Pollution - Les algues vertes jugées indésirables en Bretagne
Le tribunal administratif de Rennes a rendu le 25 octobre son jugement dans l'affaire des marées vertes mettant en cause les préfets du Finistère et des Côtes-d'Armor pour carence administrative. Le juge considère que "la carence de l'Etat dans la mise en oeuvre des réglementations nationale et européenne constitue une faute de nature à engager sa responsabilité, et que cette faute est en relation directe avec la pollution nitratée des eaux à l'origine du phénomène des marées vertes dans les baies de Saint-Brieuc et de Douarnenez". Il est établi selon les juges que "les marées vertes en cause ont trouvé très majoritairement leur origine dans les nitrates issus de la dégradation des apports azotés agricoles", qui proviennent, poursuit le tribunal, de "l'épandage des lisiers issus des exploitations d'élevage".
Or, comme le relève le tribunal, "les études d'impact des installations ayant été autorisées ont été insuffisantes". Surtout, "les demandes de régularisation des élevages en infraction ont fait l'objet quasi-systématiquement de régularisations". Ainsi en 2001, 56.188 porcs illégalement présents ont été régularisés alors que les exploitations en cause se trouvaient en zone d'excédent structurel.
Il est encore reproché à l'Etat l'insuffisance manifeste des contrôles et le retard dans la transposition de la directive du 12 décembre 1991 concernant la protection des eaux contre la pollution par les nitrates. En 2001, la Cour européenne avait aussi jugé que la France avait manqué à ses obligations imposées au titre d'une directive de 1975 cette fois et visant à protéger les eaux de surface destinées à la production d'eau alimentaire de la pollution, lui valant au passage une menace de devoir payer 28 millions d'euros.
Cette condamnation ne réjouit pas forcément les associations requérantes au premier rang desquelles, "Eaux et Rivières de Bretagne", qui obtient pour réparation de son préjudice 4.000 euros. Deux autres associations, "Halte aux marées vertes" et "Sauvegarde du Trégor", n'obtiennent quant à elles qu'une condamnation symbolique de l'Etat à leur payer 1 euro pour leur préjudice moral.
Une telle différence entre le réquisitoire prononcé à l'encontre de l'Etat et la condamnation effective s'explique en grande partie, pour le responsable d'Eaux et Rivières de Bretagne, par "l'absence de requêtes conjointes des communes concernées et de particuliers". Les associations s'attendaient également à une condamnation plus lourde compte tenu des précédents pour lesquels l'Etat avait déjà été condamné par ce même tribunal le 2 mai 2001 et le 3 mai 2007.
Cette nouvelle affaire intervient alors que les risques sanitaires de la décomposition des échouages d'algues vertes avaient conduit le préfet des Côtes-d'Armor à suggérer aux maires du littoral, le 1er octobre dernier, "de favoriser le ramassage des algues échouées avant putréfaction et d'élargir les zones de ramassage en facilitant, voire en réglementant, l'accès à certaines périodes, aux zones où le ramassage est impossible".
Pour l'avenir, Eaux et Rivières de Bretagne ne se montre guère optimiste. Non seulement, le Grenelle a ignoré la thématique de l'eau dans ses débats, "ce qui est fort regrettable", relève l'association. Enfin, la directive-cadre européenne de 2000, transposée de manière incomplète le 21 avril 2004, se donne certes comme objectif d'atteindre le bon état écologique des eaux en 2015 mais en prévoyant une application finale de ses objectifs pour décembre 2027.
Xavier Sidaner / Victoires Editions
Référence : tribunal administratif de Rennes, Associations "Halte aux marées vertes" et autres, req. 0400630 et suivantes.