Les dépenses d'aménagement de terrains vont redevenir éligibles au FCTVA
Equipements publics, terrains de sport, voies vertes… Les aménagements de terrains vont de nouveau être éligibles au Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), a annoncé le gouvernement. Très attendue par les élus locaux, la mesure sera inscrite dans le projet de loi de finances pour 2024. Les ministres délégués aux Comptes publics et aux Collectivités territoriales l'ont dévoilé lors de réunions, en fin de semaine dernière, avec les associations d'élus. Budgets verts, dotations des intercommunalités… Une série d'autres informations ont été communiquées à cette occasion.
Un concert de louanges de la part des associations d'élus locaux pour une mesure gouvernementale. C'est rare. C'est ce qui s'est produit ce week-end sur les réseaux sociaux, à l'annonce par l'exécutif de l'extension du périmètre du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) aux opérations d'aménagement. L'Association des maires de France (AMF) a salué "une avancée importante", son président David Lisnard parlant d'"une injustice qui prend fin", d'"une mesure financière bienvenue", et d'"une demande insistante de l'AMF qui aboutit". "Les associations d’élus se sont battues et, bonne nouvelle, ont obtenu gain de cause", s'est félicité pour sa part Gil Avérous, président de Villes de France.
La Première ministre l'a annoncé officiellement le 15 septembre par un courrier aux présidents des associations d'élus locaux. "J'ai souhaité que les dépenses d'aménagement soient désormais réintégrées dans l'assiette du FCTVA", écrit-elle dans ce courrier rendu public sur X (anciennement Twitter). Pour financer la mesure, l'enveloppe financière du FCTVA (qui atteignait 7 milliards d'euros en 2023) sera abondée d'environ 250 millions d'euros.
Espaces verts et naturels, terrains sportifs…
"C'est un soutien concret à vos projets, qui concourent directement à nos objectifs de transition écologique et à l'ambition de cohésion des territoires", souligne Elisabeth Borne. La décision permettra de soutenir "les opérations d’aménagement d’espaces verts et naturels, en lien avec les efforts de renaturation dans le cadre du fonds vert et de la transition écologique", détaillent Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des Comptes publics et Dominique Faure, ministre déléguée chargée des Collectivités territoriales, dans un communiqué commun. Ce sera aussi un outil d'aide aux "opérations d’aménagement de terrains sportifs, à moins d’un an des Jeux olympiques et paralympiques (JOP) de Paris 2024", précisent-ils. Un point qu'Amélie Oudéa-Castéra, ministre des Sports, n'a pas manqué de mettre en avant, elle aussi. Le gouvernement "prend un nouvel engagement fort (…) aux côtés des élus locaux pour continuer à construire et rénover nos équipements sportifs", a-t-elle déclaré sur X.
L'éligibilité des dépenses d’acquisition et d’aménagement de terrains au FCTVA était depuis près de deux ans une revendication unanime des associations d'élus locaux et de la fédération des élus des entreprises publiques locales (FedEpl). Depuis la mise en œuvre progressive, à partir de 2021, de la réforme de l'automatisation des dépenses du FCTVA, ces dépenses-là n'étaient plus prises en compte dans le calcul des attributions au titre du FCTVA. Pour rappel, ce dispositif financier a pour but d'assurer une compensation, au taux de 16,404%, de la charge de TVA, que les collectivités territoriales et leurs groupements supportent sur leurs dépenses réelles d’investissement et qu’ils ne peuvent pas récupérer par la voie fiscale. Les élus locaux dénonçaient une logique qui "déséquilibre financièrement" les projets d'investissement, notamment dans le domaine de l'environnement. Les conséquences sont particulièrement "violentes" pour les collectivités d'outre-mer, faisaient-ils valoir.
