L'Église lance ses états généraux du patrimoine religieux
L'Église a lancé mardi 12 septembre des "états généraux du patrimoine religieux" pour réfléchir, après un recensement, aux usages permettant de mettre en valeur ce patrimoine extrêmement riche, mais écrasant pour les finances des petites communes.
Pour le coup d'envoi de ce processus de quinze mois, la Conférence des évêques de France (CEF) avait délocalisé sa conférence de presse à Bonnesvalyn (Aisne), village de 216 habitants qui peine à financer la restauration de son église romane du XIIe siècle. "Il y en a pour 700.000 euros de travaux. Même avec les subventions publiques, 70.000 euros restent à notre charge, soit un tiers du budget communal", explique le maire, Stéphane Frère, qui n'avait pas hésité cet été à entreprendre un Nice-Le Vatican à vélo pour lever des fonds.
Avec 100.000 édifices, le patrimoine religieux français est le deuxième plus important au monde après l'Italie. Si 60.000 sont des propriétés privées (écoles, institutions, châteaux...), 40.000 églises appartiennent aux communes, rappelle Gautier Mornas, responsable du département "Art sacré" de la CEF. L'Église possède pour sa part "1.885 édifices construits depuis 1905", date de la loi Séparation des Églises et de l'État, ajoute-t-il.
Début juin, Emmanuel Macron avait dit son intention de classer davantage d'édifices cultuels et évoqué une possible souscription pour restaurer le "patrimoine religieux modeste" (voir notre article). Tout en répétant l'"intérêt" de la CEF pour cette souscription, le père Mornas a souhaité, à quelques jours des Journées européennes du patrimoine, qu'"il y ait une grande figure médiatique pour l'accompagner".
Symboliquement, les états généraux se termineront avec la réouverture de Notre-Dame de Paris, prévue en décembre 2024. Ils prévoient un vaste recensement du patrimoine immobilier (églises, chapelles...), mobilier (statues, tableaux...) et immatériel (chemins de pèlerinage notamment). Des experts seront auditionnés et des journées d'études organisées.
L'Église compte également recenser les usages "compatibles avec le culte" au sein des édifices religieux. Il ne s'agit pas d'installer boîtes de nuit ou restaurants dans des églises : cela supposerait de désacraliser, ou plutôt de "désaffecter" les édifices (et seuls 255 l'ont été en un siècle). Mais "depuis des siècles, on vit des usages compatibles dans les églises sans le savoir", affirme Gautier Mornas. Concerts, exposition, vestiaires solidaires, jusqu'aux antennes-relais installées dans les clochers ou les révisions scolaires organisées ça et là : le champ est large, et "on ne peut pas laisser gâcher cette question fondamentale par deux ou trois faux problèmes", ajoute-t-il.