Handicap - Le projet d'ordonnance sur l'accessibilité présente un "degré de précision excessif", pour la CCEN
Alors que le Conseil d'Etat examine ces jours-ci le projet d'ordonnance relative à "la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d'habitation et de la voirie pour les personnes handicapées", le texte a déjà fait l'objet de deux consultations obligatoires, par le Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) et par la Commission consultative d'évaluation des normes (CCEN). Les deux instances s'y opposent, mais pas avec le même argumentaire.
Les normes excessives : un "frein à l'atteinte de l'objectif d'accessibilité"
La CCEN a ainsi émis le 24 juin un avis défavorable sur le projet d'ordonnance, ainsi que sur deux projets de décrets qui lui sont liés (*). La commission présidée par Alain Lambert a considéré que les dispositions prévues témoignaient d'un "degré de précision excessif", ne permettant pas "une mise en œuvre circonstanciée en fonction des différents cas de figure" se présentant localement. Pour la CCEN, "l'encadrement législatif et réglementaire" est même un "frein à l'atteinte de l'objectif d'accessibilité" prévu par la loi du 11 février 2005.
Dans une lettre datée du 30 juin dont Localtis a eu connaissance, Alain Lambert, explicitant les motifs de cet avis à la secrétaire d'Etat chargée des personnes handicapées, précise que ces projets de texte empêchent, en l'état, "l'application des principes de proportionnalité et de subsidiarité". Le président du conseil général de l'Orne rapporte que "les élus ont dénoncé le coût significatif" généré par les dispositions prévues, dans un contexte financier contraint. En outre, "les élus ont également regretté le maintien des dispositions pénales", constituant un "frein à l'action publique locale", ajoute Alain Lambert. Dans le détail des scrutins exprimés par la CCEN sur les projets de texte, quatre avis défavorables émanent de membres représentants des élus locaux ; le seul avis favorable est celui d'un représentant de l'Etat.
"Discernement" pour la CCEN, "bon vouloir des acteurs" pour la CNCPH
Tout en demandant la réalisation d'une "évaluation ex-post" s'attachant à "déterminer le taux d'utilisation des équipements", la délibération de la CCEN lance un "appel solennel au discernement" pour une mise en œuvre des règles d'accessibilité davantage en adéquation aux "moyens financiers des collectivités locales, sauf à ralentir l'effectivité des progrès".
Dans un avis adopté plus récemment (voir notre article du 24 juillet), le Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) s'est également opposé au projet d'ordonnance, mais pour un motif inverse. En mettant l'accent sur la "souplesse de la procédure" prévue, qualifiée de "portes ouvertes au seul bon vouloir des acteurs", la CNCPH a jugé que le projet d'ordonnance était "inacceptable en l'état". Après l'avis du Conseil d'Etat, le projet d'ordonnance devrait être présenté en Conseil des ministres début septembre.
C. Megglé
(*) Les trois projets de texte concernent : l'ordonnance relative à la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d'habitation et de la voirie pour les personnes handicapées ; le décret relatif à l'agenda d'accessibilité programmée pour la mise en accessibilité des établissements recevant du public et des installations ouvertes au public ; le décret relatif au schéma directeur d'accessibilité – agenda d'accessibilité programmée pour la mise en accessibilité des services de transport public de voyageurs.