Sécurité - Les attentats ont poussé les maires à armer leur police
Le contexte des attentats a conduit de plus en plus de maires de villes moyennes à armer leur police. C'est ce que constate Villes de France (l'association qui les représente) dans son nouveau panorama sur les polices municipales publié le 16 janvier. Ainsi, deux tiers des villes moyennes (67%) disposent de policiers municipaux équipés d'armes de catégorie B (revolvers) ou sur le point de l'être, alors qu'un quart seulement étaient dans cette situation en 2010. "Répondant dans le passé à une logique plutôt géographique, le contexte de terrorisme que traverse le pays a indéniablement changé la donne", observe l'association dans son panorama. Désormais, "la légitime défense des agents, la protection de la population, ou encore la prolongation de l'état d'urgence, ont plaidé pour ce choix politique, qui relève jusqu'ici uniquement du maire". De nombreuses villes comme Agde, Les Pennes-Mirabeau, Saint-Benoît (la Réunion), Thionville ou Vitrolles ont précisé vouloir "basculer sur un armement et un calibre identique à celui utilisé par les forces de l'ordre (armes semi-automatiques de 9 mm)".
On rappellera que l'acquisition d'armes a été facilitée par le ministère de l'Intérieur qui a mis 4.000 revolvers à la disposition des villes, suite aux attentats de janvier 2015. Derrière ces armes à feu, c'est à toute la "panoplie" du policier municipal que les mairies ont recours : acquisition de gilets pare-balles (là encore facilitée par une subvention du ministère de l'Intérieur) et armes non létales telles que les pistolets à impulsion électrique type Taser.
Doctrine d'emploi
Cette évolution est aussi la traduction de l'exposition accrue des policiers municipaux et de leur montée en puissance dans des tâches de police administratives du fait des prolongations successives de l'état d'urgence : surveillance des bâtiments sensibles, participation à des actions de maintien de l'ordre public, missions d'escortes, "relevant normalement directement du représentant de l'Etat en lien avec la police nationale ou la gendarmerie", observe l'association, dans un communiqué du 16 janvier. Les Villes de France s'interrogent ainsi "sur l'extension, a priori temporaire, des missions de leur police municipale".
"Dans le cadre de l'état d'urgence, les plus hautes instances nous demandent beaucoup", avait déjà fait remarquer la présidente de Villes de France Caroline Cayeux lors de ses vœux la semaine dernière, jugeant la question de l'armement et de l'équipement des policiers municipaux "centrale". "Peut-être un peu trop à notre goût, puisque nous n'avons pas encore eu l'occasion de débattre avec le ministère de l'Intérieur de ses intentions, ni d'évoquer une 'nouvelle doctrine d'emploi', encore moins les évolutions législatives rendues nécessaires, par une situation de fait", avait expliqué la sénatrice-maire LR de Beauvais.
Effectifs en hausse
L'association rappelle dans son communiqué que la police municipale doit agir en "complémentarité et non en substitution des forces de police de l'Etat" et elle redemande une clarification de la doctrine d'emploi des polices, comme le réclament les syndicats de longue date. Le panorama montre à ce titre que 77% des maires interrogés sont "hostiles" à la possibilité que les polices municipales deviennent un jour une "réserve d'ajustement" de la police de l'Etat pour les missions de police administrative. Un sentiment qui pourrait être accentué par le fait que de nombreux maires qui ont augmenté leurs effectifs constatent dans le même temps une diminution de la présence des forces de police et de gendarmerie sur le terrain. Les effectifs de police municipale des villes moyennes a augmenté de 20% sur les six dernières années, pour s'établir à 19 agents en moyenne.
Le panorama montre par ailleurs que la vidéoprotection est en plein essor. Désormais, 80% des villes moyennes en sont équipées contre 50% en 2010. Celles qui ne le sont pas encore (18 sur les 92 réponses) se convertissent peu à peu. Sept d'entre elles ont en effet annoncé qu'elles s'équiperaient cette année (Brive-la-Gaillarde, Châtellerault, Fougères, La Rochelle, Saint-Benoît, Saint-Martin-d'Hyères et Villeneuve-d'Ascq). La vidéo représente un coût d'investissements de 290.000 euros par an en moyenne, soit les trois quarts des dépenses d'équipement des villes moyennes consacrées à la sécurité et à la prévention de la délinquance. S'agissant des projets de polices intercommunales, seules six villes (Agde, Annecy, Etampes, Lagny-sur-Marne, Ozoir-la-Ferrière, Romans-sur-Isère et Villeneuve-d'Ascq) ont indiqué s'être engagées dans cette voie.