Le Sénat propose la création d'un référendum d’initiative partagée... d'initiative citoyenne
Pour le Sénat, la démocratie représentative doit avoir la "primauté" et "le développement des instruments de démocratie directe ou participative doit avoir pour corollaire le renforcement du rôle du Parlement". C'est ce que vient d'affirmer le groupe de travail sur la révision constitutionnelle, réuni par Gérard Larcher, président du Sénat, le 20 mars.
"La démocratie directe ou participative est complémentaire de la démocratie représentative et il n’y a pas lieu d’opposer l’une à l’autre", peut-on lire également dans le communiqué. Suivent trois propositions du président du Sénat pour "revivifier le droit de pétition devant le Sénat" : un "droit de tirage citoyen" permettant à des citoyens, via une pétition, de déclencher "la création, une fois par session, d’une mission d’information sénatoriale" ; un "droit d’initiative législative", soit l'inscription d'une proposition de loi d'origine citoyenne si le texte "a recueilli un nombre significatif de signatures" ; et la "mise en place de séances de questions posées par les citoyens soit aux membres du gouvernement, soit aux sénateurs". Le Sénat propose une expérimentation de ces modalités de participation citoyenne "dès la session parlementaire 2019-2020".
Par ailleurs, la Chambre haute soutient l'idée du référendum d'initiative citoyenne (RIC), tout en préconisant de passer par l'assouplissement d'un outil existant : le référendum d'initiative partagée (RIP). Pour "faciliter son déclenchement", il s'agirait d'une part "d’abaisser de moitié les seuils requis pour enclencher la procédure". Et, d'autre part, de "créer une nouvelle procédure initiée directement par les citoyens en inversant les phases de recueil des soutiens". Actuellement, le déclenchement du RIP – qui n'a jamais eu lieu, depuis l'entrée en vigueur en 2015 du dispositif prévu par la réforme constitutionnelle de 2008 – repose sur un schéma complexe : une proposition de loi signée par des députés et des sénateurs doit être soutenue par un cinquième des parlementaires, puis validée par le Conseil constitutionnel, puis signée par 10% du corps électoral (soit 4,5 millions de citoyens) et enfin ne pas avoir été examinée par le Parlement dans un délai de six mois, pour faire l'objet d'un référendum.
Alors que la mise en place d'un RIC est une revendication forte du mouvement des gilets jaunes, de nombreuses voix se sont élevées, au sein du gouvernement et du Parlement, contre un RIC jugé facteur d'instabilité et plutôt en faveur d'un assouplissement des seuils de déclenchement du RIP (voir notre article du 15 février 2019). En l'état toutefois, le RIP n'est pas d'"initiative citoyenne", ce que propose de corriger le Sénat par la création d'une déclinaison du RIP, un "RIP d'initiative citoyenne" en quelque sorte... Le 24 janvier dernier, le président du Sénat avait rendu publiques d'autres propositions du groupe de travail sur la révision constitutionnelle, appelant à "mieux faire la loi, mieux contrôler l'action du gouvernement, réconcilier les citoyens avec le Parlement".