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Assistantes maternelles - Les décisions de justice s'imposent aux départements

Un arrêt du Conseil d'Etat du 28 novembre 2007 rappelle qu'en matière d'agrément des assistantes maternelles, le principe de précaution ne peut prendre le pas sur les décisions de justice. En l'espèce, le président du conseil général de Meurthe-et-Moselle avait suspendu, puis retiré l'agrément d'une assistante maternelle par une décision du 6 mai 2002. S'appuyant sur la rédaction de l'époque de l'article L.421-1 du Code de l'action sociale et des familles (modifié depuis lors par la loi du 27 juin 2005 relative au statut des assistants familiaux et des assistants maternels), il avait considéré que la personne en question ne remplissait plus "les conditions d'accueil [garantissant] la santé, la sécurité et l'épanouissement des mineurs accueillis". A la suite des propos tenus par une enfant gardée par l'assistante maternelle, il était en effet apparu des doutes sur le comportement de son conjoint. Une information judiciaire avait alors été ouverte, justifiant la suspension, puis le retrait de l'agrément. Mais l'instruction s'était soldée par un non-lieu en février 2003, "au motif que l'instruction n'avait pas permis d'établir les faits allégués".  En dépit de ce non-lieu, le président du conseil général avait refusé de revenir sur sa décision de retrait d'agrément du 6 mai 2002. Saisi par l'assistante maternelle, le tribunal administratif de Nancy avait annulé cette décision. Un arrêt confirmé par la cour administrative d'appel (CAA) de Nancy, le 9 mai 2005.
Le département de Meurthe-et-Moselle s'était alors pourvu en cassation contre cet arrêt. Dans son arrêt du 28 novembre 2007, le Conseil d'Etat annule certes l'arrêt de la cour administrative d'appel. Mais cette annulation se fonde sur une erreur de droit de la CAA. Dans son arrêt, celle-ci estimait en effet "que les éléments recueillis par l'administration à la date du 6 mai 2002 pouvaient seulement justifier le maintien de la suspension de l'agrément prononcée le 13 février 2002 et n'étaient dès lors pas de nature à justifier une décision de retrait". Or, le Conseil d'Etat souligne que le décret du 29 décembre 1992, en vigueur à l'époque des faits, exclut toute prolongation de la mesure de suspension au-delà de trois mois. S'appuyant sur les dispositions de l'article L.821-1 du Code de justice administrative, le Conseil d'Etat décide, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond. Outre le non-lieu judiciaire, il rappelle que le département de Meurthe-et-Moselle n'a produit, à l'appui de sa décision de retrait comme de ses requêtes successives, aucun élément de fait, "ni même n'allègue d'autres faits que ceux ayant donné lieu à la procédure pénale". Dans ces conditions, le Conseil d'Etat annule la décision de retrait d'agrément du 6 mai 2002 et condamne le département à verser 800 euros au titre des frais de justice.

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

Référence :  Conseil d'Etat, arrêt 282307 du 28 novembre 2007, Mme A c/ département de la Meurthe-et-Moselle.