L'empreinte environnementale du numérique progresse sous l'impulsion de l'IA
La 4e édition de l'enquête de l'Arcep sur l'empreinte carbone du numérique confirme l'impact de l'IA, avec des chiffres à la hausse pratiquement dans tous les domaines. Une IA qui pèse sur les besoins en centres de données et qui pourrait accélérer le renouvellement des terminaux.

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L'Arcep vient de publier la 4e édition de son enquête annuelle "Pour un numérique soutenable". L'étude traite des émissions directes et indirectes du numérique, notamment liées à l'électricité et aux extractions de métaux pour fabriquer les équipements. L'édition 2025 s'est enrichie de données fournies par les équipementiers de réseaux mobiles et des fabricants de terminaux. Elle intègre surtout les données de 21 opérateurs-hébergeurs représentant la moitié des datacenters tricolores (150). On notera que les centres de données publics ou à usage interne sont exclus. Par ailleurs, les chiffres datent de 2023, alors que l'usage de l'IA générative n'était que balbutiant.
Forte progression des émissions liées aux centres de données
Pour la deuxième année consécutive, l'Arcep publie des chiffres sur les centres de données tricolores. Tous les indicateurs sont à la hausse entre 2022 et 2023 : émissions de gaz à effet de serre (+11%, soit 137.000 tonnes équivalent CO₂), consommation électrique (+8%, soit 2,4 TWh) et consommation d'eau (+19%, soit 681.000 m³).
L'Arcep explique cette augmentation par la multiplication des centres de données, concentrés à 70% en Île-de-France, et l'intensification de leur utilisation pour héberger notamment des services d'IA. Si l'efficacité énergétique de ces infrastructures s'améliore avec un PUE (power usage effectiveness) moyen passant de 1,51 à 1,46, cela ne compense pas la croissance des usages. L'étude note cependant que "les centres récents et disposant d'une capacité informatique importante sont les plus efficaces énergétiquement".
L'empreinte des réseaux mobiles continue d'augmenter
Côté réseaux, l'empreinte carbone des opérateurs télécoms a augmenté de 4,2% en 2023 pour atteindre 397.000 tonnes équivalent CO₂, alors que dans le même temps les émissions de GES en France diminuaient de 5,8%. La consommation électrique des réseaux (4,1 TWh au total) progresse de 2% en 2023, tirée par les réseaux mobiles dont la consommation atteint 2,8 TWh. À l'inverse, celle des réseaux fixes a diminué grâce à "la généralisation de la fibre optique", quatre fois moins énergivore que le cuivre. Pour affiner ces chiffres, l'Arcep va cependant inclure prochainement l'incidence de la fabrication des réseaux en fibre optique.
Au-delà de la consommation électrique, la fabrication des nouvelles antennes a mobilisé 2,4 tonnes de métaux précieux et généré l'émission de 79.000 tonnes équivalent CO2. En outre, les équipements constitutifs d'une station de base 5G en bande 3,5 GHz ont une empreinte carbone embarquée 80% supérieure à une station sans émetteur 3,5 GHz.
Les terminaux, premiers contributeurs
Les terminaux restent le premier contributeur à l'empreinte carbone du numérique, représentant 50% des émissions, principalement lors de la phase de fabrication. L'étude constate que la diminution des ventes d'équipements - téléphones mobiles (-13%), ordinateurs portables (-9%), écrans d'ordinateur (-17%), téléviseurs (-4%) et tablettes (-15%) – est contrebalancée par l'augmentation de la taille moyenne des écrans. Or, "plus l'écran d'un terminal est grand, plus il génère d'impacts environnementaux en phase de fabrication, comme en phase d'usage". Ainsi, un téléviseur de plus de 70 pouces consomme six fois plus d'électricité (145 watts) qu'un modèle de moins de 33 pouces (25 watts). L'enquête s'inquiète également d'une possible accélération du renouvellement des équipements sous l'impulsion de l'intelligence artificielle générative.
Ces tendances pèsent aussi sur les ventes de terminaux reconditionnés, qui ne représentent que 4% des ventes des opérateurs. Concernant les box enfin, l'Arcep note que leur consommation diminue (-5%) mais qu'une marge de progression existe car 95% de celle-ci ne dépend pas de l'usage de la box.
Le poids des émissions importées La prise en compte des émissions de CO2 importées a conduit l'Arcep et l'Ademe à ajuster la répartition entre les 3 composantes de l'empreinte du numérique en janvier 2025. Si l'impact des réseaux est resté stable depuis 2020, à 4-5% de l'empreinte carbone, la part des centres de données a bondi à 46% en 2022 (contre 16% en 2020), celle des terminaux s'établissant à 50% (79% en 2020). Globalement l'empreinte du numérique représentait en 2022 4,4% de l’empreinte carbone nationale, soit 29,5 millions de tonnes de CO2. |