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Insertion - Les associations de chômeurs fustigent toujours les "effets pervers" du RSA

Pour la première fois, le Mouvement national des chômeurs et précaires (MNCP), créé en 1986, publie son "Rapport 2011 sur la situation des chômeurs, chômeuses et précaires". Ce document peut certes difficilement prétendre à l'exhaustivité et à la rigueur scientifique des publications de l'Insee, de la Dares, de l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale (Onpes) ou même d'associations disposant d'une cellule statistiques comme le Secours catholique. Mais il ne prétend pas à une telle approche et reflète plutôt, à travers sa dimension revendicative et le passage en revue de plusieurs thèmes liés au chômage, une vision rarement prise en compte : celle des personnes en situation de précarité. Des chapitres sont ainsi consacrés à la stigmatisation des chômeurs, au rôle de la médiation de Pôle emploi, au suicide...

Pauvreté et chômage, un champ inexploré

On retiendra surtout deux thèmes abordés par le rapport 2011. Le premier concerne le lien entre chômage et seuil de pauvreté. Non sans raison, le rapport rappelle qu'il s'agit là d'un thème encore très peu étudié. De même, il estime "que l'on ne sait que peu de choses des centaines de milliers de personnes supplémentaires arrivées en fin de droits à partir de 2010". Les pouvoirs publics ont certes constaté que le dispositif mis en place pour venir en aide aux chômeurs en fin de droits n'a accueilli que quelques dizaines de milliers de personnes, là où le gouvernement en attendait 325.000. Mais pour le MNCP, les chômeurs en fin de droits "sont venus, pour partie, grossir les rangs des allocataires du RSA". Cette hypothèse ne cadre toutefois guère avec la progression modérée du RSA-socle en 2011. Pour le reste, il faut se contenter de visions partielles, qui peinent à mesurer les interactions entre chômage et pauvreté.
Le rapport consacre un autre chapitre au "RSA, un dispositif à revoir". Le MNCP n'a jamais caché ses réserves face au revenu minimum d'activité (RMA), puis au revenu de solidarité active. Les reproches sont de plusieurs ordres. S'appuyant sur le rapport de la conférence nationale d'évaluation du RSA de décembre 2011, le MNCP - dont les militants avaient d'ailleurs perturbé la présentation - reproche en premier lieu à ce dispositif l'inefficacité de son volet "activité". Le "manque à distribuer" serait ainsi de l'ordre de 5,3 milliards d'euros annuels. Le rapport de la conférence nationale estime en effet que "la somme est importante puisqu'elle se chiffre à environ 3,1 milliards d'euros par an non distribués suite au non-recours au RSA-socle seul, et 2,2 milliards d'euros non distribués suite au non-recours au RSA-socle et activité et activité seul" (voir notre article ci-contre du 19 décembre 2011).

Le RSA-activité, facteur de précarité ?

Le second reproche vise le fait que le RSA serait "un outil au service de la précarisation de l'emploi". Dès 2009 - au moment de la mise en place de la nouvelle prestation -, le MNCP affirmait ainsi que "les effets pervers du RSA prennent le pas sur ses objectifs initiaux" : "Il devient au fil des mois un outil supplémentaire au service de la réduction du coût du travail en précarisant l'emploi." L'association estime aujourd'hui que le RSA-activité a introduit "une brèche" dans le droit du travail, en faisant "sponsoriser par l'Etat la progression de la précarité salariale".
Enfin, le dernier reproche formulé par le MNCP à l'encontre du RSA vise très directement les départements. L'association juge en effet que "la 'décentralisation' apportée par le RMA [et reprise par le RSA, ndlr] a par ailleurs introduit l'arbitraire de pratiques départementales divergentes". Une affirmation que le rapport s'abstient toutefois d'étayer par une démonstration ou par des exemples.