L'enseignement agricole, discret et efficace
L'enseignement agricole, piloté par le ministère de l'Agriculture, possède des caractéristiques qui le distinguent de l'Éducation nationale. Son portrait apporte un éclairage sur ses particularités et ses réussites.
Le monde de l'enseignement agricole est mal connu. C'est pourquoi il est intéressant de se plonger dans le "portrait 2021" que le ministère de l'Agriculture, son administration de tutelle, vient de publier. On y découvre le visage d'un enseignement très loin du simple copié-collé à une échelle plus réduite des enseignements général, professionnel et technologique dispensés par l'Éducation nationale.
La première idée reçue que met à bas l'étude est celle d'un enseignement agricole aux parcours fermés, centrés sur eux-mêmes. Les filières de l'enseignement agricole sont diverses, parfois complexes. On peut s'y orienter vers un brevet professionnel, un CAP ou une seconde professionnelle, pour aboutir à un bac professionnel, mais également à un bac général ou technologique. Ces deux dernières filières permettant par la suite de bénéficier de passerelles vers les formations supérieures de l'Éducation nationale. L'enseignement agricole, ce sont aussi, dans le supérieur, des BTS, des écoles d'ingénieurs, vétérinaires et de paysage.
Des établissements majoritairement privés
Au total, ce sont plus de 190.000 élèves, étudiants et apprentis qui étaient scolarisés dans un établissement de l’enseignement agricole technique en 2020. Ces effectifs sont toutefois au plus bas depuis 1997. À ceux-ci s’ajoutent plus de 16.000 étudiants de l’enseignement supérieur long. Ce qui amène à un deuxième constat peu connu : les établissements publics n'accueillent que 39,5% des élèves. En effet, si l'enseignement agricole compte actuellement 806 établissements scolaires, seuls 217 sont des lycées agricoles publics, tandis que 210 sont des lycées agricoles privés. Parallèlement, on trouve 11 centres médicoéducatifs et surtout 368 maisons familiales rurales, des établissements associatifs sous contrat de participation avec l’État ou sous convention avec les conseils régionaux.
En termes géographiques, la carte des implantations des lycées agricoles réserve également quelques surprises. Si Paris et la Petite Couronne sont dépourvues d'établissements publics d’enseignement et de formation professionnelle agricoles, hors écoles d'ingénieurs, plusieurs départements, y compris ruraux, n'en comptent qu'un seul, à l'image du Lot-et-Garonne, de la Dordogne, de la Charente, des Alpes-de-Haute-Provence ou des Hautes-Alpes. Des territoires plus peuplés, comme la Seine-Maritime, les Alpes-Maritimes ou le Bas-Rhin ne sont pas mieux lotis, avec un seul établissement également. Parmi les départements les mieux dotés, établissements publics et privés confondus, le Rhône, l'Isère, la Manche et la Vendée se démarquent.
Des effectifs en baisse
Quant à l'évolution des effectifs selon les territoires, elle est le reflet de l'évolution générale : la baisse est présente quasiment partout. Une vingtaine de départements enregistrent une diminution du nombre d'élèves de plus de 5% sur la seule période 2018-2019. Seuls les Hautes-Pyrénées et le Haut-Rhin voient leurs effectifs grimper de plus de 5% dans le même temps.
Parmi les autres caractéristiques des effectifs en lycées agricoles, on note que les filles, majoritaires au début de la décennie, jusqu'à représenter plus de 52% des élèves en 2013/2014, ne formaient plus que 48,5% de l'ensemble en 2019/2020. Autre évolution, sur une période plus longue cette fois : celle de l’origine socioprofessionnelle des élèves. Elle est aujourd’hui plus diversifiée que par le passé. Alors qu’en 1990, près de quatre élèves sur dix étaient des enfants d’agriculteurs ou de salariés agricoles, ce n’est plus le cas que d’un élève sur dix. Ce sont les enfants d’employés et d’ouvriers qui sont les plus nombreux à fréquenter les établissements de l’enseignement agricole : ils représentent 43% des effectifs.
Résultats supérieurs, coût inférieur
En ce qui concerne les résultats scolaires, ils sont meilleurs dans l'enseignement agricole qu'ailleurs. Lors de la session 2020 du baccalauréat, 92,9% des candidats issus des lycées agricoles ont réussi l'examen, contre 90,7% de l'Éducation nationale. En filière technologique, leur taux de réussite était de 98,4%, contre 95,7% chez ceux de l'Éducation nationale.
Autre point remarquable : l'insertion dans la vie active est un point fort de l'enseignement agricole. Le taux net d'emploi trois ans après l'obtention du diplôme était ainsi de 85,9% chez les titulaires d'un bac professionnel agricole et de 92,3% chez ceux d'un brevet de technicien supérieur agricole.
Enfin, ce portrait ne serait pas complet sans revenir sur ce qui caractérise l'enseignement agricole d'un point de vue institutionnel : il relève du ministère de l'Agriculture. En 2020, ce dernier lui a consacré 1,84 milliard d’euros, soit 38% de son budget. Une part qui n'était que de 33% en 2017. Dans le détail, le ministère a dépensé 9.908 euros par élève ou étudiant en lycée agricole public, un coût à comparer aux 11.060 euros par élève en lycée général et technologique et aux 12.730 euros en lycée professionnel dépensés par le ministère de l'Éducation nationale. Ce qui fait dire à Julien Denormandie, ministre de l'Agriculture, que l'enseignement agricole, par ses "qualités" et sa "valeur ajoutée" est un "appareil de formation original et précieux".