Budgets verts : "notre boussole commune"
Le gouvernement avait mis son veto, à plusieurs reprises, à des tentatives, notamment de sénateurs, visant à réintroduire les dépenses d’acquisition et d’aménagement de terrains dans l'assiette du FCTVA. Il arguait de la nécessité de dresser un bilan de la réforme de l'automatisation du FCTVA. Un bilan qui a été finalement dressé récemment par les inspections de l'Etat. Ce qui a ouvert la voie à des discussions entre le gouvernement et les associations d'élus locaux, dans le cadre de l'Agenda territorial.
Thomas Cazenave et Dominique Faure avaient dévoilé l'arbitrage gouvernemental aux associations d'élus locaux lors de réunions bilatérales organisées les 14 et 15 septembre avec un certain nombre d'associations d'élus locaux. Des rencontres dédiées au prochain projet de loi de finances pour 2024 et au projet de loi de programmation des finances publiques, que l'Assemblée nationale examinera en nouvelle lecture à partir du 25 septembre.
Une occasion notamment de poursuivre la concertation sur les budgets verts chers à Thomas Cazenave. Ces derniers "doivent devenir notre boussole commune pour réussir ensemble la transition écologique", estime le nouveau locataire de Bercy, qui pousse à l'introduction d'une disposition dans le PLF pour 2024. Mais Matignon ne serait pas très enthousiaste, assure le responsable administratif d'une association d'élus locaux. La Première ministre et son entourage voudraient éviter d'imposer une mesure qui risque de compliquer la gestion des petites collectivités. Un seuil minimum de population pourrait donc être prévu.
DGF des intercommunalités
Lors des échanges, le gouvernement a aussi confirmé que le PLF 2024 n'inclura pas la réforme de la DGF des intercommunalités un temps évoquée par Dominique Faure. Le projet visait à réduire la dotation de compensation des intercommunalités à fiscalité propre (4,7 milliards d'euros en 2021) - dont l'attribution est très inégale -, afin d'augmenter la dotation d'intercommunalité (1,6 milliards d'euros en 2021), considérée comme plus juste. En dépit d'un geste financier de "quelques dizaines de millions d'euros chaque année" de la part de l'Etat pour faire accepter la réforme, celle-ci suscitait encore récemment une levée de boucliers de la part notamment des élus des grandes villes (France urbaine). Le projet ne serait toutefois pas enterré, puisque le gouvernement souhaiterait continuer à travailler sur le sujet, dans la perspective du PLF pour 2025. En attendant, le PLF pour 2024 prévoirait une réforme a minima, selon nos informations : la dotation de compensation serait réduite de 60 millions d'euros, la somme devant être réinjectée dans la dotation d'intercommunalité. En outre, l'Etat ajouterait un complément de 60 millions d'euros d'"argent frais". Un geste qu'un président d'intercommunalité juge modeste : "une hausse de 1% de la DGF des intercommunalités, ça reste très en deçà de l'inflation".
Sur le niveau global de la DGF et son éventuelle évolution, question ultra-sensible, l'exécutif reste en revanche muet. Le signe, peut-être, que les velléités du gouvernement ne seront pas à la hauteur des attentes des élus locaux, lesquels demandent toujours une indexation des dotations sur l'inflation.
Le gouvernement présentera officiellement les dispositions sur les finances locales contenues dans le PLF pour 2024, lors d'une séance plénière du comité des finances locales, le 26 septembre.
Au même moment, l'Assemblée nationale examinera en nouvelle lecture, lors de la session extraordinaire, le projet de loi de programmation des finances publiques 2023-2027. Un texte qui ne réintroduira pas les contrats de Cahors, a promis la semaine dernière Thomas Cazenave. Le dispositif de maîtrise des dépenses des grandes collectivités est bel et bien enterré. Et donc, avec lui, l'existence de sanctions pour les collectivités qui ne respecteraient pas leurs objectifs en matière de dépenses. Toutefois, le ministre a assuré que le gouvernement "compte sur l'ensemble des parties prenantes de la dépense publique pour jouer le jeu du ralentissement de la dépense", comme le rapporte Sébastien Miossec, président délégué des Intercommunalités de France.