquant que l'association "continuera à travailler dans un esprit de dialogue et de construction, quels que soient les aléas politiques". 

La création d'"un ministère plein chargé des collectivités" – en l'occurrence celui du Partenariat avec les territoires et de la Décentralisation - est une bonne nouvelle selon Sébastien Martin, pour qui "la situation sera plus claire et fluide pour les relations entre les collectivités et le gouvernement". D'autant que ce "super-ministère" a été confié à Catherine Vautrin, l'ancienne présidente de la communauté urbaine du Grand Reims, une élue qui "connaît bien le monde des collectivités et le couple communes-communauté avec toutes ses subtilités", a estimé Sébastien Miossec, président délégué d'Intercommunalités de France. Mais les premières déclarations de la ministre envoyant un signal positif à l'égard des collectivités devront être suivies d'"actes", ont considéré les responsables de l'association.

Suspension de la baisse de la CVAE : "Il faut en parler"

Le sujet des finances locales est sans doute le premier dont ils devront s'emparer, puisque Sébastien Martin rencontrera le 4 octobre le ministre chargé des comptes publics. Laurent Saint-Martin a en effet souhaité très rapidement réunir les représentants des associations d'élus locaux "pour discuter de la trajectoire financière des collectivités à partir de 2025" (voir notre article sur les premières déclarations du ministre), dans le contexte d'un déficit public record cette année. Un échange que les élus des intercommunalités sont prêts à engager, notamment parce que les collectivités sont à l'origine d'environ un cinquième de la dépense publique. Mais le nécessaire débat doit être "serein" et ne doit pas démarrer "en donnant des chiffres en pâture" et "en mélangeant des choux et des carottes", comme cela fut fait au début de ce mois par les ministres démissionnaires de Bercy, selon Sébastien Martin.

S'agissant des économies dans les dépenses publiques, autre sujet qui devrait être abordé lors de ce rendez-vous, "on ne l'ignore pas", assure Sébastien Miossec. Intercommunalités de France aura sans doute des propositions en la matière, notamment en se fondant sur le rapport de Boris Ravignon sur le millefeuille administratif (voir notre article). Le rapport remis fin mai par le président d'Ardenne métropole et vice-président d'Intercommunalités de France est une "source d'inspiration" pour l'association. Son président estime aussi qu'il faut parler de l'hypothèse d'une suspension de la baisse progressive de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), qui doit conduire à sa suppression en 2027. "C'est un élément de prudence" et un enjeu de "3 à 4 milliards d'euros", déclare-t-il. Sur ce sujet des coupes budgétaires, Intercommunalités de France rappelle par ailleurs son inquiétude quant au sort qui sera réservé au fonds vert dans le projet de loi de finances pour 2025 – pour rappel, le gouvernement Attal a prévu de le faire fondre (voir notre article).

Communes et communautés : "faire bloc ensemble"

Par ailleurs, pour garantir aux collectivités la prévisibilité dont elles ont besoin pour investir, notamment dans le contexte de la transition écologique, l'association met sur la table l'idée de mettre en place une "loi de programmation des finances locales".

Une semaine après la présentation du PLF 2025, la 34e convention que les Intercommunalités de France tiendront au Havre (du 16 au 18 octobre) sera, elle aussi, un moment de "clarification", déclare l'association. Qui compte sur ce rendez-vous pour "recréer des liens de travail avec le gouvernement". Trois ministres (Catherine Vautrin, Agnès Pannier-Runacher et François Durovray) ont déjà en effet annoncé leur présence et cette liste devrait s'allonger dans les prochains jours. En sachant que le Premier ministre pourrait lui aussi faire le déplacement jusque dans la cité d'Édouard Philippe.

"Faire bloc ensemble" : ce sera le thème de cette convention, à laquelle près de 2.000 élus ou collaborateurs d'élus sont attendus. "La force de l'intercommunalité est dans les communes et la force des communes est dans la coopération intercommunale", explique le président de l'association. Il n'y a "pas de relation de hiérarchie de l'un par rapport à l'autre", mais chaque composante du couple "fait avec" l'autre.